L’affaire visant la présidente d’honneur du Cadre de concertation national des organisations de la société civile (CCNOSC), Safiatou Lopez, pour «appel à incendie» du Tribunal de grande instance de Ouagadougou a été appelée à la barre hier 5 décembre 2016. Plaignants et prévenue étaient bel et bien représentés, mais le dossier n’a pas fait l’objet de débats sur le fond. Il a été renvoyé au 16 janvier 2017 dans l’attente d’une décision du premier président de la Cour d’appel relative à une requête de récusation des juges, formulée par la partie attaquée.
A l’appel du dossier, Me Ambroise Farama, conseil de Safiatou Lopez, a présenté au tribunal une copie de la requête de récusation des juges qu’il a introduite auprès du premier président de la Cour d’Appel de Ouagadougou.
«C’est une procédure qui permet à un justiciable, lorsqu’il doit comparaître devant un juge et s’il n’est pas sûr de l’impartialité de ce dernier, de demander au président de le remplacer», explique Me Ambroise Farama.
En évoquant les raisons de l’introduction de cette requête, l’avocat affirme que l’assignation en justice est l’œuvre des trois structures syndicales de magistrats, à savoir le Syndicat burkinabè des magistrats, le Syndicat des magistrats burkinabè et le Syndicat autonome des magistrats du Burkina.
«Ce sont eux qui ont porté plainte contre Safiatou Lopez pour des propos qu’elle aurait tenus et qu’ils considèrent comme remettant en cause leur indépendance. En plus, ils comparaissent au tribunal en tant que partie civile, ce qui veut dire qu’ils vont défendre leurs intérêts. Nous avons donc estimé qu’à partir du moment où il est avéré qu’un juge est membre ou sympathisant d’un de ces syndicats, celui-ci ne peut plus connaître du dossier parce qu’il va chercher à rendre une décision favorable à la structure à laquelle il appartient», argue-t-il.
Ce motif est qualifié de «suspicion de partialité des juges» et, selon Me Farama, ce n’est pas une manière de fuir les débats, mais d’informer les juges de l’existence de la requête.
Il prendrait acte si le dossier était retenu mais croit que si la partie attaquée ne voulait pas d’un débat de fond, elle n’allait pas se présenter au tribunal. La première concernée dans cette affaire se dit sereine et fait remarquer que presque la totalité des magistrats font partie des trois structures syndicales alors qu’ils ne peuvent être juges et parties à la fois.
Pour sa part, le juge Moriba Traoré, secrétaire général du SBM, dit n’avoir pas vu le contenu de la requête pour cerner la justesse ou non des arguments avancés, mais pense tout de même que le juge est obligé d’en tenir compte. Il précise aussi être en droit de penser que la procédure de «suspicion de partialité» a été faite dans le sens du dilatoire.
Lui et les autres plaignants fondaient l’espoir que le dossier serait retenu et jugé au lieu d’être renvoyé au 16 janvier 2017 en attendant la décision du premier président de la Cour d’appel, comme en a décidé le tribunal.
Aboubacar Dermé