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Fada N’Gourma: L’ère des salariées et femmes mariées prostituées
Publié le mercredi 8 novembre 2017  |  Sidwaya




Le plus vieux métier du monde tourne à plein régime à Fada N’Gourma, chef-lieu de la région de l’Est. Le commerce du charme suscite si bien de convoitises que les travailleuses du sexe parlent ouvertement de concurrence déloyale de la part des filles du terroir, des femmes mariées et des salariées. Immersion dans le royaume de la libido où, l’argent et les envies n’ont pas de limite…

Fada N’Gourma, capitale de la région de l’Est. Le soleil se couche en ce mois de juillet sur cette ville, relativement paisible. Derrière ce calme apparent, la cité de Yendabli, s’est muée en un « sanctuaire » de prostitution où l’offre et la demande du sexe s’équilibrent. Longtemps considérée comme la chasse gardée des filles venues de pays voisins, la floraison du marché a fini par aiguiser des appétits chez de nombreuses filles du « Pays des Hommes intègres ». Dans ce jeu de jambes en l’air où l’argent coule à flots, les filles du terroir, certaines femmes au foyer où salariées, entendent bien tirer leur part du « dividende de la libido», fait remarquer un officier de police. Elles sont 102 filles âgées de 19 et 46 ans à vendre leur charme dans la cité de Yendabli, selon les services de la sûreté de la police des mœurs. Parmi ces commerçantes du charme, on retrouve 26 Burkinabè, 71 Togolaises, 3 Ghanéennes, une Malienne et une Sénégalaise officiellement fichées. Très loin de la vérité des chiffres, le phénomène est plus pernicieux. Derrière ces données policières, se cachent des filles, des salariées et des femmes mariées qui se disputent âprement le juteux marché du sexe.


La livraison à domicile

Le plus vieux métier du monde dans la cité de Yendabli n’est plus l’apanage des seules filles de bars et des professionnelles du sexe. Les jeunes filles du terroir, conscientes des sommes importantes en circulation dans le commerce du corps, sont entrées de plain- pied dans la danse. « Les brigades mobiles », Bagdad, « Livraison à domicile » ou encore
5+6--« Les rasoirs » sont autant d’appellations colées à ces filles qui tirent leur épingle du jeu dans la vente de leur charme. « Tu veux les connaître (…...) ? Elles sont uniques, charmantes et…dangereuses. Certains ont perdu le contrôle de leurs enfants», confie ce jeune fonctionnaire qui ajoute que ces filles sont en passe de battre les travailleuses professionnelles du sexe. Dans un entretien en aparté, avec celle qui revendique la chefferie de « La brigade mobile », quid sur la légèreté des mots. La jeune fille au physique resplendissant assorti d’une poitrine dont les rondeurs retiennent forcément le regard, revendique au moins 18 filles à sa solde, prêtes à se livrer à tous frais. « Rejoindre une chambre pour une partie de plaisir pour de l’argent n’a rien de mal. C’est mon corps. C’est ma jeunesse. Il y a un temps pour toute chose et il faut savoir en tirer le meilleur profit pendant la fleur de l’âge », révèle-t-elle, après une gorgée de bière. Dans un autre registre, A.P. en fin de cycle dans une école de formation soutient avec subtilité qu’un homme doit laisser les plumes après le passage d’une femme dans son lit. Après un jeu de cache-cache pendant plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous, la jeune fille à la peau ridée et brulée par endroit, sans doute du fait des effets de la dépigmentation est sans scrupule. « Ce sont les jeunes et pauvres fonctionnaires comme vous autres qui gâtez le nom des filles. Donner 50.000 ou 100.000 F CFA à une fille pour les bons moments passés fait quoi ? », dit-elle avant de poursuivre. « Depuis des mois, tu cherches à me rencontrer par rapport à ton sujet. Même si on se vend, on ne le fait pas avec n’importe qui. N’importe qui, ne me b…pas». Elle revient à la charge en signifiant que, leurs clients sont des « gourous » locaux ou des missionnaires adeptes des nuits chaudes. Elle mentionne en outre que certains fidèles clients viennent des pays voisins, ayant érigé Fada N’Gourma en leur « lieu de repos ». « Je suis majeure et je sais ce que je fais. Je sais que je dois me protéger. La vie n’a pas de prix. Tous ceux qui parlent, s’ils me gagnent, ils me déshabilleront. On se connaît à Fada-N’Gourma…», relève notre interlocutrice, dont la peau rougie laisse entrevoir ses veines. Pour D.C cette autre fille, ce comportement des filles n’est plus caché dans la cité de Diaba Lompo. La jeune fille aux attrayantes lippues (lèvres) couvrant une dentition d’une blancheur remarquable campe sur une posture défensive : « Tu vois, je suis jeune et charmante. Les hommes ne voyagent pas en laissant leur sexe à la maison. Donc celui qui paie, la suite est connue. J’ai tenté de savoir un peu sur toi. J’ai eu 2 versions. Mais je ne souhaite plus que tu me parles de ce sujet. Je suis venue te voir pour avoir la paix », conclu-t-elle, la mine grave.


« Ne me parle plus jamais de mon salaire »


Dans cette ruée vers l’argent du sexe, des femmes mariées et des femmes salariées entendent également, tirer le dividende de cette manne. Dans un document circonstancié, une source sécuritaire de première main souligne avec insistance que des femmes de foyers se prostituent. Pour cette source, elles se retrouvent en noctambule avec leur « cœur » à la belle étoile. La même source souligne avec inquiétude que les écoles de formation notamment celles de la santé et des enseignants, sont devenues des sanctuaires de la haute prostitution. La course vers l’argent des jambes en l’air a envahi aussi les salariées qui développent des initiatives pernicieuses pour se remplir les poches.
« En plus de la multitude de partenaires, elles sont aussi dans le commerce de leur charme », confie un homme de loi, appuyé par un jeune opérateur économique. A la question de savoir pourquoi étant fonctionnaire, elle s’adonne aux prix de l’argent, P.G, la jeune fille adopte une attitude agressive. « Mon sexe m’appartient et j’en fais ce que je veux. Tu penses que je suis seule à le faire? Fouille bien dans Fada et ses environs, tu seras étonné. », crie - t - elle, avant de poursuivre d’un ton menaçant : « ne me parle plus jamais de mon salaire. Et puis, ne me compares pas aux travailleuses du sexe. Si c’est ton coca je te le rembourse…». L’atmosphère revenue à la normale, la jeune fonctionnaire confie sans détailler et la main sur le cœur, que ce sont les hommes qui ont rendu l’amour payant à Fada N’Gourma. Avant de partir, elle lâche : « n’oublie pas d’écrire que certains de vos responsables régionaux ne sont pas des exemples. Pire, ils couchent avec les mêmes filles. Va moraliser les acheteurs, car les filles n’y vont pas par amour, mais pour repartir avec quelques billets de banque». Silence. Avec les femmes mariées, la pratique plus sournoise tourne souvent au cauchemar. Un opérateur économique exerçant dans le Bâtiment et travaux publics (BTP), soutient que le cas des femmes mariées est
devenue un secret de Polichinelle. « Les femmes au foyer ayant leur mari à Fada N’Gourma ou non, se livrent en plein air dans les espaces libres. Les chambres de passe sont risquées pour elles », relève un homme de tenue. Il est 2 heures du matin courant juillet 2017. Au bout du fil, la voix d’une source sanitaire murmure :
« J’ai eu un cas pour toi ». Presqu’en direct, l’agent de santé, oblige la femme
mariée de dire pourquoi elle a voulu avorter. « Si tu ne parles pas, je vais te référer aux terribles sages-femmes du CHR et elles vont bien te traumatiser. Tu as déjà entendu parler d’elles ? ». D’une voix à peine audible, elle confie ne pas connaître l’auteur de sa grossesse, car ayant des partenaires multiples. Les cris de douleur et de lamentation au bout du fil ont fini par abasourdir le journaliste qui, n’a eu de choix que de couper l’appel. « Elle est venue me voir pour un avortement car la grossesse est problématique et j’ai refusé. Elle est partie le faire à la maison et ça mal tourné », confie notre source.


Les IST ont changé de camp ?


La « victoire » des Travailleuses du sexe (TS) et les filles de bar sur les infections sexuellement transmissibles (IST) est-elle amorcée ? Ces professionnelles exposées aux risques ont cultivé des habitudes de précautions à mettre à l’honneur du Conseil national de lutte contre le sida et les IST (SP/CNLS) et ses partenaires qui mènent le combat depuis plusieurs décennies. « La vie n’a pas de prix. Le préservatif, on ne badine pas sur cette question », explique la (TS), M.S.

Pour l’agent de santé, Rosalie Lompo, chez les TS, on assiste depuis quelques temps à une baisse significative des cas d’IST. « Elles font l’objet de suivi régulier. Les tests sérologiques et gynécologiques sont devenus leur habitude. Elles viennent d’elles-mêmes et cela est encourageant », soutient l’agent de santé. A l’inverse, les professionnels de la santé tirent la sonnette d’alarme et ne cachent plus leur inquiétude sur la santé sexuelle des jeunes filles. « Au niveau des filles, on assiste à une recrudescence des IST et de diverses infections et cela est inquiétant. Elles ne viennent jamais pour avoir des conseils pratiques », soutient la sage-femme, Jacqueline Maïga. « Quand elles se présentent, c’est pour dire, madame, je gratte, je gratte du sexe. Nous avons déjà reçu 16 consultations pour des cas d’infection en un laps de temps », s’alarme une autre infirmière.


Se vendre, rapporte gros à Fada N’Gourma


Les Travailleuses du sexe(TS) et les filles de bar sont unanimes sur la question. Vendre son corps dans la cité de Yendabli rapporte vraiment gros. A en croire, une note des services de sécurité, consultée par Sidwaya, une TS gagne entre 100.000 à 300.000 F CFA à Fada N’Gourma par mois. Mais en réalité, ces chiffres de la police sont caducs et loin de la réalité, souligne un gérant d’une boutique de transfert d’argent. Quelques séances nocturnes de constat permettent de savoir que ces commerçantes de la bonne chair, apprennent à sécuriser le fruit de leur « labeur ». «Tu vois T.F en train d’arriver, elle a déjà fait des transferts de plus de 500.000 F CFA. Une autre ressortissante de la région du Nord viendra d’ici minuit, faire un dépôt d’au moins 20.000 F. Elle le fait toutes les nuits pour sécuriser ses avoirs. », confie notre complice d’une soirée. Accostée après son transfert, la cliente T.N, la forme généreuse et le regard braqué, souligne qu’« il n’ y a plus de différence entre une qui fait le travail (se vendre) et les autres filles. La seule différence peut-être, c’est que nous avons un suivi sanitaire. Sinon les filles de la ville font la même chose que nous ». Selon les services de police, le plus vieux métier du monde s’exerce à des endroits bien connus à Fada N’Gourma, mais aussi dans les bars avec les serveuses. A cela, il faut ajouter, « nos sœurs qui sont rentrées dans la danse à
visage découvert », ajoute un sous-officier de gendarmerie. Dans la cité de Yendabli précise le commissaire central de police de la ville, Doro Yaro, on dénombre plus de 4 endroits où s’exerce ce commerce assez particulier. En ces lieux, poursuit le commissaire de police, les femmes y sont dans leurs cases ou leurs maisonnettes avec des équipements de fortune en attente de leurs clients. « Il y a Ghana Light, La Forêt, Lapouguini 1 et 2 et le Jardin », souligne le rapport de police dont nous avons obtenu copie. Au cours d’une entrevue avec une quarantaine de travailleuses du sexe à leur lieu de travail, les débats ont viré à un véritable réquisitoire à l’encontre des filles dans les familles. « Elles se vendent comme nous. Elles le font et ce n’est pas normal. Alors qu’elles ne font pas de suivi sérologique », clame l’une d’elles.


Moussa CONGO
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