Nommé le 6 septembre dernier ambassadeur du Burkina Faso au Canada et auprès de l’Organisation de l’aviation civile internationale, Athanase Boudo devrait présenter ses lettres de créances le 20 novembre 2017. «Sankariste» convaincu, ce fils de Goundri, village de la commune de Boussé, dans la province du Kourwéogo, a pleinement conscience du poids de sa mission et tient à la réussir pleinement…
C’est avec humilité, mais aussi avec un grand sens du devoir qu’Athanase Boudo a accueilli sa nomination, le 6 septembre dernier, comme ambassadeur du Burkina Faso au Canada. A Ottawa, la capitale fédérale canadienne, le matricule 46 252 D de la Fonction publique burkinabè pilotera l’une des représentations diplomatiques les plus importantes du «pays des Hommes intègres», où il ambitionne d’impulser une nouvelle dynamique.
«J’ai accueilli cette nomination comme une mission que le président du Faso a bien voulu me confier pour que nous puissions travailler à répondre aux attentes du pays. Pour moi, il s’agit d’un poste de combat. Je mesure le privilège que m’accorde le chef de l’Etat en m’envoyant au Canada, un pays qui compte beaucoup pour le Burkina. J’ai compris qu’on attend beaucoup de moi et je suis déterminé à mener ce combat pour la réussite de mon pays», confie-t-il quelques jours avant son départ pour Ottawa.
Les pieds bien sur terre et la tête solidement calée sur ses épaules, le nouvel ambassadeur devrait donc travailler, bientôt, à fédérer davantage la communauté burkinabè qui a élu domicile au «pays de l’érable». Une communauté nombreuse, mais qui enregistre, avec seulement environ 3 000 inscrits, un faible taux d’immatriculation dans les registres consulaires. Si Athanase Boudo compte bien amener ses compatriotes vivant au Canada à s’identifier massivement, notamment dans la perspective du vote annoncé des Burkinabè de l’étranger à la prochaine élection présidentielle, il ne tient pas moins à développer au mieux les excellentes relations de coopération qu’entretiennent déjà les deux pays.
Des relations résolument étroites, puisque le Canada est le premier investisseur privé au Burkina. «En termes d’investissements directs des étrangers, le Canada vient en première position dans notre pays qui reste, de surcroît, le premier bénéficiaire des investissements directs canadiens au sein de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo, Ndlr)», précise Athanase Boudo.
Cependant, «en termes d’appui, le Burkina se situe en quatrième position, après le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Mali», regrette le nouveau diplomate qui espère tirer profit des excellentes perspectives qui s’offrent au Burkina depuis l’insurrection populaire d’octobre 2014 «qui a renforcé l’estime du Canada pour notre pays».
CONTINUITE ET RUPTURE
La voie est donc toute tracée pour Athanase Boudo qui, entre continuité et rupture, ambitionne de «sauvegarder les acquis, travailler à rassurer les investisseurs canadiens — fortement présents dans le secteur minier, dans l’éducation et l’environnement, entre autres —, et innover pour promouvoir d’autres débouchés». Le nouvel ambassadeur, qui représente également son pays à l’Organisation de l’aviation civile internationale (Oaci) dont le siège est à Montréal, s’engage déjà à «contribuer à l’enracinement de cette organisation du système des Nations unies pour le bénéfice du Burkina».
Le moins que l’on puisse dire, c’est que celui dont le trait caractéristique reste la patience, et qui a fait des «questions et de l’action politique orientées vers le bonheur du peuple» son occupation préférée, dispose de tous les ressorts pour réussir sa mission.
Titulaire à la fois d’un Diplôme d’études supérieures spécialisées en développement local et gestion des collectivités locales et territoriales de l’université de Ouagadougou et d’un diplôme d’inspecteur du trésor de l’Ecole nationale des régies financières (Enaref) de Ouagadougou obtenus simultanément en février et en mars 2009, le fils de feu Michel Boudo, décédé le 23 août 2014, tient beaucoup à la sincérité dans toutes ses relations personnelles et professionnelles.
Sa nomination à un poste diplomatique important résonne aujourd’hui en écho à l’ardent vœu de son défunt père de le voir dans les hautes sphères de l’administration et/ou de la vie publique de son pays. Trois ans après sa disparition, le vieux Michel Boudo — ancien serviteur, entre 1952 et 1957, de Naaba Liguidi, chef de Sao, village situé à 7 kilomètres de Boussé —, se réjouit sans aucun doute, de là où il se trouve à présent, de l’ascension sociale de son fils. Un fils ému, qui n’oublie pas ce père qui l’a beaucoup soutenu de son vivant, et qui, très attaché à sa culture moaga, lui a inculqué des valeurs d’intégrité et de combativité.
D’autant que celui qui était chargé d’études à la Direction générale du trésor et de la comptabilité publique depuis mai 2016 jusqu’à sa nomination, le 6 septembre dernier, comme ambassadeur du Burkina Faso au Canada, a également fait ses classes de combativité auprès de sa mère, Angèle Taonsa, une brave ménagère qui, du haut de ses 71 harmattans, continue d’entretenir son petit commerce de divers et de cultiver son lopin de terre.
Troisième d’une fratrie de sept enfants — six garçons et une seule fille, la benjamine, aujourd’hui âgée de 32 ans —, Athanase Boudo n’oublie pas les années de son enfance et de son adolescence où il aidait, pendant les vacances, sa combative maman dans la préparation et la commercialisation du riz-sauce destiné à la restauration de nombre de personnes.
CREUSET IDEAL
Ses activités culinaires ne l’ont pourtant pas écarté de ses choix et de sa passion pour les idées et le combat politiques. Soucieux d’amoindrir «la misère chez les braves populations burkinabè, notamment dans le monde paysan», celui qui déteste la traitrise mais qui rit tout naturellement de bon cœur, quand il le faut, a trouvé dans le «sankarisme» le creuset idéal pour développer sa vision.
L’ancien membre du comité central du Bloc socialiste burkinabè (BSB), qui a fait un bref passage à la Convention panafricaine sankariste (CPS), a ainsi finalement trouvé ses marques politiques au sein de l’Union pour la renaissance-Parti sankariste) dont il est l’un des membres fondateurs et où il occupe les fonctions de deuxième vice-président depuis février 2017. «Au regard de mon profil et de ma conviction politique pour l’engagement de l’Unir-PS aux côtés du chef de l’Etat, mon parti a applaudi cette nomination et estime que je saurai apporter ma contribution en vue des succès qu’est en droit d’attendre notre pays», témoigne Athanase Boudo.
En tout état de cause, ce fringant monsieur de 47 ans — il soufflera sa 48e bougie le 18 février 2018 — qui aime bien arborer le Faso dan fani national, économiste planificateur et inspecteur du trésor de son état, est décidé à s’appuyer sur les valeurs prônées par le «sankarisme» pour mener à bien sa mission au «pays de l’érable». La question du sankarisme est très exigeante, dit-il: «Je m’inscris dans cet engagement, le don de soi qu’exige cette posture. Je dois, en tant que sankariste, donner l’exemple. Je dois jouer ce rôle pour mériter la confiance de la majorité présidentielle à laquelle appartient mon parti, d’une part, et pour faire honneur aux véritables sankaristes, d’autre part.»
Une profession de foi qui vaut serment pour l’un des plus jeunes ambassadeurs actuellement appelés en mission, et surtout pour le seul sankariste, en ce moment, du casting diplomatique du Burkina à l’étranger. Précédemment député à l’Assemblée nationale, deuxième secrétaire de la commission des finances et du budget et membre du réseau des parlementaires pour la lutte contre la corruption, celui qui se désole de… «la désunion de la famille sankariste» capitalise assurément une somme d’expériences et un vécu politique dense pour relever le défi. En se rappelant le jour de la validation de son mandat de député, le 20 mai 2010, dont il affirme qu’il reste l’un de ses meilleurs souvenirs, Athanase Boudo est aussi, entre autres, un analyste et un consultant hors pair, formateur agréé de la Fondation Konrad Adenauer sur les techniques budgétaires.
PILIER SOLIDE
Mais l’homme, qui aurait aimé être astrophysicien s’il n’avait pas engagé un love collé-serré avec le monde de l’économie et de la finance, sait qu’il peut par ailleurs compter sur sa famille, qui constitue pour lui un pilier solide et un réconfortant repli. De son épouse, Brigitte Simporé, croisé un jour de 1996 à Tampouy et qui lui a tapé dans l’œil sans crier gare, il garde l’image d’une femme vertueuse et appliquée.
Et ne regrette nullement d’avoir convolé, le 8 janvier 2000 — «certainement le jour le plus beau de ma vie!» —, en justes et tendres noces avec cette originaire de Tanghin-Dassouri, institutrice certifiée de son état, qui lui a donné trois enfants, Elena, Gracias et Abraham.
Passionné de scrabble, Athanase Boudo se verrait bien en âne, un animal réputé «pour sa patience et sa fidélité à l’homme ainsi que pour son endurance». Et si jamais Dieu lui donnait une baguette magique pour changer quelque chose dans le monde tel qu’il fonctionne actuellement, alors, soyez-en certain, cet indécrottable croyant l’utiliserait pour… «faire en sorte que l’Afrique soit un seul pays et uni»!
En attendant ce jour improbable, et après avoir reçu, le 23 septembre dernier à Boussé, les bénédictions des siens pour réussir sa mission — son combat, dira-t-il —, le nouveau représentant du président du Faso au Canada se réjouit sans doute de pouvoir désormais partager, de temps en temps, le poulet avec son frère Elie Boudo, attaché de santé à Montréal depuis novembre 2012 et membre de l’ordre des infirmiers de Longueuil. Ils ont sans doute bien des choses à se raconter, même si les Technologies de l’information et de la communication ont aboli les barrières de la communication depuis belle lurette…