Ouagadougou - Dix-huit personnes, dont au moins sept Burkinabè et huit étrangers, ont été tuées dimanche soir dans un attentat à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, pays membre de la coalition anti-jihadiste du G5 Sahel.
"Outre les sept Burkinabè, on dénombre un Français, une Canadienne, un
Sénégalais, un Nigérian, un Libanais, un Turc et deux Koweïtiennes", a annoncé
lundi à l’AFP à Ouagadougou le ministre burkinabè des Affaires étrangères,
Alpha Barry, qui a également fait état de "trois victimes non encore
identifiées". Selon Ottawa, une deuxième personne de nationalité canadienne
figure parmi les victimes.
L’attaque, menée par des jihadistes présumés et qui a fait une dizaine de
blessés, a visé le café-restaurant Aziz Istanbul, dans le centre-ville,
particulièrement fréquenté par des expatriés au moment de la retransmission de
grands matchs de football.
"On a entendu des coups de feu. Ils ont commencé à tirer sur la terrasse,
on est monté par l’escalier jusqu’en haut, on était couchés par terre, les
assaillants sont venus, ils ont pointé leurs fusils sur nous (...) je ne
comprenais pas leur langue, c’était de l’arabe ou quoi", a déclaré un rescapé
interrogé dans un hôpital à Ouagadougou par la télévision nationale.
Les opérations des forces de l’ordre contre les auteurs de l’attaque
retranchés dans le café, situé à quelques dizaines de mètres d’autres
établissements attaqués de la même manière en janvier 2016, ont duré toute la
nuit.
En début de matinée, le ministre burkinabè de la Communication Remis
Dandjinou, avançait un bilan de 18 morts et de deux assaillants "neutralisés".
Le président du Burkina Faso Roch Marc Christian Kaboré a condamné lundi
"l’attentat ignoble" en assurant que "le Burkina Faso se relèvera de cette
épreuve car son vaillant peuple opposera une résistance sans concession au
terrorisme".
Son homologue français Emmanuel Macron a condamné cette "attaque
terroriste" avant de s’entretenir avec M. Kaboré.
Les deux présidents ont fait le point sur les circonstances de l’attaque,
l’identification des victimes et sur l’enquête visant à identifier les
commanditaires", a annoncé l’Elysée.
Ils sont convenus "de l’urgence de mettre en oeuvre les décisions prises
lors du sommet de Bamako du 2 juillet et d’accélérer la mise en place de la
force du G5 Sahel".
La France, présente dans la zone sahélo-saharienne avec 4.000 hommes
engagés dans l’opération antijihadiste Barkhane, a poussé à la création d’une
force militaire conjointe des pays du G5 Sahel - Mauritanie, Tchad, Mali,
Niger et Burkina Faso - qui devrait compter 5.000 hommes.
Face à la dégradation de la situation dans le centre du Mali, limitrophe du
Burkina Faso et du Niger, gagnés à leur tour par les violences jihadistes, le
G5 a réactivé en février à Bamako ce projet de force conjointe, initialement
lancé en novembre 2015.
"Il faut qu’on accélère l’opérationalisation du G5 afin que les Africains
soient en première ligne pour défendre la sécurité de leurs citoyens et des
expatriés", a déclaré lundi le chef de l’Union africaine (UA), le président
guinéen Alpha Condé, appelant ses partenaires européens à trouver "les 400
millions de fonds qui manquent".
- Ouagadougou quadrillée -
A Ouagadougou, des opérations de "quadrillage et vérification des maisons
avoisinantes" se poursuivaient dans la matinée dans la quartier totalement
bouclé par les forces de sécurité, a précisé le ministre.
Le restaurant Aziz Istanbul est situé à 200 mètres du café Cappuccino, qui
avait été en janvier 2016 la cible d’une attaque jihadiste sanglante, selon un
mode opératoire similaire, revendiquée par al-Qaïda au Maghreb islamique
(Aqmi). Cette attaque avait fait 30 morts et 71 blessés, en majorité des
étrangers.
"Selon des témoins, au moins deux assaillants arrivés à moto vers 21H00,
armés de Kalachnikov, ont ouvert le feu sur le restaurant Istanbul", a indiqué
à l’AFP un officier de gendarmerie sous couvert d’anonymat.
Un serveur du restaurant a vu "trois hommes arrivés à bord d’un véhicule
4x4 vers 21H30, (qui) sont descendus du véhicule et ont ouvert le feu sur les
clients assis en terrasse".
Après avoir évacué le périmètre, les forces de sécurité - gendarmerie,
police et armée - ont donné l’assaut vers 22H15 contre les assaillants
retranchés dans l’immeuble qui abrite le café, selon l’officier de gendarmerie.
Les blessés ont été transportés dans la nuit à l’hôpital Yalgado Ouedraogo.
"Nous sommes débordés", a confié dans la nuit un chirurgien à l’AFP. "Nous
avons reçu une dizaine de blessés, dont trois qui sont décédés. La situation
des autres blessés est très critique. Trois sont pris en charge actuellement
en bloc opératoire".
Frontalier du Mali et du Niger, le Burkina Faso est depuis 2015 le théâtre
d’attaques régulières de groupes jihadistes qui sévissent dans tout le Sahel.
En décembre 2016, une douzaine de soldats burkinabè ont été tués dans une
attaque contre un détachement de l’armée basé dans le nord du pays. En octobre
2016, une précédente attaque avait fait six morts, quatre militaires et deux
civils.
Plusieurs enlèvements ont aussi été perpétrés, de Burkinabè comme
d’étrangers. Un Australien et un Roumain, enlevés en 2015, sont toujours
captifs de groupes islamistes liés à Al-Qaida.
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