La motion de défiance contre le maire de Banfora, Aboubacar Héma, a été soumise à la sanction de l’exécutif communal le 7 juillet 2017. Sur les 80 conseillers que compte le conseil municipal, 47 ont renouvelé leur confiance au maire, après plus de 5 heures de débats houleux et de longues explications.
Conformément aux textes qui régissent la décentralisation dans notre pays, Aboubacar Héma, maire de la commune de Banfora, s’est vu obligé de convoquer une session extraordinaire du conseil municipal le 7 juillet 2017, suite au dépôt d’une motion de défiance par un groupe de conseillers municipaux qui ne trouvent pas satisfaction dans la gestion de l’édile. 47 voix contre la motion, une abstention, tel est le résultat du vote qui s’est déroulé en l’absence des signataires de la motion. En effet, peu de temps avant que les conseillers ne se déterminent, ceux-ci avaient vidé la salle en protestation contre la persistance du maire à soumettre la motion à la sanction de l’assemblée. Au regard des réponses qui ont été données dans la salle, les signataires ne jugeaient plus le vote nécessaire. La session a été ouverte aux environs de 8 heures et demie. Après les formalités d’usage, Aboubacar Héma a mis à la disposition des conseillers, un ensemble de documents qui servaient à étayer les réponses qu’il apportait aux différents points de la motion de défiance. Si la veille certains signataires avaient déjà fait volte-face en contresignant la motion et en se joignant au groupe du maire qui a été interné à la Direction régionale de l’agriculture, il faut reconnaître que les réponses d’Aboubacar Héma ont réduit le nombre des adeptes de la motion au simple groupe qui en a eu l’idée. Cela se voyait à travers la configuration de la salle, puisque que le grand groupe qui soutenait désormais le maire s’était amassé du côté droit. Pendant ce temps, les frondeurs comme Salifou Barro et Fulgence Koné, se sont retrouvés seuls du côté gauche. Issiaka Fayama, Fabarka Soulama, Bibata Sagnon/ Karama, Salia Sanou, Adama Héma et bien d’autres ont préféré se mettre au fond de la salle. Pour sûr, les documents et réponses fournis par le maire ont fait dire à l’assemblée que le maire ne communique pas suffisamment avec le conseil municipal. Issiaka Soulama, 2e adjoint au maire par ailleurs premier soutien d’Aboubacar Héma dans cette crise, a même été le premier à signifier cela au maire. « Monsieur le maire, vous me connaissez suffisamment pour savoir que s’il y a des choses qui ne sont pas correctes, je vous le dirai. Alors, je vous invite à ouvrir le dialogue avec l’ensemble des conseillers municipaux car, de tout ce qui a été dit, il ressort de la motion de défiance et des réponses que vous avez apportées, que le principal grief qui vous est fait est un déficit de communication et de concertation. Ouvrez ce dialogue en premier lieu avec le premier adjoint, car c’est lui qui réside à Banfora. Vous et moi sommes dans d’autres localités et pour ce qui me concerne, tout le monde sait que mon affectation de Banfora à Tougan, est l’une des conséquences de cette crise. Donc, vous devez entretenir une communication étroite avec le 1er adjoint », a lancé Issiaka Soulama, avant d’inviter l’ensemble des élus à voter contre la motion. Cette sortie du 2e adjoint a été suivie de celle de Fulgence Koné lui-même, premier adjoint au maire. En tant que l’un des principaux acteurs de la motion de défiance, il a relevé que leur démarche n’a rien contre la personne du maire mais plutôt la manière dont il gère la mairie. Reprenant les mots de son prédécesseur, Fulgence Koné, plus acerbe, a dit que les documents que le maire vient de mettre à leur disposition comportent de belles actions certes, mais tout cela devait être discuté au préalable en session. Selon lui, le conseil municipal manque cruellement de visibilité tant en son sein qu’au sein de la population. Et d’ajouter que la concertation doit être de mise, si le maire veut que les choses aillent mieux. « C’est à la fois curieux et dommageable, mais sachez que le conseil municipal n’a même pas été informé de votre mission en France, en Italie et au Canada. Pourtant, ces missions engagent l’argent des citoyens à qui nous devons des comptes », a lancé le premier adjoint qui estime que si le maire veut d’une parfaite harmonie, il doit savoir collaborer. Aboubacar Héma, à l’écoute de ces propos, a réagi en toute humilité. « Je vous ai compris. Je prends acte de tout ce que vous venez de dire et je m’engage à apporter les changements que vous attendez », a-t-il lancé. Et de poursuivre en disant : « à présent, j’aimerai soumettre la motion de défiance au vote des conseillers ». A ce moment, Salifou Barro demande une suspension, pour permettre aux signataires de la motion de se concerter. 25 élus sortent alors de la salle. Après une vingtaine de minutes, ils sont de retour. Aboubacar Héma se répète. Il est stoppé net par le même Salifou Barro qui estime que le maire devrait les écouter d’abord. Celui-ci s’excuse parce qu’il ne savait pas que leur concertation serait suivie d’une déclaration. Et Barro de dire qu’il estime qu’il n’y a plus lieu d’aller au vote, puisque le maire promet de faire amende honorable de sa manière de gérer. Le groupe du maire ne voit pas la chose de cette manière. « Il faut nécessairement voter », clament-ils haut et fort. Et lorsque le maire soumet la motion, l’ensemble des signataires vident la salle, laissant la tâche aux 48 élus qui sont restés assis. A sa sortie, Aboubacar Héma a été escorté par plusieurs jeunes à moto. Après avoir fait le tour de la ville, il s’est rendu chez le chef de canton, Héma Yoyé.
Mamoudou TRAORE
Session sous haute surveillance
Le vote de la motion de défiance s’est déroulé sous haute surveillance policière. Craignant des débordements, la police avait pris des mesures particulières. Chaque entrée de la mairie et de la salle était sous surveillance et des équipes de la CRS sont même venues de Bobo-Dioulasso pour prêter main forte. En effet, il a été plusieurs fois fait cas de saccages au cas où la motion passerait.
Les signataires de la motion hués
Comme le jour du vote du maire en juin 2016, les Banforalais, en majorité des jeunes, se sont massés devant la mairie. L’arrivée et le départ des conseillers signataires de la motion n’a pas été du tout calme. Ceux-ci ont été sifflés par la foule et d’autres ont même été injuriés. Il faut dire qu’il y avait des inquiétudes à se faire quant à leur sécurité.
Pourquoi de 40, les signataires de la motion se retrouvent à 25 ?
C’est la question que se posent plus d’un. En effet, la motion de défiance qui a été déposée le 29 juin 2017, a été signée par 40 conseillers. Que sont devenus les 15 autres. Ils se sont certainement joints à la cause du maire. Du coup, se demandent les observateurs de la scène politique banforalaise, que s’est-il passé pour qu’ils fassent ainsi volte-face ?
Rassemblés par MT