Que faire finalement de ce machin ? A l’origine, il s’agissait d’une lumineuse idée, voire généreuse, puisque tout le monde appelait à la mutualisation des moyens.
Une petite bouteille jetée à la mer dans ce vaste océan de terrorisme qu’est devenu le Sahel. Une fiole porteuse de beaucoup d’espoir qui, hélas, se trouve aujourd’hui au milieu du gué.
Impossible de faire machine arrière et tout aussi difficile de continuer ; en effet, malgré les différentes rencontres et les sommets, qui s’apparentaient à autant de conseils de guerre, vu le ton martial toujours de circonstance, malgré l’inauguration en grande pompe du quartier général de Sévaré et le plaidoyer proclamé urbi et orbi depuis le siège des Nations unies par les 5 Etats directement concernés emmenés par le Malien Ibrahim Boubacar Keita, la force commune du G5 Sahel demeure ce tigre en papier loin donc d’inquiéter les nombreux sous-traitants locaux de la multinationale du terrorisme.
Que faire donc de cette « task force » sahélienne dont on attend toujours les premières opérations, qui étaient pourtant censées débuter en ce mois d’octobre… toujours sur le papier ?
C’est principalement à cette question que devront répondre les ambassadeurs des 15 membres permanents et non permanents du Conseil de sécurité qui ont entamé hier à Bamako un petit périple qui les conduira ensuite à Ouagadougou, puis à Nouakchott pour prendre le pouls de la situation et ce, dans la perspective d’une réunion qui doit se tenir le 30 courant à New York.
Avaient-ils vraiment besoin de venir in situ tâter la réalité du terrain, puisque 48 heures seulement avant le déplacement des missi dominici onusiens, leur patron, Antonio Guterres, avait dépeint un tableau plutôt sombre de l’état des lieux ? Tout ou presque fait défaut : du simple paquetage militaire aux moyens de communication et de renseignement en passant par les gilets pare-balles. En réalité, tout cela tient en cinq petits mots : le nerf de la guerre.
La caisse de la force commune est en effet désespérément vide, car si les 5 pays membres doivent chacun consentir à y verser 10 millions d’euros de leurs maigres ressources, si la France a décidé d’avancer 8 millions d’euros, et si l’Union européenne doit casquer 50 millions d’euros, il manquera encore les trois quarts des 450 millions nécessaires à la mise en route de cette machine poussive avant même d’avoir démarré.
C’est pour cette raison que les Etats-Unis ont, en juin, décidé de ne pas inscrire le G5 Sahel sous le fameux chapitre 7 de la charte des Nations unies qui permet au Conseil de constater « l’existence d’une menace contre la paix, d’une rupture de la paix ou d’un acte d’agression » et de faire des recommandations ou de recourir à des mesures militaires ou non « pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales » tout en réglant les problèmes liés à son financement.
La thérapie du chapitre 7 ayant lamentablement échoué, d’autres traitements seront donc étudiés par les 15 médecins urgentistes appelés au chevet du nouveau-né en détresse respiratoire aiguë et dont le pronostic vital est engagé. Deux protocoles sont sur la table : le remède de cheval qui consiste à voter un mandat vigoureux et à créer un bureau des Nations unies en soutien au G5 Sahel ou les soins palliatifs administrés sous forme de simple soutien logistique à la MINUSMA. Reste à savoir quelle potion sera magique…
H. Marie Ouédraogo