Dans le cadre des deuxièmes journées parlementaires du CDP, tenues à Ziniaré, nous avons rencontré le maire de la localité, Pascal Compaoré, le 20 septembre 2017. Entre autres sujets abordés, les 113 parcelles de Blaise Compaoré, le statut de la résidence présidentielle et du parc animalier, l’après-Blaise à Ziniaré. Sur le premier sujet, relatif à l’enquête parlementaire sur le foncier urbain, le maire est affirmatif : « Oui, Blaise a effectivement 113 parcelles à Ziniaré ».
Sous le régime de Blaise Compaoré, Ziniaré était considérée comme la deuxième capitale du Burkina Faso. Depuis, la ville est redevenue ‘’normale’’. Comment vivez-vous ce retour à la normalité ?
C’est vous qui le dites. Sinon la deuxième capitale, c’est Bobo-Dioulasso. Quand Blaise était président, Ziniaré n’a jamais été la deuxième capitale. Je ne vois pas ce qui fait la spécificité de cette localité par rapport aux autres. Elle a toujours été une ville comme les autres. Le Ziniaré du temps de Blaise et celui de maintenant sont les mêmes. Cela dit, il y a eu beaucoup plus de regrets ici après son départ parce que c’est un fils de la localité.
Ce qui était jadis le Yamoussoukro du Burkina a-t-il subi les effets collatéraux de la perte du pouvoir par son enfant terrible ?
Quels effets collatéraux ? Rien n’a changé. Ziniaré est toujours le même.
Vous sentez-vous néanmoins aujourd’hui orphelin de Blaise Compaoré ?
Naturellement ! Comme tout le Burkina Faso d’ailleurs. Voyez vous-même : il y a des voix qui s’élèvent aujourd’hui pour demander le retour de Blaise. Beaucoup regrettent son départ. C’est un des fils de Ziniaré et il n’y a pas de raison que nous ne regrettions pas son départ.
Sous le régime des Compaoré, pendant les élections, Ziniaré était presque interdit aux opposants. Quels rapports entretenez-vous avec l’opposition communale ?
Pendant le régime de Blaise Compaoré, il y a eu des opposants qui sont venus battre campagne ici à Ziniaré. Ils ont tenu des meetings sans en être empêchés. Le conseil communal fonctionne bien. Je travaille en parfaite collaboration avec les élus du parti majoritaire.
Avant, tous les « gourous » (ministres, DG…) se sentaient presque obligés d’avoir un intérêt socio-économique quelconque à Ziniaré. Tout ce beau monde a-t-il déserté ce patelin maintenant que vous n’êtes plus aux affaires ?
Il faut leur poser la question parce que je ne faisais pas partie de ces « gourous ». Je ne peux donc pas vous dire s’ils sont toujours là ou pas. En tout cas ceux qui étaient là et travaillaient au développement de la commune y sont toujours.
On a souvent polémiqué sur le statut de la résidence présidentielle et du parc animalier de Ziniaré. Quel est au juste leur statut ?
J’ai vu sur les réseaux sociaux et dans la presse tout ce qui se dit. Mais rares sont ceux qui sont venus à la source. Sinon la résidence et le parc appartiennent au président Blaise Compaoré.
En vertu de quels documents cadastraux ?
Si vous en avez l’occasion, posez la question à Blaise.
Comment se portent aujourd’hui les occupants, s’il y en a encore, du parc ?
Le parc se porte bien. Il y a toujours des animaux, même si ce ne sont plus les mêmes quantité et qualité. Il y a des gens qui y travaillent. Mais je reconnais qu’il y a des difficultés.
L’enquête parlementaire sur le foncier urbain relevait que Blaise s’était octroyé 113 parcelles dans la commune de Ziniaré et son frère François 22. Qu’en est-il exactement ?
L’enquête a commencé au moment où j’avais à peine deux mois de service. C’est après que j’ai appris ces informations. J’ai cherché et j’ai vu que c’est vrai. Mais ils ne se sont pas adjugé ces parcelles puisque ni Blaise ni François n’ont fait partie d’une commission d’attribution.
Antoinette, la sœur du président, était considérée avant comme une présidente bis. D’elle dépendait la fortune ou l’infortune de plusieurs habitants ou résidants de Ziniaré. A-t-elle encore quelque influence dans la gestion de la cité ?
Elle est mieux placée pour répondre à cette question. En tant que citoyenne, elle compte dans ma gestion. Antoinette compte au même titre que les autres citoyens dans la gestion de la cité. Il n’y a pas deux poids deux mesures. Elle ne compte pas plus que les autres. Par contre ce que vous dites sur son influence dans la gestion antérieure, je ne peux le confirmer ni l’infirmer.
Avez-vous eu un contact quelconque avec Blaise Compaoré depuis sa chute ? Si oui, de quand cela date-t-il et de quoi avez-vous discuté ?
Cela reste privé.
Depuis quelques mois, les manifestations se multiplient pour demander le retour de l’ancien locataire de Kosyam. Que pensez-vous de cette vague, notamment celle qu’agite un certain Nana Thibaut ?
Cela relève de sa conviction personnelle. Ils sont convaincus de ce qu’a été Blaise Compaoré, de ce qu’il peut faire pour les filles et fils du Burkina Faso. C’est aussi eu égard à ce qui se passe. Constatant que le pouvoir actuel n’arrive pas à gérer le pays comme il se doit, à combler leurs attentes, ils sollicitent le retour de Blaise Compaoré.
Les tenants du pouvoir actuel sont vos anciens camarades du CDP. Quel genre de relations entretenez-vous avec Roch et compagnie ?
Cela reste dans le cadre du parti. Le camarade Achille Tapsoba pourra vous donner des informations y relatives. Mais en ce qui me concerne, en tant qu’élu, j’entretiens de parfaites relations avec mes collègues du MPP. Il n’y a pas de problème. Chacun sait où se limitent ses libertés et ce qu’il est capable de faire.
Cela fera bientôt deux ans que Roch est installé à Kosyam. Si vous deviez faire un bilan d’étape, que diriez-vous ?
Un bilan, c’est trop dire. Juste faire des constats en tant qu’opposant. Et de ce point de vue, je constate que la gestion n’a pas changé, les attentes des populations ne sont pas comblées. Elles n’arrivent pas à subvenir à leurs besoins. La cherté de la vie est toujours palpable. Je pense qu’il n’y a pas encore eu de rupture entre le temps de Blaise et celui du président Roch.
Le pays est en proie à l’insécurité, que pensez de cet état de fait ?
Au-delà de nos idées antagoniques, ce qui est idéal et primordial pour notre pays, c’est la stabilité. Notre souhait actuel est que les tenants du régime actuel trouvent les voies et moyens de faire en sorte que le pays retrouve sa stabilité.
Interview réalisée à Ziniaré par
Lévi Constantin Konfé