Ceci est une déclaration signée du Cadre d’expression démocratique (CED) sur le projet du nouveau code électoral. Selon le Coordinateur national du mouvement, Pascal Zaïda, « ce projet du nouveau code électoral, tout comme la loi Cherif, sont pires que la modification de l’article 37 de notre Constitution et le Sénat ».
Décidément, nous sommes en face de gouvernants qui, contrairement à leurs discours, sont très peu, sinon pas du tout, en phase avec la marche de l'histoire. Habitués des intrigues et manœuvres politiciennes dignes de courtisans de palais ou de ropero si nous étions dans un contexte de showbiz, le triumvirat à la tête de notre pays semble ignorer qu'en fait, le pouvoir et la responsabilité de sa gestion sont précisément le rôle qui leur est dévolu depuis la "transmission". Ils se comportent comme des vulgaires contestataires depuis leur accession au pouvoir. Par une logique de confrontation empreinte de paranoïa, ces gouvernants agissent à l'aune d’une machiavélique conception du rapport de force sans une véritable volonté ou capacité progressiste pour assurer au peuple du Burkina Faso un bien-être.
Ainsi tour à tour, les magistrats, les enseignants d'Universités, les médecins, les greffiers et dernièrement les agents du Trésor échapperont au lynchage public du seul fait de la fermeté et la constance de leur engagement. En face, le pouvoir, par ses relais volontaires ou "naïfs", s’adonne à un démontage systématique de toute lutte coopératrice de sorte à mettre à dos des Burkinabè contre d'autres Burkinabè. Si ce n'est pas la preuve d'une incapacité notoire, au moins celle des prémices d'un pouvoir dictatorial insupportant la moindre contestation est établie.
Au lieu de tirer les leçons de ces échecs, l'option choisie pour la suite de la gouvernance Roch « la solution », c'est de prendre les devants. Le furtif et mort-né projet de l’encadrement du droit de grève constitue le premier acte de l'option offensive, mais la réaction quasi simultanée du monde du travail et de l'opinion publique a eu raison sur le funeste projet.
Aujourd'hui, par un projet de loi tout aussi funeste, c’est le fondement même de notre processus démocratique qui est attaqué : la question électorale.
Depuis les années 98, les acteurs politiques burkinabè ont décidé et arrêté progressivement des mécanismes garantissant le minimum de sécurité et d'indépendance des processus électoraux. Ces mécanismes ont évolué pour s'améliorer au fur et à mesure, de sorte à nous amener au stade où nous sommes :
- une CENI autonome et indépendante ;
-un bulletin unique ;
-une carte biométrique ;
-une consécration du vote des Burkinabè de l'extérieur ;
-un découpage des circonscriptions électorales plus au moins consensuel (malgré le rétropédalage après les législatives de 2002)...
Ces acquis ont sans conteste fait de notre pays une référence en matière d'apprentissage démocratique. Mais pour faire de la démocratie, il faut des démocrates ou au moins des gens qui entendent l'être.
Après deux ans du surplace, et au lieu de chercher à faire le minimum possible, la machine pour s'accrocher coûte que coûte au pouvoir s'est mise en marche, aucune limite, aucune gêne, on casse tout et on repart à l'an 1 de notre processus démocratique. On peut citer :
- la remise en cause du principe d'indépendance et d'autonomie de l'organe chargé de l'organisation des élections au niveau central comme local ;
- la négation aux Burkinabè de l'extérieur leur droit constitutionnel à élire et à être élus ;
- la modification, pour le rendre plus laxiste, du processus d'enrôlement des électeurs (en plus de la CNIB, on pourra désormais utiliser tout acte d'état civil).
En attendant que les partis politiques prennent position et fassent preuve davantage de lucidité et moins de couardise, nous voudrons prendre l'opinion publique, les partenaires techniques et financiers, les organisations internationales à témoin sur cette démarche et celle d'un gouvernement issu "d'une lutte pour la démocratie ".
Au président du Faso qui fait mine de ne pas savoir ce qui bouillonne sous le couvercle de la marmite, nous disons qu’il ferait mieux de se ressaisir, parce qu’il n’est pas tard.
A nos sœurs et frères de la société civile et au peuple burkinabè, nous en appelons à la vigilance et à la mobilisation pour la sauvegarde des acquis chèrement acquis.
Le bon sens voudrait que les gouvernants en place tirent leçon du passé, afin d’enraciner davantage la démocratie au bonheur du peuple burkinabè.
Les calculs politiciens qui ont cours depuis la chute de la IVe République sont contre les intérêts du peuple burkinabè et ce projet du nouveau code électoral, tout comme la loi Cherif, sont pires que la modification de l’article 37 de notre Constitution et le Sénat.
Il appartient donc au peuple burkinabè de prendre ses responsabilités.
Ouagadougou, le 3 juin 2017
Le Coordonnateur National
Pascal ZAIDA