72h après les attaques terroristes du Café- restaurant Aziz-Istanbul survenues dans la nuit du 13 au 14 août 2017, les activités reprennent sur l’avenue Kwame N’Krumah. Certains commerces ouvrent leurs portes tandis que d’autres restent hermétiquement fermés. Retour sur cette avenue, ce mercredi 16 août 2017.
L’horloge affiche 11h30 mn ce mercredi 16 août 2017 à Ouagadougou lorsque nous foulons le sol du côté opposé du Café-Restaurent Aziz- Istanbul. A proximité des lieux de l’attaque terroriste de dimanche dernier, un périmètre inaccessible a été bien défini. Salfo Ouédraogo vient d’ouvrir son commerce de vente d’accessoires de téléphones portables malgré, selon ses dires, l’effroi qui continue de hanter son esprit depuis la nuit de terreur du 13 août. Il est décidé à dompter sa frayeur pour vaquer à ses occupations quotidiennes, quand bien même il n’est pas certain d’avoir des clients.
« Je ne sais pas si j’aurai de la clientèle », lance-t-il désespérément. Son voisin, Seydou Gansoré, coiffeur de son état, est aussi désemparé. Tout comme M. Ouédraogo, a repris du service, en dépit de la peur, pour assurer sa pitance. « Si je n’ouvre pas le salon, comment vais-je nourrir ma famille ? », s’interroge-t-il. Après les attaques du café Capuccino en janvier 2016, indique-t-il, des patrouilles permanentes des forces de l’ordre ont été observées sur l’avenue Kwamé N’Krumah. Cependant, déplore-t-il, cette veille sécuritaire a faibli, il y a quelques mois. « Il y avait rarement de patrouilles sur l’avenue Kwamé N’Krumah », soutient-il.
Pour l’assistante administrative à la direction commerciale et marketing, d’un établissement proche des lieux du carnage, Joëlle Kompaoré, qui qualifie de sournois les agissements des « forces du mal », il ne faut pas d’emblée blâmer les autorités du pays pour un phénomène aussi imprévisible que le terrorisme. « Le peuple burkinabè doit apprendre à vivre avec cette nouvelle donne », ajoute-t-elle. Le restaurant La Véranda, situé aux environs du café restaurant, a repris du service ce matin. L’extérieur est totalement désert. A l’intérieur, seuls deux clients, Européens, prennent un verre. Cette morosité, aux dires du gérant de La Véranda, William Atikossié, est la preuve de la psychose occasionnée par l’attentat du 13 août. Bref, si les activités reprennent peu à peu dans les environs du restaurant qui a fait l’objet de l’attaque, les esprits sont toujours hantés par cet évènement douloureux.
«Ne jamais abdiquer malgré la peur»
A l’inverse de ces « courageux » qui ont repris du service, plusieurs commerces restent hermétiquement fermés. Ces boutiques ont tort de ne pas ouvrir, selon le vendeur d’accessoires de téléphones, Salfo Ouédraogo. «Les terroristes ont pour objectif de paralyser le pays. Ils y parviendront si nous désertons les lieux», affirme-t-il. Quoi qu’il en soit, M. Ouédraogo dit croire à la bravoure du peuple burkinabè.
« Heureusement que les Burkinabè ne sont pas de nature à céder facilement», se rassure-t-il. Mme Kompaoré soutient que, malgré la peur, il ne faut jamais abdiquer, advienne que pourra. A l’entendre, des mesures aussi bien rigoureuses que réfléchies pourraient aider à minimiser les risques et les conséquences de ces attaques terroristes. « Les responsables des café-restaurants gagneraient à multiplier les issues de secours de leurs infrastructures », suggère-t-elle. Par ailleurs, Joëlle Kompaoré plaide pour une démarche sensibilisatrice des populations à une meilleure collaboration avec les forces de l’ordre et de sécurité. Car, soutient-elle, il se pourrait que les terroristes aient des complices qui sont malheureusement des Burkinabè.
Le renforcement des mesures de sécurité, à travers des patrouilles quotidiennes, est la substance du message que lance William Atikossié. « Il faut redoubler de vigilance en imposant les contrôles systématiques devant tous les lieux publics », conseille-t-il. Tout en rappelant l’adage qui dit que « l’union fait la force», Mme Kompaoré appelle tous les Burkinabè à l’union quel que soit leur bord politique, ethnique et religieux. « Il faut qu’on se serre les coudes. De cette manière, nous vaincrons ces bandits sans religion, ni civilisation », conclut-elle.
Joanny SOW