Le 22 novembre 2016, nous avons fait un tour au Centre médical avec antenne chirurgicale (CMA) et aux CSPS de Nouna, pour constater le niveau de suivi du mot d’ordre de grève du Syndicat national des travailleurs de la santé humaine et animale prévue pour 3 jours, soit du 22 au 24 novembre. Voici le constat que nous avons pu faire.
Il était 10h environ lorsque nous arrivions au Centre médical avec antenne chirurgicale (CMA) de Nouna. L’ambiance n’était pas celle des jours ordinaires. Pour cause, le personnel soignant était absent dans presque toutes les unités de soins. Nous avons trouvé sur les lieux des malades recroquevillés avec un regard hagard. Seule une infirmière, Bible en main, assise, la tête basse, nous observe d’un air méfiant. Les sages-femmes et les maïeuticiens ont déserté les lieux depuis minuit. « Tout ou presque est fermé ici aujourd’hui », a renchéri une patiente au service de la maternité.
Un rapide tour aux urgences, le constat est amer. Les malades vautrés sur les lits sont laissés à leur triste sort. Nous avons jeté un coup d’œil dans la salle de consultation où nous avons aperçu quatre prestataires de santé, certainement, des stagiaires et des appelés du SND. L’un d’entre eux nous signifie qu’ils sont sur le point de partir. « Notre mission, c’est de montrer aux malades qui veulent rentrer comment prendre les médicaments. D’aucuns sont déjà partis », a-t-il dit. Et El Hadji Zakaria Welgo de relever que son enfant qui était aux urgences, a été libéré sur rendez-vous. Une accompagnante trouvée sur les lieux nous relate que même au temps de Blaise Compaoré, une telle grève sans service minimum n’a pas été observée. Elle invite les autorités au sens de l’écoute et au dialogue, afin qu’une telle situation ne se reproduise plus, étant donné que les populations sont les victimes collatérales. L’unité
Dermato-lèpre, l’Ophtalmo, le service de l’Odonto, la Psychiatrie, la Chirurgie et le service de laboratoire ont été désertés par le personnel soignant. Il ne restait plus que des agents du Centre de recherche en santé de Nouna qui assuraient le service minimum. Nous avons rencontré le Dr Abdoul Aziz Ouédraogo qui était au four et au moulin, pour parer à un éventuel cas qui surviendrait. Déjà, il a redéployé le personnel en SND et au stage probatoire pour limiter les dégâts. Une femme enceinte venait d’accoucher à la maternité avec l’aide de ces agents temporaires.
De l’hôpital, nous avons touché du doigt les réalités aux CSPS communaux 1 et 2 de la ville de Nouna qui étaient fermés.
De là, nous mettons le cap sur le lieu du piquet de grève. C’est une ambiance collégiale rythmée par un documentaire audio de Thomas Sankara, qui y régnait. Des travailleurs frustrés, très remontés et déterminés à aller jusqu’au bout.
Repartis en sous-groupes, d’aucuns s’adonnaient aux jeux de société. Cependant, le SG Oumarou Willi était constamment au téléphone, certainement des appels intempestifs du MCD, Abdoul Aziz Ouédraogo, qui négocierait l’instauration d’un service minimum dans certaines unités très sensibles. Ainsi, pour dire que le rapport des forces a changé de camp.
Entre-temps le SG est devenu disponible. « Nous luttons pour l’amélioration de nos conditions de vie et de travail, dans la mesure où le sourire de l’agent de santé est le premier remède du malade », a-t-il affirmé. Avant d’ajouter : « Nous avons mandaté des agents de surveillance sur le terrain qui nous ont communiqué un bilan éloquent du suivi de cette grève sur toute l’étendue du territoire provincial. Les CSPS sont fermés, et les points d’achoppement sont, entre autres, la prise en charge gratuite des soins de santé des agents, de leurs conjoints, leurs ascendants et descendants directs, des indemnités de risque et de garde et la révision de la loi 033 qui régit les établissements de santé. »
Les conditions de vie et de travail des agents, l’affaire CAMEG, la disponibilité des produits de première nécessité et des matériels médicaux, font aussi partie de la plateforme du syndicat. « Il nous manque jusqu’aux gants stériles. Le personnel est débordé par la gratuité des soins. Nous sommes toujours ouverts au dialogue. Seulement, c’est le mépris des autorités qui nous pousse à aller jusqu’à ce point et malheureusement ce sont les populations qui en pâtissent. Si elles peuvent jouer l’intermédiaire pour que les autorités nous entendent, ça sera pour nous un soulagement », a conclu le SG Willi.
Madi KEBRE
Légende :
1- Une vue du service ophtalmologique fermé
2- Une vue des grévistes sur le lieu du piquet de grève
Madi KEBRE, Correspondant