Après le dépôt de leur motion de défiance à l’encontre du maire, les frondeurs du conseil municipal de Banfora ont tenu une conférence de presse dans la soirée du 3 juillet 2017 au siège de la NAFA. Face aux hommes de médias, les signataires ont expliqué qu’ils étaient dans la légalité suivant une disposition du code général des collectivités territoriale qui permet d’interpeller le maire. Ils ont surtout démenti l’accusation d’achats de consciences qui leur auraient permis de déposer cette motion dont 40 conseillers municipaux signataires.
Initialement prévue pour se tenir à l’hôtel Calipso, c’est finalement au siège de la NAFA qu’a eu lieu cette conférence de presse. La menace de brûler l’hôtel seraient à la base de ce changement de lieu, selon les organisateurs. Etaient face aux journalistes, le premier adjoint au maire de Banfora, Fulgence Koné ; Salifou Barro, responsable régional de la NAFA des Cascades ; Issiaka Fayama, vice-doyen du conseil municipal et Lamoussa Koné, tous conseillers municipaux et signataires de la motion.
C’est Fulgence Koné qui à planté le décor. Il a rappelé qu’en démocratie, il y a des règles de fonctionnement tout en faisant le parallèle avec ce qui se passe à l’Assemblée nationale qui, à tout moment, peut interpeller le gouvernement et le Premier ministre sur la manière de conduire les affaires du pays.
« Le conseil municipal est une assemblée locale qui a les mêmes règles de fonctionnement, c'est-à-dire que les conseillers peuvent interpeller le maire et son équipe sur le fonctionnement de la commune. C’est dans cet esprit qu’un certain nombre de conseillers, qui sont préoccupés par la manière dont les choses sont conduites au niveau de la commune, ont pris l’initiative d’interpeller le maire», a expliqué le 1er adjoint, pour qui la gestion de l’édile Aboubacar Héma pose problème alors qu’ils en seront tous tenus responsables. «Voilà le sens de la motion et il faut que le maire soit en mesure de démontrer que ce qui lui est reproché ne correspond pas à la réalité», a-t-il précisé.
Le vice-doyen du conseil municipal, Issiaka Fayama, lui, s’est appesanti sur les différentes médiations de religieux et de coutumiers qui n’ont pas abouti. Une mission de médiation entre le maire Héma et le ministre Soulama, tous deux du NTD, aurait été initiée par lui-même, qui devait se tenir au cabinet du ministre.
Elle aurait a capoté simplement parce que le maire, ayant jugé qu’il ne serait pas en terrain neutre, ne s’y est pas rendu. Ces médiateurs expliquent avoir privilégié le droit d’aînesse, une valeur sociale en Afrique, estimant que le petit frère (le maire) doit se « plier » devant son grand frère (le ministre). Cette sortie avortée à la capitale semble avoir courroucé le vice-doyen qui est sorti de sa réserve, estimant qu’un ministre n’est pas l’égal d’un maire.
Sur l’objet même de la motion de défiance, Salifou Barro de la NAFA a indiqué qu’il s’agit de 11 choses reprochées au maire. Ce sont, entre autres : l’absence de lisibilité et de perspectives de développement communal ; la gestion catastrophique des sessions ; les difficultés de mise en œuvre des délibérations et arrêtés du conseil municipal ; la non-exécution des circulaires ministérielles ; le refus de convoquer les sessions ordinaires du conseil municipal dans les délais prévus par les textes en vigueur.
Les frondeurs dénoncent aussi l’amateurisme dans la gestion des affaires de la commune ; l’instabilité de l’administration communale ; la gestion gabegique des biens et ressources de la collectivité ; le non-respect des procédures dans le changement des responsables des services techniques municipaux ; le non-respect des procédures de passation des marchés (une violation des articles 6 et 75 du décret portant procédure de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics) et, enfin, la réalisation discriminatoire des infrastructures communales.
Les conférenciers ont tenu à souligner que contrairement à ce que soutient le camp du maire, ce n’est pas parce que ce dernier veut voir clair dans le lotissement litigieux opéré à l’époque par Souleymane Soulama, alors qu’il était maire de Banfora qu’ils ont concocté cette motion de défiance. Bien au contraire, ils souhaitent que l’opération soit bien menée comme l’a promis le maire aux populations remontées face aux attributions.
Aux questions des journalises, les conférenciers ont nié avoir usé de corruption pour réunir les 40 signatures, affirmant ignorer les plaintes déposées par certains conseillers qui se sont sentis piégés pour parafer la motion. Ils affirment par ailleurs détenir des preuves de la gestion décriée et seraient prêts à les brandir. Concernant les conférenciers disent espérer que sur les 54 voix dont ils ont besoin le jour du vote, des élus locaux « conscients » basculeront pour eux, refusant de dévoiler l’ossature de la nouvelle équipe.
C’est du reste la deuxième tentative pour faire partir le maire et sur la question, Fulgence Koné a expliqué que le « fruit n’était pas mûr » et que c’était une initiative du MPP. Cette motion est portée par des conseillers issus du MPP, de la NAFA, du NTD, de l’UPC, du CDP et des indépendants. Sur la question du sucre, Lamoussa Koné a tranché : il était destiné aux responsables des comités de base du NTD et il a remis 10 paquets à chacun.
«Si des plaintes sont formulées contre moi, je répondrai, c’est moi qui ai procédé à la distribution et je n’ai pas ajouté d’argent à qui que ce soit», a-t-il déclaré. Le maire a 3 jours pour convoquer une session qui doit se tenir dans les 7 jours.
Luc Ouattara