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Panel de la CODER sur la démocratie : « Les uns gouvernent, les autres subissent, ainsi naissent les… insurrections », selon Abdoulaye Soma
Publié le lundi 19 juin 2017  |  Le Pays
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© Autre presse par DR
Le Pr Abdoulaye Soma, enseignant-chercheur à l’Université Ouaga2 et Président de la Société burkinabè de droit constitutionnel.




Dans le cadre de son programme de travail pour la période d’avril à juillet 2017, la Coalition pour la démocratie et la réconciliation nationale (CODER) a organisé un panel sur le thème : « processus démocratique au Burkina Faso de 1960 à nos jours : bilan, enjeux et perspectives ». Ledit panel qui a regroupé plusieurs éminents chercheurs, a eu lieu le samedi 17 juin 2017 à Ouagadougou, dans la salle de conférences du Conseil burkinabè des chargeurs (CBC).

« Autocratie impossible, démocratie en fossile », c’est ainsi que le Professeur (Pr) Abdoulaye Soma a décrit l’état de la démocratie au Burkina Faso. A l’entendre, « la démocratie se nourrit de réformes ». Mais quelles réformes pour la promotion et la consolidation de la démocratie ? Pour répondre à cette question, le Professeur Soma a commencé à développer les principes qui doivent animer toute réforme dans toute bonne démocratie. Et ces principes sont de deux ordres. « Le premier principe est celui du conventionnalisme constitutionnel ». Pour le Professeur, « ce principe veut dire que les règles qui doivent être fixées dans un Etat démocratique, doivent être négociées et convenues par les composantes essentielles du peuple dans son ensemble. En aucun cas ces règles ne peuvent être instituées unilatéralement par une famille politique. C’est pourquoi on entend parler de pacte social ou de contrat social, pour désigner des règles discutées et convenues entre les personnes ». Concernant le deuxième principe qui est le conventionnalisme institutionnel, Pr Soma a affirmé que celui-ci veut dire que les grandes institutions de la République doivent faire l’objet d’un accord entre les composantes essentielles de la société, pour être créées ou supprimées. « On ne peut pas créer unilatéralement une institution importante de la République ou la supprimer sans une concertation préalable de ces composantes. Par exemple, Haut représentant du Président du Faso, qui est une institution au-dessus du gouvernement, est institutionnellement dangereuse parce que créée unilatéralement », a-t-il ajouté. Par rapport aux réformes, il a suggéré qu’on ait « des réformes qui promeuvent l’équilibre en termes de régions, de religions, d’ethnies et de coloration politique parce que la démocratie n’est pas seulement le gouvernement de la majorité en écrasant la minorité ». L’opposition par exemple doit avoir le droit de participer à certaines institutions de la République, parce que ces institutions sont aussi réputées pouvoir être gérées par l’opposition. En paraphrasant le Président Thomas Sankara, il a estimé que cela peut conduire à la situation où « les uns gouvernent, les autres subissent, ainsi naissent les révoltes et les insurrections ». Il a estimé qu’actuellement, « il faut faire des réformes plus profondes sur la transparence et la redevabilité pour sauvegarder les ressources financières et économiques de la République. Les réformes déjà engagées sont insuffisantes. Il faut aller plus en profondeur pour faire en sorte que l’argent du peuple ne serve que le peuple ».


Le Pr Albert Ouédraogo, quant à lui, a comparé le Burkina Faso à « un volcan endormi dont on ne peut pas prévoir le réveil, le sursaut ni la magnitude ». Le sous-thème qu’il a traité est en rapport avec « les paramètres et facteurs crisogènes au Burkina Faso ». Contrairement à ce qui est affirmé, Pr Albert Ouédraogo a déclaré que « la parenté à plaisanterie ne parvient pas toujours à contenir les conflits ». Il a ajouté que d’autres sources de conflits ont pour fondements « les zones minières, le fondamentalisme religieux, les conflits d’ordre culturel. Il a aussi évoqué la question des arabisants ; Ces personnes que l’on envoie en étude et qui reviennent avec des licences et des doctorats en arabe. C’est une source de conflit, en ce sens que l’Etat ne crée pas d’opportunités pour ces derniers ». En parlant des conflits politiques, Pr Albert Ouédraogo a mentionné que la violence s’explique par le fait que les militaires sont restés trop longtemps au pouvoir. Raison pour laquelle il a salué la dépolitisation de l’armée comme une bonne chose qui va permettre d’oxygéner la démocratie. Comme source de conflit, il a aussi indexé les inégalités sociales qui sont le lit des ferments des soulèvements. Comme perspective, il a laissé entendre qu’il est important de mettre l’accent sur l’éducation politique et civique. Par rapport aux jeunes, il réclame un quota et il faut travailler à sortir du tout politique.

« Transition : enjeux du Code électoral et des élections sur la gouvernance politique, les principes et fondements de l’Etat de droit et la consolidation de la démocratie au Burkina Faso » est le sous-thème qui a été développé par Dr Abdou Karim Saïdou. Selon ce dernier, « le Code électoral fait partie intégrante de la Constitution et est un indicateur de la qualité de la gouvernance au Burkina Faso ». En ce qui concerne le Code électoral du Burkina Faso, Dr Saïdou a affirmé que le Code électoral du Burkina Faso est conforme aux standards internationaux. Concernant les réformes politiques, il a souligné qu’il y a eu des réformes électorales sous la Transition et il s’est dit surpris que ce texte n’ait pas été cité par le ministère en charge de l’administration territoriale. Tout compte fait, il a noté que la nécessité de consolider l’Etat de droit s’impose. Toute chose qui va mettre tout le monde en sécurité. Aussi a-t-il soulevé la nécessité d’instituer un cadre de dialogue inter-partis.

D’autres techniciens sont intervenus durant ce panel. Il s’agit de Siaka Coulibaly qui a traité des « acquis, insuffisances et enseignements du processus démocratique au Burkina Faso de 1960 à nos jours ». Djibrina Ouédraogo, rapporteur de la commission constitutionnelle, a donné les « innovations majeures de l’avant-projet de Constitution ».


A la fin des différentes communications, le Président de la CODER, Rasmané Ouédraogo, a confié à la presse que « La CODER n’est pas seulement une opposition porteuse de justice, de paix et de réconciliation. La CODER est avant tout une opposition politique ». Et de ce point de vue, tous les aspects de la vie nationale nous interpellent. Nous avons 4 éléments comme objectifs dont la sauvegarde de la démocratie. C’est pourquoi « nous avons décidé cette fois-ci d’ouvrir ce chantier sur la promotion de la démocratie au Burkina Faso. Nous sommes en train d’aller vers une Ve République et nous avons pensé que légitimement, il faut faire un bilan de notre processus démocratique », a-t-il ajouté. L’objectif étant de contribuer à créer une société où la plupart des Burkinabè se reconnaissent. Pour le Président de la CODER, c’est un chantier qui est ouvert dans l’espoir que d’autres acteurs y contribuent. A l’endroit des détracteurs de la CODER, Rasmané Ouédraogo a lancé ceci : « Il y a un mois et demi, des voix se sont élevées pour demander la suppression de la CODER. C’est un état d’esprit. Nous avons cru et nous sommes convaincus qu’il n’y a pas d’issue pour le Burkina Faso, sans la réconciliation. Tôt ou tard, on va en arriver là. Peut-être que nous avons eu tort d’avoir eu raison très tôt. Le Burkina Faso a besoin de tous ses fils pour que l’on puisse gérer les difficultés. Chaque jour perdu est préjudiciable pour la société en matière de cohésion sociale ».

Françoise DEMBELE


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