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Agacement de Paris sur fond d’insécurité généralisée au Mali : les protagonistes maliens doivent se ressaisir
Publié le jeudi 8 decembre 2016  |  Le Pays




L’accord d’Alger sur le Nord-Mali, signé on se rappelle le 20 juin 2015, avait laissé entrevoir un retour de la paix dans cette partie du pays en proie à la fois aux humeurs des mouvements armés et aux assauts meurtriers et répétés des groupes djihadistes de toutes les obédiences. Plus d’une année après cette lueur d’espoir, force est de reconnaître que les lignes n’ont pas véritablement bougé. En effet, en dehors de la nomination de quelques cadres de l’ex-rébellion touareg à la tête de 3 gouvernorats du septentrion malien, tous les points de l’accord sont en état d’hibernation. D’ailleurs, ces nominations semblent avoir créé plus de problèmes qu’elles n’en ont résolu, puisque le Gatia (Groupe d’autodéfence touareg imghad et aliés) du Général Ag Gamou et les populations non-touareg de la zone, sont vent debout contre le choix de Bamako pour administrer leur région. Ils protestent notamment contre ce qui semble être, à leurs yeux, une part belle accordée aux éléments de la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad). Bref, pour tout dire, la situation au Nord-Mali demeure préoccupante. Et Paris l’a fait savoir haut et fort.

Paris est fâchée contre Bamako

Pour l’Hexagone, le principal responsable de cette situation a un nom : Bamako. Les autorités françaises font le reproche notamment au gouvernement malien de ne pas en faire assez pour que les choses bougent dans le bon sens. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Paris est fâchée contre Bamako. Et ce, d’autant plus que l’accord d’Alger est en partie son bébé. Que celui-ci mette un long temps à croître, comme c’est le cas aujourd’hui, peut être ressenti par la France comme son propre échec. Dans le même registre, tout le monde sait que Paris s’est beaucoup investie dans la traque des djihadistes au Nord-Mali. Elle est allée jusqu’à y envoyer ses soldats, dont certains sont morts et continuent de mourir sous l’effet des bombes artisanales et autres mines posées par les « barbus ». François Hollande a donc des raisons d’être agacé de voir son œuvre sapée par, selon le gouvernement français, un manque de volonté du pouvoir de Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) de donner un coup de fouet significatif à l’exécution de l’accord d’Alger. La posture du chef des Toubabs pourrait être liée à son souci de ne pas passer la main au président qui va lui succéder dans 6 mois à l’Elysée, sur un constat d’échec cuisant de la France dans la gestion de la question du Nord-Mali. Pour François Hollande donc, c’est d’abord une question d’honneur. C’est pourquoi on peut décrypter la colère non dissimulée du président français contre Bamako, comme une manière de dire à IBK ceci : « il faut te hâter de sorte que je puisse dire, au moment où je vais passer la fonction à un autre Français, que je n’ai pas eu tort d’intervenir au Mali ». Cela pourrait au moins contribuer à donner une petite embellie à son quinquennat qui, on le sait, a été assimilé à une catastrophe par bien des Français. Cela dit, l’on peut se permettre de faire observer à Paris que si les choses piétinent dans l’application de l’accord d’Alger, l’on ne doit pas seulement en imputer la responsabilité à Bamako. La faute en revient à l’ensemble des protagonistes maliens. De part et d’autre, l’on peut, en effet, avoir l’impression que ce qui manque le plus, c’est la bonne foi. De ce point de vue, Paris serait bien inspirée d’élever la voix contre tous les signataires de l’accord d’Alger.

L’Armée malienne semble capituler

C’est dans ce contexte d’agacement de Paris que plusieurs dizaines de détenus ont pu s’évader de la prison de Nioro, au Centre du pays, après qu’elle a été attaquée dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 décembre dernier par des hommes armés. Plusieurs sources estiment qu’ils appartiennent à un mouvement armé allié au groupe djihadiste Ansar Dine. Quant à la police, elle pointe du doigt des hommes proches d’Amadou Kouffa, un prédicateur peul qui a porté sur les fonts baptismaux un mouvement armé battant pavillon Ansar Dine. Si l’une ou l’autre des deux sources venait à se confirmer, l’on pourrait en déduire que tout le Mali est en passe de tomber sous la férule des « barbus ». En effet, ce n’est pas la première fois que l’on déplore des attaques de cette nature. Et à chaque fois, elles ne manquent pas d’atteindre leurs objectifs. Quand ce ne sont pas des attaques de prison où sont internés des djihadistes, ce sont des casernes militaires qui sont pilonnées par les « barbus » et ce, quel que soit l’endroit où elles sont implantées. Et que dire des mines qui sont enfouies ici et là au Nord-Mali et qui sèment la désolation et le deuil, chaque jour que Dieu fait ? Bref, l’insécurité généralisée est devenue le lot commun des Maliens. Face à cela, l’Armée malienne semble capituler. Et les pays amis du Mali, en l’occurrence la France, qui ont dépêché leurs fils pour aider à éteindre le brasier, commencent à montrer des signes d’agacement. Il est donc devenu impératif que tous les protagonistes de la crise malienne en prennent conscience, de sorte à aider les bonnes volontés à les aider. Cela passe par un sursaut patriotique des uns et des autres. Autrement, la guerre au Nord-Mali court le risque de basculer dans le répertoire des guerres oubliées. La guerre de la Somalie en est une. Nul ne doit souhaiter que les choses se gâtent davantage au Mali au point de prendre une telle tournure.

« Le Pays »
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