Ouagadougou - Pour prémunir le cancer du foie, la tumeur qui ronge le plus les Burkinabè (1400 décès/an), il faut surtout combattre ses principaux agents causaux que sont les hépatites B et C par un dépistage précoce, ont recommandé jeudi des médecins burkinabè.
Jeudi soir sur la télévision nationale du Burkina, la journaliste Maïmouna Dao a reçu sur le plateau de ‘’Santé Mag’’, quatre spécialistes du cancer du foie, un mal qui prend des proportions inquiétantes au Burkina Faso.
Selon Pr Roger Sombié, en service à l’unité d’hépato gastro-entérologie de l’Hôpital Yalgado Ouédraogo, les hépatites B et C (90% des cas), l’alcool, l’aflatoxine et le surpoids sont des facteurs favorisant la survenue de la cirrhose de foie (lésion des tissus du foie).
Il a ajouté que la cirrhose de foie constitue un facteur déterminant dans l’apparition du cancer primitif du foie, parce qu’en se cicatrisant, la cirrhose peut désorganiser l’architecture normale du foie et entraver la connexion entre les différentes cellules (hépatocytes).
La cirrhose de foie cause au Burkina Faso, 3100 décès par an et le cancer primitif du foie, 1400 décès par an, a indiqué le médecin.
Pr Roger Sombié a précisé que ces données de 2015 avancées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), sont en deçà de la réalité.
D’après lui, une étude réalisée en 2016, révèle que la cirrhose de foie et le cancer de foie constituent 65% des motifs d’hospitalisation dans son unité contre 80% de taux de mortalité pour les patients souffrant d’un cancer primitif.
Dr Aboubacar Bambara, Assistant Oncologie médicale à l’hôpital district de Bogodogo, a soutenu que 30 nouveaux cas de cancer primitif sont enregistrés chaque mois, ce qui fait selon lui du cancer du foie, le cancer qui touche le plus de Burkinabè.
Le cancer primitif nait des cellules cancéreuses du foie tandis que le cancer secondaire est provoqué par l’importation sur le foie, de cellules cancéreuses en provenance d’autres organes, a expliqué Pr Alain Bougouma, professeur titulaire en service à l’unité hépato gastro-entérologie de l’Hôpital Yalgado Ouédraogo.
Urgence du dépistage
Revenant sur les causes de la cirrhose de foie, Pr Bougouma a cité le tabac, les maladies métaboliques et l’aflatoxine, une moisissure de couleur jaune que l’on trouve dans les céréales et les gousses d’arachide, conservés en atmosphère chaude et humide.
Pour le chef de service Chirurgie digestive à l’hôpital Blaise Compaoré, Pr Adama Sanou, en occident, le cancer de foie touche en majorité des sujets âgés d’au moins 60 ans, alors qu’en Afrique, c’est la tranche d’âge comprise entre 35 ans et 50 ans qui est la plus concernée.
Il confie même avoir déjà reçu un patient de 25ans.
En Afrique, 70% des cancers surviennent chez des patients dont les mères étaient déjà porteuses de la tumeur, appuiera Pr Alain Bougouma, citant une étude.
A l’heure actuelle au Burkina Faso, le meilleur traitement du cancer du foie reste l’ablation par chirurgie, de la partie malade du foie, mais à condition que la tumeur soit mineure, a averti Pr Roger Sombié.
Malheureusement, la majorité des patients arrivent déjà à un stade avancé même si de plus en plus, quelques patients ont pu faire un diagnostic précoce, a indiqué Pr Adama Sanou.
«L’agent causal du cancer primitif du foie est connu. Dans 9 sur 10 cas, c’est l’hépatite B et C. Donc tout le monde doit connaitre son statut vis-à-vis de l’hépatite B et C», a recommandé Pr Sombié.
Selon Pr Sanou, il faut éviter de banaliser les symptômes, en allant à la consultation dès qu’on sent une fatigue inexpliquée ou qu’on a des difficultés à s’alimenter.
Il a appelé les décideurs publics et les bonnes volontés à soutenir le projet de transplantation d’organes (rein et foie) qui devrait selon lui, voir le jour d’ici 2020, à l’Hôpital Blaise Compaoré de Ouagadougou.
A ce sujet Pr Alain Bougouma a plaidé pour qu’on sensibilise les populations sur l’utilité du don d’organes, en dépit des pesanteurs socio-culturels.
Pr Bougouma a aussi invité les patients à s’adresser à un personnel qualifié pour traiter les hépatites.
Le foie est une usine chimique complexe qui fonctionne 24h/24. Il traite tout ce que nous mangeons et buvons. Cette glande, la plus grande de l’organisme humain, stocke des nutriments, effectue la synthèse des protéines et débarrasse le corps de certaines toxines, note le spécialiste Bougouma.
Tilado Apollinaire ABGA