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Promotion de la solidarité au Burkina Faso: A la recherche du meilleur attelage culture-citoyenneté
Publié le jeudi 16 novembre 2017  |  Sidwaya




Les festivités du 57e anniversaire de l’indépendance du Burkina Faso se dérouleront le 11 décembre 2017 à Gaoua, chef-lieu de la région du Sud-Ouest sur le thème : « Diversité culturelle, citoyenneté responsable pour un Burkina Faso solidaire et harmonieux ». Quel intérêt revêt un tel thème pour le Burkina Faso dans son contexte actuel? Analyse !

Cette année, les projecteurs seront braqués sur la ville de Gaoua, capitale de la région du Sud-Ouest du Burkina Faso, à l’occasion de la célébration de la fête de l’Indépendance. Pour ce 57e anniversaire de l’accession à la souveraineté nationale du pays des Hommes intègres, les activités s’articuleront autour du thème : « Diversité culturelle, citoyenneté responsable pour un Burkina Faso solidaire et harmonieux ». Un thème évocateur, quand on mesure le rôle que la culture, dans ses multiples facettes et la citoyenneté peuvent jouer dans la coexistence pacifique des peuples. En termes culturels, dans la multitude d’expressions que l’on a au Burkina Faso, une des pratiques les plus ancrées dans les mœurs reste, sans doute, la parenté à plaisanterie. Un jeu social typiquement ouest-africain qui autorise et parfois même oblige des membres d’une même famille (tels que des cousins éloignés) ou de certaines ethnies, entre elles, à se moquer ou s’insulter, sans conséquence. Ces «affrontements» verbaux, loin d’être des actions de tension, sont en réalité des moyens de décrispation sociale. Ils existent par exemple entre le Moaga et le Samo, le Bissa et le Gourounsi, le Dagara et le Gouin, le Bobo et le Peulh, etc. Grâce à la parenté à plaisanterie, toute crise née entre deux clans ou deux personnes alliés se résout, le plus souvent, à l’amiable. C’est ainsi que Alain Joseph Sissao, chercheur en sciences des sociétés, dans son ouvrage intitulé : « Alliances et parentés à plaisanterie au Burkina Faso. Mécanisme de fonctionnement et avenir », soutient que la stabilité sociale du Burkina Faso doit « moins à l’action politique qu’à la force d’institutions traditionnelles comme la parenté et l’alliance à plaisanterie », garantes de paix sociale et véritable « privilège historique ». Le Pr Albert Ouédraogo, cité dans un article publié dans le quotidien Sidwaya en février 2010, renchérit que la parenté à plaisanterie a permis au Burkina Faso d’échapper à une crise lors du soulèvement populaire de 1966. « Un Mossi allait perdre le pouvoir sur un espace majoritairement moaga. Et qui l’a remplacé ? C’est un San, Sangoulé Lamizana, un parent à plaisanterie. De façon inconsciente, la parenté a apaisé les esprits sans que les gens ne s’en rendent compte», explique-t-il.
Le Burkina Faso se distingue, en outre, par une cohabitation parfaite entre les trois religions les plus pratiquées, à savoir le christianisme, l’islam et l’animisme. Une étude de 1991 montre, en effet, que les Burkinabè étaient à cette époque, à 25,9 % animistes, 52,4% musulmans et 20,7 % chrétiens. C’est également une preuve de l’acceptation de l’autre avec ses différences, ses qualités, ses défauts et ses convictions.


Quid du forgeron et du griot ?


En plus de ces relations intercommunautaires particulières, certaines personnes, par leur origine, sont des acteurs de résolution pacifique de crises. Il s’agit notamment du forgeron et du griot. Sur le plan social, le forgeron est un homme de paix, un intercesseur. Sa neutralité politique et son pouvoir mythique lui valent d’être objectif et de recommander l’entente. Il est reconnu pour son rôle de médiateur dans les conflits. Son intervention volontaire, où à la demande d’une tierce personne, en cas de guerre ou de querelles graves de familles, est considérée comme sacrée et en ce sens ne doit pas être refusée. Au-delà de leurs fonctions séparées, le forgeron et le griot ont des rôles parfois identiques. C’est pourquoi, dans certaines localités, l’un peut représenter l’autre en cas d’absence. La solidarité est, par ailleurs, enseignée dans d’autres circonstances telles que lors des rites initiatiques. En outre, à l’occasion des réjouissances populaires, des funérailles, des baptêmes ou pendant les naissances, dans la capitale comme dans les contrées les plus reculées, les familles se rendent mutuellement visite, se soutiennent sans distinction de religion ni d’appartenance sociale. Chrétiens, musulmans, animistes, pauvres et riches se mettent ensemble, le temps de l’évènement. De même, au village, depuis la nuit des temps, pour le labour de leurs champs ou pour les récoltes, les paysans ont l’habitude de s’entraider. Cela se fait à l’initiative du clan ou sur demande du bénéficiaire lui-même. Autant d’exemples qui montrent à souhait que la culture occupe une place de choix dans le renforcement de la solidarité au sein des communautés.
Cependant ces richesses culturelles ne peuvent pleinement profiter au pays si les règles de vie en société sont mises à mal par certains fléaux comme l’incivisme qui, depuis 2014, a pignon sur rue au Burkina Faso. Cela n’est pas possible non plus si le vivre-ensemble et la tolérance ne sont pas au cœur des comportements des Burkinabè. En effet, depuis l’insurrection populaire de 2014, les actes d’incivisme sont monnaie courante. Des élèves qui agressent physiquement leurs enseignants, des usagers qui fauchent mortellement des agents de police ou qui ne respectent pas le code de la route, des populations qui détruisent des biens publics et privés en cas de manifestations, des citoyens qui contournent les services des impôts pour se faire de grandes marges bénéficiaires. Ce sont là les cas les plus fréquents. D’ailleurs, face à ce constat amer, le gouvernement a pris des mesures qui se veulent palliatives, mais qui n’ont pas encore montré leur efficacité. Dans les services publics, par exemple, la montée et la descente des couleurs nationales ont été instaurées, les conseils de discipline dynamisés, la lutte contre la corruption et l’impunité intensifiée. En milieu scolaire, il a été préconisé la traduction systématique devant les instances compétentes de tout apprenant qui porte atteinte aux symboles de la Nation, à l’intégrité physique d’un enseignant ou d’un responsable administratif scolaire. Par ailleurs, l’interdiction de toute manifestation publique présentant des risques de commission d’actes de violence ou de destruction de biens publics et privés, etc., vise à éviter les situations déplorables connues dans un passé récent au Burkina Faso. Pour les cas d’incivisme économique et fiscal, il y a le renforcement de la lutte contre la fraude fiscale, l’importation des marchandises contrefaites, le non-respect de la libre circulation.


De l’importance de la célébration tournante


En outre, de nouvelles initiatives continuent de voir le jour. Parmi elles, la semaine scolaire d’éducation à la citoyenneté dont la première édition s’est déroulée, du 24 au 28 octobre 2016 avec au programme, des conférences-débats, des panels, des débats télévisés et des formations au profit des enseignants. L’édition 2017 a eu lieu, du 23 au 29 octobre, sur le thème : « Les élèves comme principaux acteurs du civisme : comment y parvenir ? ».
L’on perçoit donc que le thème du 57e anniversaire de l’indépendance cadre avec l’actualité au pays des Hommes intègres. Cependant, au-delà de la célébration de l’anniversaire de l’indépendance, nombreux sont ceux-là qui continuent de se questionner sur l’intérêt de sa rotation dans les chefs-lieux de région. Qu’à cela ne tienne, l’on retient qu’en 2008, lorsque le gouvernement adoptait la célébration annuelle tournante, en commençant par Fada N’Gourma, dans la région de l’Est, son objectif était d’offrir l’occasion aux villes secondaires d’obtenir des infrastructures socioéconomiques, afin de les aider à booster leur développement. Ce qui a permis effectivement aux villes-hôtes de bénéficier de plusieurs infrastructures. En ce qui concerne les réalisations traditionnelles, l’on peut évoquer les cités des régions, les stades, les « auberges du 11-Décembre », les aérodromes, le bitumage de rues, les « pied-à-terre » du président du Faso, les salles polyvalentes. A cela s’ajoute la réfection de places publiques dites Places de l’unité et d’autres constructions faites par des particuliers. Il est donc clair que même s’il faut réorienter les constructions sur la base des leçons tirées de l’exploitation et de l’entretien des infrastructures réalisées dans les premières régions-hôtes, l’idée semble profiter aux populations accueillant la fête du 11-Décembre.
Déjà, huit régions sur les 13 ont été servies. Pour celles qui restent, après le Sud-Ouest cette année, ce sera le tour du Centre-Sud (Manga) en 2018, du Centre-Est (Tenkodogo) en 2019, des Cascades (Banfora) en 2020 et du Plateau central (Ziniaré) en 2021 pour boucler la boucle.


Daniel ZONGO
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