Des tisserands s’adonnent à la confection de meubles à Bobo-Dioulasso. Des chaises, des fauteuils, des lits picots et bien d’autres objets sortent des doigts de ces hommes, qui demandent un accompagnement pour la promotion de leur activité.
Assis dans un angle de la rue…, Urbain Sanou démêle des fils de couleurs différentes. A ses côtés, il y a des chaises et un lit picot. Ces meubles sont le fruit de sa création. Bientôt, une autre chaise va sortir de ses mains, affirme-t-il. En effet, le travail consiste, explique-t-il, à tisser le fil sur un cadre métallique. Ce métier, Urbain Sanou dit l’avoir appris au Ghana en 1996. Cela fait donc 20 ans, que M. Sanou confectionne des meubles. « Le fil que j’utilise provient du Ghana. En plus des chaises, je fais des fauteuils rembourrés », une façon pour lui de prouver son expertise dans le domaine. « Je prends deux heures pour une chaise, et donc je peux tisser six chaises par jour. Quant aux lits picots, je peux en confectionner deux par jour ». Chez lui, une chaise coûte 8 500 FCFA. Un ensemble de fauteuils rembourrés accompagnés de guéridon peut atteindre 150 000 F CFA. Pour le lit picot une place, le client doit débourser 22 500 F CFA. A en croire Urbain Sanou, cette activité nourrit son homme. « J’arrive à m’occuper de ma famille avec le gain obtenu par ce travail. Quand le marché est acceptable, je peux avoir 25 000 F CFA à 60 000 FCFA par jour», soutient l’artisan avec sourire. Pour conserver pendant longtemps ces chaises et lits picots après tissage, Urbain Sanou conseille de les préserver du soleil. « Une chaise bien entretenue peut atteindre six ans et plus, ainsi que le lit picot, si celui-ci est confectionné avec du bon fer », affirme-t-il. M. Sanou travaille sur commande. C’est d’ailleurs ce que Rosalie Kam, une cliente, est venue faire. « La qualité des meubles est très bien. La décoration me plait énormément. En plus, on peut choisir la couleur que l’on veut », a-t-elle laissé entendre avant d’ajouter notamment : « J’aime consommer burkinabé, voilà pourquoi je préfère ces produits».
Des matières premières venues de Côte d’Ivoire
Dans cette activité, d’autres tisserands comme Amidou Nikiéma alias Nixon, se servent de fibre naturelle. Chez lui, le bambou et la fibre de liane sont les matières premières. Dans son atelier situé à proximité du Lycée Ouezzin Coulibaly, ses meubles ne passent pas inaperçus. Mais Amidou Nikiéma déplore la morosité du marché, lui qui est installé depuis 2002 à Bobo-Dioulasso. « Le marché n’est pas stable. J’arrive à subvenir aux besoins de sa famille, y compris la scolarité de mes enfants. Parfois, on peut vendre des meubles à 100 000 F CFA au cours d’une journée», dit-il. La chaise coûte 20 000 F CFA et l’ensemble du salon accompagné du guéridon 250 000 F CFA. « Pour confectionner une chaise nous prenons une journée entière, et deux semaines pour faire les fauteuils rembourrés », précise-t-il. Et de souligner qu’une chaise en bambou a une très longue durée : « Si on l’entretient bien, elle peut atteindre 30 à 40 ans ». Selon Amidou Nikiéma, le métier tisserand de bambou souffre de l’absence de la matière première au Burkina Faso. Les matériaux quittent la Côte d’Ivoire, ce qui explique la cherté des produits. «Souvent, on peut commander le matériel et ça va mettre plusieurs semaines à la gare de train d’Abidjan. Et parfois la marchandise, au lieu qu’on la descende à Bobo-Dioulasso, continue à Ouagadougou avant de revenir à Bobo-Dioulasso, et par conséquent, ça arrive déjà sec », fulmine l’artisan, avant de conclure que « dans ces conditions, on ne peut pas travailler ». La conséquence, c’est que le chiffre d’affaires prend un coup, parce que explique-t-il, une fois la matière première abîmée, il ne bénéficie pas de dédommagement. « Actuellement même, j’ai commandé du matériel et depuis deux semaines, on dit que les rails ont cédé et donc, le matériel est toujours à Dimbokro. Peut-être que d’ici que ça arrive, il serait abîmé et c’est nous qui allons endosser les conséquences », déplore Amidou Nikiéma visiblement déçu de cette situation. Outre les difficultés d’approvisionnement, l’artisan s’offusque de ce que l’activité qu’il mène au Burkina Faso manque de promotion. « Durant mes 14 ans au Burkina Faso, c’est la première fois que la presse s’intéresse à ce que je fais », décrie-t-il. Par ailleurs, il déplore le non encadrement des artisans par le gouvernement. « Si cet art n’avance pas, c’est dû au fait qu’il est mal encadré. En plus, les Burkinabè consomment peu les produits locaux », avance-t-il, avant d’inviter tous les acteurs à s’impliquer dans la promotion de l’artisanat au Burkina Faso. Malgré les difficultés que rencontre Amidou Nikiéma, certains clients apprécient son travail. C’est le cas de Perma Sourabié, un des fidèles clients qui en est à l’achat de ses troisièmes fauteuils rembourrés. Il dit préférer ces chaises qu’il juge résistantes et de bonne qualité. En plus, M. Sourabié déclare sa préférence pour ces fauteuils faits à base de produits locaux qui lui rappellent le village, son univers. « Comme je suis né au village, je suis attaché au bambou », affirme-t-il. Concernant le prix, M. Sourabié déclare : « On ne peut pas le juger car l’art n’a pas de prix ». Perma Sourabié également invite les Burkinabè à consommer les produits locaux, car ils peuvent, de son avis, contribuer au développement du pays.
Dofinihan Rachelle BAYE
(Stagiaire)