Chronique du Gouvernement » : Transfert de compétences et de ressources dans la décentralisation - Plus de 67 milliards de francs CFA transmis aux communes
Depuis 1995, le Burkina Faso a opté pour la décentralisation qui consacre le droit des collectivités territoriales à s’administrer librement et à gérer leurs affaires propres en vue de promouvoir le développement. La réforme du processus, avec l’adoption en 2004 du code général des collectivités territoriales qui étend la décentralisation à l’ensemble du territoire, a ouvert une nouvelle ère où l’Etat semble enfin décidé à partager ses responsabilités avec les collectivités territoriales. Depuis 2009, plus de soixante-sept milliards trois soixante-quinze mille six cent cinquante-cinq (67 375 655 000) francs CFA ont été transférés aux communes.
Quatre conditions fondamentales sont à réunir pour qu’il ait décentralisation. Premièrement, il faut que la collectivité ait un territoire propre. Deuxièmement, la collectivité territoriale doit avoir des ressources propres, troisièmement, il faut qu’il y ait l’existence d’élections et enfin, il y a les compétences.
Au Burkina Faso, le Code Général des Collectivités Territoriales stipule que la décentralisation c’est le droit des collectivités à s’administrer librement et à gérer les affaires propres en vue de promouvoir le développement à la base et de renforcer la gouvernance locale. C’est donc pour permettre aux collectivités d’accomplir la mission de développement local que des compétences leur sont transférées.
Qu’est-ce que la compétence ?
C’est l’aptitude d’une autorité administrative ou judiciaire à procéder à certains actes dans des conditions déterminées par les lois et les règlements. C’est ainsi qu’on peut dire, par exemple, que la célébration du mariage relève de la compétence du maire en vertu des lois et des règlements qui ont été conférés en matière d’état civil au maire.
Il s’agit donc pour l’Etat de conférer aux collectivités territoriales, dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de décentralisation, le soin de définir et de gérer, des compétences initialement définies par l’Etat central ou par ses services déconcentrés. L’Etat doit avoir des missions régaliennes et faire en sorte que des attributions légales soient reconnues aux collectivités, afin de leur permettre d’assurer des préoccupations de proximité en matière de développement économique, social, culturel… Ce qui veut dire que dans le cadre du transfert de compétences et de ressources, les ministères ont désormais un rôle à jouer.
Les objectifs visés à travers le transfert des compétences et des ressources c’est d’abord d’accélérer le développement et faire en sorte que les collectivités puissent assurer la prise en charge de proximité. Le deuxième objectif c’est de consolider les bases de l’édifice démocratique et dans la bonne gouvernance, ceci signifie réaliser efficacement les infrastructures et promouvoir les compétences locales.
Dans le cadre du transfert de ces compétences, l’Etat à travers la loi a défini des principes : le principe de subsidiarité qui veut que la compétence soit transférée prioritairement à l’échelon qui peut mieux l’exercer. Ensuite, le principe de progressivité qui signifie que les compétences sont transférées au fur et à mesure aux collectivités, en fonction de leur capacité, de leurs moyens et de l’adhésion des acteurs. Troisièmement, il y a le principe de l’intangibilité. Cela suppose que les compétences qui font l’existence de l’Etat, telles la sécurité du territoire, la défense nationale, la diplomatie ne peuvent pas être transférées.
Il y a aussi le principe d’exclusivité du transfert en ce sens que le transfert de compétences, c’est toujours de l’Etat aux collectivités et enfin le principe d’articulation des politiques locales avec la politique nationale c’est-à-dire que les Plans Communaux de Développement (PCD) doivent être en conformité avec ce que l’Etat aura défini comme orientation du développement.
Constat général de la mise en œuvre du transfert par domaine
Le transfert des compétences aux collectivités territoriales porte au total sur onze blocs de compétences :
- le foncier,
- l’aménagement du territoire, domaine foncier et aménagement urbain,
- l’environnement, la gestion des ressources naturelles,
- le développement économique et la planification,
- la santé et l’hygiène,
- l’éducation, l’emploi, la formation professionnelle et l’alphabétisation,
- la culture, les sports et les loisirs,
- la protection civile, l’assistance et les secours,
- les pompes funèbres, et les cimetières,
- l’eau, l’assainissement et l’électricité,
- les marchés, les abattoirs et les foires.
Sur les onze (11) domaines à transférés seulement quatre (4) ont été effectivement transférés à travers la prise de décrets et la signature de protocoles d’opérationnalisation en 2009. Il s’agit de l’enseignement et l’alphabétisation, de l’approvisionnement en eau potable et l’assainissement, de la santé, la culture, la jeunesse, les sports et les loisirs.
Seul le Ministère de l’Education Nationale (MENA) a fait d’énormes efforts. En effet, depuis l’année 2010-2011, les ressources financières ont été effectivement transférées à toutes les communes pour assurer la prise en charge du cartable minimum, des fournitures spécifiques, la réhabilitation et la normalisation des écoles. Par ailleurs, Les montants des ressources à transférer aux communes sont aussi communiqués suffisamment à temps pour leur permettre de les prendre en compte lors de l’élaboration des budgets. En terme de bilan, cinquante un milliard quatre cent trente-sept millions six cent soixante-seize mille deux cent soixante-deux francs (51 437 676 262 FCFA) ont été transférés aux communes de 2009 à 2013.
Par contre, le transfert dans le domaine de la santé, de l’eau potable et l’assainissement restent encore timides. Dans les domaines de la culture, des sports et des loisirs, la situation n’a pas beaucoup évolué depuis la signature des protocoles par les communes.
En résumé, le montant des ressources financières transférées aux communes depuis 2009, s’élève à soixante-sept milliards trois soixante-quinze mille six cent cinquante-cinq (67 375 655 000) francs CFA, dont plus de 50 milliards pour l’éducation, 6,10 milliards pour la santé, 6 milliards 530 millions pour l’eau et l’assainissement. Il y a donc une évolution constante dans le transfert des ressources aux collectivités. En 2009, 3 milliards ont été transférés contre 10 milliards en 2010, 12 milliards 959 millions en 2011, 17 milliards 711 millions en 2012 et 22 milliards 871 millions de FCFA en 2013.
Les difficultés actuelles de la mise en œuvre du transfert des compétences et des ressources
Le transfert de ressources rencontre des difficultés majeures liées entre autres :
- à un manque de prévisibilité des montants à transférer : les montants définitifs à transférer aux collectivités territoriales sont arrêtés par l’adoption de la loi de finances en décembre alors que les collectivités territoriales ont besoin de ces données en octobre pour élaborer leur budget primitif
- à la multiplicité des acteurs intervenant dans le circuit de transfert de fonds et susceptible de rallonger les délais d’exécution
- les difficultés dans la passation et l’exécution des marchés, notamment le fait que des communes rurales ont du mal à supporter les couts liés au montage des marchés
- l’inadéquation entre les ressources transférées, les besoins et les charges inhérentes à la mise en œuvre du transfert sur le terrain.
Les perspectives en matière de transferts
En termes de perspectives, une stratégie nationale de renforcement des capacités des acteurs de la décentralisation a été élaborée. Cette stratégie dispose d’un plan d’action qui constitue un vaste programme en rapport avec l’ENAM, l’ENAREF et les instituions d’administration publique installées dans les régions. Ceux-ci vont œuvrer à renforcer les capacités des collectivités à prendre en charge les compétences transférées.
Aussi, il faudrait revaloriser les dotations pour les transferts et la relance des activités de la commission interministérielle de suivi de la mise en œuvre des transferts de compétences et de ressources.
A cela s’ajoute l’extension sectorielle des transferts de compétences et de ressources aux communes et l’extension géographique des transferts notamment aux régions et aux collectivités territoriales.
La décentralisation est un processus irréversible qui vise à long terme l’autonomisation des collectivités territoriales et l’objectif attendu est qu’elle serve de socle pour l’émergence du Burkina Faso.
Le Ministère de l’Aménagement du Territoire et de la Décentralisation