La communauté musulmane se prépare à fêter l’Aïd El-Kebir, ce vendredi 1er septembre 2017. Pour honorer le sacrifice d’Abraham, le fidèle musulman a le choix entre un mouton de 25 000 FCFA et 400 000 FCFA dans les marchés de bétail de la capitale burkinabè, où les clients se font rares.
Hamado Compaoré est l’animateur principal de la causerie ce matin du mercredi 30 août, aux environs de 10h30, à l’entrée du marché à bétail de Tanghin, à Ouagadougou. Assis sur un banc en compagnie de deux autres compagnons, la corde de ses quatre béliers en main, il remarque à peine qu’un client, fut-il journaliste, s’intéresse à l’un de ses animaux. Le sexagénaire, le visage fermé, semble, pour le moment, regretter son départ de Ziga dans l’Oubritenga pour se faire le maximum de sous. «Je suis arrivé depuis avant-hier (lundi 28 août, ndlr), mais je n’ai vendu que 10 moutons seulement. Le marché est morose», fulmine le commerçant. Il doit même cette maigre manne aux revendeurs. Le vieux ne peut s’empêcher de sombrer dans une colère noire, lorsqu’il se rappelle que l’année dernière, à la même occasion et pour les moutons de la même espèce, il a encaissé le double des prix de cette année. «Les moutons que je vendais entre 100 000 FCFA et 200 000 FCFA, je le fais entre 40000 FCFA et 150 000 FCFA cette année», explique le vieux Compaoré, l’air dépité. Toutefois, il faudra remettre à Hamado Compaoré la bagatelle de 250 000 FCFA voire 300 000 FCFA pour espérer embarquer l’une des bêtes qu’il tient. Là-dessus, il est catégorique. «C’est le prix au rabais même que je t’ai dit comme ça», ajoute le vendeur. L’effervescence n’est pas au rendez-vous.A l’intérieur du marché, le natif de Dori, Moussa Dicko, venu spécialement à Ouagadougou, pour la vente des animaux à l’occasion de la fête de Tabaski, ne cache pas non plus sa «déception». «Le marché est très mauvais. Les gens viennent se renseigner et repartent», affirme-t-il. Le jeune Moussaa, avec une douzaine de têtes de moutons, dont le prix varie entre 250 000 FCFA et 400 000 FCFA. Le bêlement des moutons se mêle aux marchandages entre vendeurs et revendeurs. Les clients se comptent au bout des doigts. Avec 40 000 FCFA, Ousmane Ouédraogo, un client, «embarque» le bélier, sur sa mobylette. Pour lui, acheter un animal pour la fête de tabaski est un devoir pour tout musulman qui en a les moyens. M. Kinvi est, lui, à bout de souffle. Une trentaine de minutes à écouter les marchands démontrer leurs talents de «marketeurs», sans pouvoir faire un choix.
«La fête sera belle»
Il trouve que les prix des moutons sont «très élevés». Ce qu’on pouvait avoir à 70 000 FCFA ou à 80 000 FCFA, est passé pratiquement à 150 000 FCFA, 200 000 FCFA voire à 400 000 FCFA, à la veille de l’Aïd El-Kebir. «En bon musulman, il faut sacrifier à la tradition, peu importe ce que cela coûtera», est-il obligé d’admettre.
Une quarantaine de minutes a été nécessaire à l’équipe de Sidwaya pour rallier le marché de bétail de Tanghin à celui de Ouagarinter, sur une douzaine de kilomètres, les embouteillages aidant. L’ambiance des lieux est d’une morosité déconcertante. Tout nouvel arrivant est perçu comme un potentiel client et accueilli comme tel. «Bon arrivée Monsieur, mouton à bon prix ; 40 000 FCFA, 150 000 FCFA… Bon aussi pour la tabaski», nous lancent les commerçants en quête de d’acheteurs. Après les présentations d’usage, la même rengaine nous est servie: «Il n’y a pas de marché cette année. Les clients ne se bousculent pas». Paul Ilboudo argue aussi sur le rabais du prix des animaux, dont ceux des siens varient entre 40 000 FCFA et 100 000 FCFA. Souleymane Kiemtoré est ravi de la visite des hommes de média. Enfin, il peut «déverser» sa rage. «Depuis ce matin jusqu’à cette heure (12h45, ndlr), je n’ai vendu qu’un seul mouton, alors que j’en ai plus d’une vingtaine», nous explique-t-il. Par contre, Harouna Kaboré se frotte les mains. El Hadj Boukaré vient de payer 5 de ses moutons dont la valeur est comprise entre 150 000 FCFA et 225 000 FCFA. «C’est une très bonne affaire. Depuis trois jours, c’est la première fois que j’amasse tant d’argent à la fois. La fête sera belle», se réjouit le jeune Kaboré.
Djakaridia SIRIBIE
Salamata COMPAORE