Ouagadougou - Les familles des victimes de l'attaque du restaurant Aziz Istanbul de Ouagadougou ont procédé jeudi à la levée des corps à la morgue de l'hôpital de Bogodogo, en périphérie de la capitale burkinabè, quatre jours après cet attentat qui a choqué le pays.
Dix-huit personnes, neuf Burkinabè et neuf étrangers, ont péri dimanche soir sous les balles de deux assaillants présumés jihadistes, alors qu'elles dînaient dans ce café-restaurant hallal de la principale avenue de la ville.
Pour les besoins de l'enquête, les dépouilles ont été autopsiées dans l'hôpital.
Une partie des victimes de cet attentat, qui n'est toujours pas revendiqué, devait être enterrée dans la journée dans différents cimetières de Ouagadougou. D'autres dépouilles devaient être transférées à Bobo Dioulasso, la deuxième ville du Burkina Faso, pour leur inhumation.
La dépouille de la victime française de l'attentat devrait être rapatriée en France dans les prochains jours, a indiqué à l'AFP l'ambassade de France.
Deux victimes koweïtiennes avaient déjà été rapatriées dans leur pays mercredi, et une victime burkinabè avait déjà été enterrée.
Entre 150 et 200 proches des victimes étaient réunis dans une atmosphère de recueillement dans la cour de la morgue, ont constaté des journalistes de l'AFP.
A la tête d'une large délégation gouvernementale, le ministre burkinabè de la Sécurité Simon Compaoré a exprimé dans une courte allocution "la compassion de la nation toute entière" aux familles des victimes, s'exprimant en français puis en mooré, la principale langue du Burkina Faso.
"Restons unis et Dieu fera le reste", a-t-il conclu.
Yacouba Sanou, 47 ans, qui a perdu dans l'attaque un cousin venu de Bobo
Dioulasso pour un séminaire, a confié sa tristesse, faisant preuve de fatalisme.
"Il n'était pas venu pour mourir. Nous sommes tristes mais on s'en remet à Dieu, c'est le destin".
- 'Dieu fera le reste' -
Aboubacar Sidibé, 23 ans, veut lui que lumière soit faite sur l'attaque de dimanche, dans laquelle il a perdu deux proches, un cousin et le mari d'une cousine, tous deux âgés de 24 ans.
"C'est toujours le choc, la tristesse. On veut la lumière, la vérité.
Pourquoi encore un attentat sur l'avenue N'Krumah, pourquoi il n'y a pas plus de sécurité ? Nous ne pouvons pas comprendre".
Le 15 janvier 2016, trois jihadistes avaient attaqué plusieurs restaurants et hôtels de cette avenue, faisant 30 morts et 71 blessés, en majorité des étrangers. Cet attentat, le premier de ce type au Burkina Faso, avait causé un choc.
Les mesures de sécurité avaient depuis été renforcées, mais selon une source sécuritaire, un certain relâchement s'était produit dans la surveillance ces derniers mois.
Sur le plan de l'enquête, les autorités burkinabè n'ont pas fait état jeudi d'avancée significative. Les deux assaillants n'ont toujours pas été identifiés.
Bien que l'attaque n'ait pas été revendiquée, son mode opératoire est similaire à celle de janvier 2016, qui avait été revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Une source sécuritaire a indiqué mercredi à l'AFP que les deux assaillants de dimanche étaient "probablement venu du nord du Mali ou de près de la frontière" avec le Burkina, "vu (leur) mode opératoire (et) leurs traits physiques".
Pour les autorités, l'attaque peut être liée à Aqmi ou a Ansarul Islam, un groupe jihadiste burkinabè actif dans le nord du pays, qui s'est déjà signalé par plusieurs attaques sanglantes contre l'armée.
"Toutes les pistes sont envisagées", a déclaré mercredi le ministre de la sécurité Simon Compaoré.
Le chef de l'Etat guinéen Alpha Condé, président en exercice de l'Union africaine, était attendu jeudi après-midi à Ouagadougou, deux jours après la visite de "solidarité" du président malien Ibrahim Boubakar Keïta.
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