Pas de répit au sein de la structure faitière du football burkinabè. Outre la correspondance envoyée à la FIFA pour le match à rejouer Afrique du sud- Sénégal, l’affaire Bryan Dabo est aussi un dossier que gère la Fédération Burkinabè de Football (FBF). Dans l’entretien, son président le colonel Sita Sangaré répond. Il a aussi évoqué le cas Tobias Sana qui a avoué n’avoir jamais été approché par les autorités du football burkinabè en vue de le pousser à porter les couleurs du Burkina Faso.
La Fédération Burkinabè de Football (FBF) a saisi la FIFA par rapport au match à rejouer entre l’Afrique du sud et le Sénégal. Est-ce une simple formalité ?
C’est vrai que j’ai entendu avec amusement certains dire que c’est juste une formalité. Je peux vous assurer que c’est loin d’être cela. Notre démarche a été mûrement réfléchie. Elle se fonde sur plusieurs paramètres. Et les chances sont élevées. Si le droit doit être vraiment dit, notre démarche ne peut qu’aboutir. Nul ne dit qu’un match ne peut pas être rejoué, mais, il y a des textes qui cadrent la matière et nous les avons tous regardé. Justement il se trouve qu’aucun de ces textes dans la situation que nous vivons ne donne le droit au bureau des qualifications de faire rejouer le match. Nous disons donc qu’il y a ce qu’on appelle en droit une incompétence de la structure qui a rendu la décision de faire rejouer le match. Selon les textes de la FIFA, le bureau des qualifications, n’est habilité à faire rejouer un match que dans deux cas. Le premier cas, c’est si le match ne s’est pas du tout joué. Deuxième cas, c’est si le match a commencé et a été interrompu soit par un cas de force majeur, soit par le fait d’une association nationale. Voilà les deux seuls cas où le bureau de qualification est habilité à faire rejouer un match. En réalité, la FIFA devrait nous remercier pour avoir introduit ce recours qui nous permettrait de sauvegarder les fondamentaux de la FIFA. Voyez-vous, le match s’est joué il y a près d’une année. Lorsque la FIFA a rendu sa première décision, c’était juste la radiation de l’arbitre. Elle n’est pas allée plus loin. Il a fallu que l’arbitre qui s’oppose à sa sanction saisisse le Tribunal Arbitral des Sports (TAS). C’est ainsi que le TAS a confirmé la décision. La FIFA est revenue pour dire qu’elle s’appuie sur la décision du TAS pour faire rejouer le match. Ça ne paraît même pas très sérieux de la part d’une organisation aussi sérieuse que la FIFA. Si la FIFA devait faire répéter ce match, c’était le moment où elle a constaté l’infraction. Ça aurait été compréhensible. Nulle part, le TAS n’a dit en confirmant la décision de la FIFA qu’il fallait répéter le match. Le TAS s’est juste contenté de dire que la décision de radiation de l’arbitre prise par la FIFA était une décision qui lui paraissait juste. Vous n’allez pas venir en second recours pour aggraver les choses. C’est là que nous avions dit qu’en prenant cette décision, ça lèse les autres équipes du groupe dont le Burkina Faso. Je vous dis que la décision est très bizarre. Le match s’est joué en novembre 2016. La décision de le faire répéter s’est prise curieusement au lendemain de la double confrontation Burkina Faso-Sénégal. Les résultats de cette double confrontation mettent le Sénégal en mauvaise posture, parce que le Sénégal pour certains était le favoris de notre groupe. Cela parait déjà curieux. Ensuite, on se serait entendu à ce que si même toutes les conditions étaient réunies pour que ce match soit rejoué, qu’on le fasse immédiatement. Dans un système de championnat comme les éliminatoires de la Coupe du monde, en réalité les équipes jouent en fonctions des résultats passés et à venir. Pour ne pas fausser les calculs, la FIFA aurait été inspirée de faire rejouer ce match dans la fenêtre du mois d’octobre, c’est-à-dire avant notre match face à l’Afrique du sud. C’est vraiment pour ces raisons de droit et d’opportunités que la Fédération Burkinabè de Football ne pouvait pas rester silencieuse. Je dois dire que la FIFA elle-même reconnait le TAS et se soumet à ces décisions. Ce qui veut dire que notre recours est plus que normal. Ceux qui pensent que c’est un recours de forme doivent réviser leur position.
Tobias Sana a avoué lors d’une interview parue dans nos colonnes n’avoir jamais été approché par les autorités du football burkinabè pour rejoindre les Etalons. Vous confirmez ?
Quand le jeune Tobias a commencé à être vraiment connu, c’est peut-être avant que nous ne soyons à la Fédération. Arrivés à la Fédération, nous avons trouvé Tobias qui jouait à l’Ajax d’Amsterdam. Ses prestations bien entendues ont attiré notre attention. C’est ainsi que nous sommes entrés en contact avec le joueur. Nous l’avions contacté par l’intermédiaire d’un de ses parents qui réside à Pouytenga qui était vraiment très enthousiaste. A plusieurs reprises, nous avons eu des contacts téléphoniques avec Tobias. Même avec son père, nous avons eu des contacts. Par l’entremise du président du Faso de l’époque, nous avons même fait venir Tobias Sana ici. A mon humble avis, Tobias s’est peut être rendu compte qu’il a fait une erreur. Sinon, l’intérêt du Burkina Faso était très manifeste vis-à-vis de lui. Il se trouve que sa maman est suédoise. Je pense que le jeune a plutôt été sensible à la demande de sa maman. On ne peut pas le lui reprocher. C’est un choix. Il a opté à l’époque de jouer avec la Suède. Il a même joué un match avec elle. Ce ne pas bien de revenir pour accuser. Tobias doit assumer simplement les conséquences du choix qu’il a eu à faire. Que ces conséquences soient bonnes ou mauvaises pour lui, nous ne pouvons en être tenus comptables. Nous le regrettons parce que nous voulions vraiment l’enrôler dans notre équipe nationale. Parce que nous pensions que les Burkinabè d’ici et d’ailleurs peuvent apporter leurs concours pour faire rayonner le Burkina Faso partout. Quoi qu’ils soient, nous voulons rentrer en contact avec eux. C’est une fierté de défendre les couleurs nationales.
Il a déclaré qu’il peut toujours jouer avec le Burkina Faso ?
(Rires) Là franchement, je pense qu’un match amical est considéré comme officiel. C’est pour cela je disais tantôt qu’il doit assumer les conséquences de sa décision. Je vous assure que pour ce jeune, nous avons fait le forcing auprès de lui. Je n’en éprouve aucune amertume. Je me suis dit que c’est un Burkinabè et qu’il peut aider la mère patrie. Force est de reconnaitre qu’il pouvait opter pour la nationalité de sa maman. C’est un choix que personne ne peut contester. Maintenant, c’est malheureux, parce que je constate qu’après avoir joué ce match, il n’a plus joué d’autres matches.
Quels étaient les principaux objectifs de votre dernière tournée en Europe ?
Monsieur le ministre des Sport et des Loisirs et moi-même sommes allés à Lyon où nous avions vu Bertrand Traoré pour lui prodiguer tous nos encouragements. Vous savez qu’il nous reste deux matches capitaux pour une éventuelle qualification à la phase finale de la coupe du monde. C’est parce qu’actuellement pour diverses raisons, on ne pouvait pas tourner afin d’aller voir les principaux cadres de l’équipe, sinon, cela était tout à fait normal. Nous l’envisageons pour plus tard. Avec la situation actuelle, celle de faire rejouer le match entre l’Afrique du sud et le Sénégal, il est bon d’approcher les principaux cadres pour leur demander de rester concentrés sur leurs matchs. De ne pas du tout intégrer cette donne dans leur esprit. Nous avons eu l’occasion d’échanger avec certains joueurs mais se déplacer pour les voir est encore plus fort. D’autant plus que vous pouvez aisément l’imaginer, un joueur dans un club, s’il reçoit la visite de ses dirigeants, conforte sa position au niveau du club. Ça lui donne plus de respectabilité aux yeux de ses dirigeants. Nous avons eu de très bons entretiens avec Bertrand Traoré. Nous avons aussi continué pour voir Bryan Dabo, qui, depuis un certain temps, est dans nos petits papiers. Nous avons eu plusieurs échanges avec le joueur et sa famille. Il était bon que nous repartions encore vers lui. Il nous reste deux journées pour une éventuelle qualification à la Coupe du monde. Il est important déjà que nous essayons d’anticiper pour avoir des forces supplémentaires en même de renforcer le groupe. Cela en parfaite accord avec l’encadrement technique de notre équipe nationale.
Ça promet pour Bryan Dabo ?
Depuis le début, il a toujours été réceptif. Le joueur n’a pas de problème particulier. Cette fois encore, tout comme le jeune Tobias, Bryan, lui surtout peut avoir une triple nationalité. Il a son père qui est burkinabè, sa mère est de nationalité malienne, lui-même étant né en France. Ne serait que ces trois nationalités, il peut les avoir. Pour les jeunes joueurs, nous essayons de les comprendre. Ils sont souvent tiraillés entre leur carrière en club et leur désir de porter les couleurs de leur pays d’origine. Encore comme je le disais pour Tobias, nous devons respecter les choix de Bryan. Mais enfin, Bryan Dabo est dans un état d’esprit très positif pour nous renforcer dans un futur que j’espère très proche.
Entretien réalisé par Yves OUEDRAOGO