Le parti majoritaire avec la qualité et la quantité de cadres qu’on lui connait pouvait-il passer l’étape de la désignation de ses candidats à la députation sans querelles de leadership ni « guerres de clans » ?
C’était mission impossible vu les chocs des ambitions mis à nu par les primaires au sein de ce parti. Et si les élections législatives et municipales des années passées nous avaient donné de voir des rivalités similaires au CDP, les échéances présentes auront fait monter davantage la dose d’adrénaline dans les structures de base.
On a alors assisté à des marches et à une contre marche dans trois provinces du pays pour dénoncer ou soutenir des candidatures. Du jamais vu depuis la création du parti, surtout que la contre marche à Tougan dans le Sourou, circonscription électorale de la député démissionnaire, il y a eu des violences inadmissibles.
Ces remue-ménages laissaient entrevoir des lézardes dans les rangs du CDP avec la question lancinante de savoir jusqu’ou iraient ces querelles. Eh bien, la député Saran Sérémé, seule pour l’instant, a franchi le rubicond d’une démission-spectacle qui, toute analyse faite, est un non événement. Un non événement parce que ce n’est pas une première au CDP que les frustrations mal contenues consécutives à la désignation des candidats à la députation aboutissent à des départs fracassants du parti majoritaire.
De fait, on se souvient comme si c’était hier des récriminations des Obkiri Marc Yao, Moussa Boly, Pierre Tapsoba et autre Emile Kaboré, à propos de leur positionnement sur les listes de candidatures aux législatives de 2007. Se prévalant de leurs expériences politiques, de leur militantisme désintéressé, de leur grande contribution à l’implantation et aux victoires électorales du parti, ils s’estimaient eux- aussi mal récompensés de leur dévouement.
Sûrs de leurs assises politiques ils ont, pour reprendre la formule énigmatique de la démissionnaire du jour, quitté un parti, le CDP, sans abdiquer ni abandonner la lutte. Pourtant le parti qu’ils ont crée dans cette lancée, par orgueil et désir de revanche, cinq ans après, reste atome et aphone. Et cela relèvera du miracle si la Convention Nationale des Progressistes burkinabè (CNPB) le parti en question, a un élu député au sortir du scrutin à venir.
Madame Saran Sérémé aurait dû tirer leçon de cette rupture de banc avec le CDP, peut fructueux pour Moussa Boly et compagnie avant de prendre une décision risquée pour la suite de sa carrière politique.
Ce qui est en cause, ce n’est pas son dynamisme de battante politique. Ce qui est en cause c’est sa capacité à prendre des coups, même les plus immérités et à rester fidèle à ces premiers amours politiques.
L’empressement avec lequel elle voudrait se refaire une virginité politique, les glorioles qu’elle s’auto décerne, les allusions mal dissimulées sur sa jeunesse et son genre, révèlent une personnalité fragile, une militante désabusée, une femme peu modeste.
La distribution de sa lettre de démission à la presse est symptomatique à la fois de cette tendance à sa propre victimisation et de ce péché d’orgueil qui pousse à dire : « je suis moi et je suis meilleur que les autres. » Or « le moi, est haïssable » disent les philosophes.
Ceci est d’autant plus vrai que bien d’autres candidats du CDP plébiscités par leur base, se sont vus à l’arrivée relégués en seconde position, voir la liste des suppléants, bien que membre du secrétariat exécutif national. Suivez notre regard au Kadiogo. Toute chose qui aurait pu pousser Mme Sérémé à une réaction plus mesurée et plus mature.
Si la vie est un combat, la vie militante, qui plus est pour une femme au Burkina, l’est encore plus. Et ce combat, il faut savoir la mener pour ne pas se tromper d’adversaires. Dans le cas d’espèce, l’honorable député que nous respectons pour sa militante disponibilité, n’est-elle pas la présidente du Cacus genre à l’Assemblée nationale, par sa démission, donne à voir qu’elle se trompe de cible.
La lutte qu’elle ne veut pas abandonner, elle aurait eu plus de mérite à la poursuivre au sein du CDP pour faire bouger au sein des structures de base et à la direction du parti, ces lignes à géométrie variable qu’elle indexe.
En effet, de dehors on voit difficilement comment elle peut impulser « le changement de comportement et de mentalité » qu’elle espère pour un Burkina émergent. Bref ! Cette démission-spectacle, si elle n’a pas été décidée sur un coup de tête, elle y ressemble un peu.
Et le gâchis de l’engagement militant de cette dame sera plus grand si après avoir rompu avec le CDP, elle se faisait avaler par l’inertie de ces multitudes partis d’opposition qui n’ont pas les moyens de leurs ambitions politiques. Qui vivra verra !