La ville d’Angoulême a déroulé le tapis à une vingtaine de photographes lors du festival Emoi photographique. Parmi les invités, figurait Warren Boureima Saré, avec ses images sur les anciens combattants burkinabè.
Autodidacte, né à Béguédo (province du Boulgou), Warren Boureima Saré a su transcender ses difficultés sociales pour devenir une icône de la photographie. Depuis plus d’une trentaine d’années, il écrit son histoire et celle de la photographie burkinabè, souvent à ses propres frais, localement et hors du pays. L’artiste était d’ailleurs, du 25 mars au 30 avril 2017, comme invité d’honneur, au festival Emoi photographique d’Angoulême, pour porter la voix des derniers anciens combattants africains notamment burkinabè à travers son œuvre intitulée ‘’La dernière carte’’. «Cette année, le thème du festival ‘’Histoire et petites histoires’’ correspondait à mon travail. Et Le vernissage du festival s’est fait avec mon exposition au musée municipal d’Angoulême, en présence de milliers de visiteurs », a-t-il expliqué. Pour l’ex-enfant mendiant, la photographie est un outil d’échanges, de rencontre et même d’amour. C’est pourquoi, a-t-il ajouté, son séjour à Angoulême a permis de réaliser cinq portraits d’anciens combattants français (Blancs) et de 21 tirailleurs sénégalais, restés en France à la fin de la deuxième guerre mondiale, originaires du Mali, du Sénégal et de la Centrafrique. « Je me réjouis de la naturalisation de certains d’entre eux par la France. Même si c’est trop tard, c’est une reconnaissance du tort causé à ces soldats africains », a-t-il dit, en dénonçant : «C’est incompréhensible d’avoir une carte d’ancien combattant français et ne pas pouvoir venir en France même pour se soigner ». Son engagement a reçu un appui de taille pendant le festival. L’une de ses photos a été choisie, par la maison d’édition Gallimard, pour la couverture de la revue Les temps modernes d’Avril-juillet 2017 dont le titre est : Les guerres africaines de la France de 1830-2017-L’empire des armées. « C’est une fierté de voir graver mon nom sur cette photo. Mon travail est amplement reconnu sur le plan international à travers ce magazine », s’est-il réjoui.
La publication « Les temps modernes » a été cofondée par l’écrivain Jean Paul Sartre et la militante des droits des femmes, Simone de Beauvoir. Celui qui est considéré comme l’avocat des anciens combattants africains continuera, l’année prochaine, à promouvoir les droits de ceux-ci en Allemagne à travers un master class où il présentera également à des étudiants sa technique photographique, sa nouvelle association, à savoir le Réseau africain de la photographie créative (RAPC), créé en février 2017 à Dakar au Sénégal et son Centre photographique de Ouagadougou (CPO).
Le CPO, son centre de formation et partage d’expériences
Avant son voyage en Allemagne, il entend parler de son travail à Angoulême avec les jeunes membres du Centre photographique de Ouagadougou (CPO), son espace de formation situé au quartier Dassasgho dans la capitale burkinabè. « Je suis avec les jeunes », a-t-il clamé. Créé en 2010, le centre affiche plusieurs acquis notamment de nombreuses formations et expositions.
Sans oublier les multiples collaborations avec des photographes connus (David Pace, Leila Alaoui etc.) et des instituts photographiques du Liban, de la Belgique, de la France. « Malheureusement, le CPO a des difficultés financières, matérielles et logistiques, malgré sa réputation hors du Burkina Faso. Avec l’appui des autorités politiques, précisément du ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme, le CPO fera parler de la photographie burkinabè dans le monde entier. Ainsi, les partenaires sentiront que les autorités de notre pays nous soutiennent », a-t-il dit. A Angoulême, Warren Saré a su convaincre certains de ses pairs européens pour parrainer les activités de son centre et soutenir en matériels, les membres à travers des projets communs. « Je cible les photographes burkinabè progressistes, c’est-à-dire ceux qui veulent faire avancer les choses», a-t-il prévenu.
Alassane KERE