Dans le cadre de la mise en œuvre de son programme de renforcement des capacités des journalistes sur la couverture médiatique des activités parlementaires dénommé CEPPS, l’ONG Internews a organisé les 22 et 24 octobre 2016 à Ouagadougou, deux rencontres avec des spécialistes sur le budget programme et la légistique. Il s’agit de Abdoul Rachid Soulama, Directeur général du budget programme et Mélégué Traoré, ancien président de l’Assemblée nationale.
Quel régime faut-il au Burkina post-insurrection ? Parlementaire ou présidentiel ? Ces questions, beaucoup de citoyens se la posent sans pour autant chercher à comprendre les notions de régimes présidentiel et parlementaire, alors que chaque pays du monde fonctionne sous un régime politique. Il peut être présidentiel, semi-présidentiel, parlementaire ou encore monarchique. Mais pour Mélégué Traoré, ancien président de l’Assemblée nationale, spécialiste des questions parlementaires, qui a échangé avec les journalistes le 24 octobre dernier sur la légistique, le « régime présidentiel est mieux » pour le Burkina post-insurrection. Dans ce type de régime, a-t-il expliqué, les pouvoirs sont concentrés dans les mains du chef de l’Etat et les ministres sont considérés comme des secrétaires. A en croire l’ancien président de l’Assemble nationale, avec ce type de régime qui consacre la séparation et l’équilibre des pouvoirs (NDLR : Exécutif, Législatif et Judiciaire), il n’y a pas de poste de Premier ministre, mais celui de vice-président. L’une des caractéristiques juridiques de ce type de régime, est aussi que le chef de l’Etat ne peut pas dissoudre l’Assemblée nationale et le parlement ne peut pas non plus dissoudre le gouvernement, encore moins voter une motion de censure à l’encontre du président de la République, foi de M. Traoré. A titre d’exemple, il a cité le Bénin et le Togo comme pays d’Afrique de l’Ouest qui sont sous le régime présidentiel. Contrairement au régime présidentiel qui accorde énormément de pouvoirs au chef de l’Etat, le régime parlementaire consacre, a laissé entendre l’ancien ambassadeur Mélégué Traoré, un pouvoir du parlement sur le gouvernement, car le parlement peut renverser le Premier ministre et son gouvernement et le chef de l’Etat peut dissoudre l’Assemblée nationale. A l’entendre, le Burkina Faso est à cheval entre les deux régimes, c’est-à-dire semi-présidentiel et semi-parlementaire. Mais Le Cap-Vert est sous un régime parlementaire comme l’Ile Maurice. Le Swaziland et le Maroc sont, quant à eux, sous un régime monarchique. L’ancien élu national de la province de la Léraba s’est aussi entretenu avec les journalistes sur la procédure législative, c’est-à-dire comment les lois sont peaufinées avant leur introduction à l’Assemblée nationale.
95% des lois votées à l’Assemblée nationale émanent du gouvernement
Pour l’ancien ministre en charge des Enseignements secondaires, toute loi doit répondre à des normes définies par la légistique encore appelée science de l’écriture de la loi. Cette science, a-t-il fait savoir, est décomposée en légistique formelle consacrée à la rédaction des textes de lois et en légistique matérielle portant sur les conditions à réunir en vue de l’atteinte des objectifs pour lesquels la loi a été élaborée. De ses explications, les projets de lois votés à l’Assemblée nationale émanent généralement du Président du Faso, des députés individuellement et du gouvernement. « Le ministre ou les groupes parlementaires n’ont pas la compétence de proposer une loi », a-t-il précisé, avant de renchérir que 95% des lois votées à l’Assemblée nationale émanent du gouvernement. Dans le contexte du Burkina, a-t-il expliqué, même si un député propose une loi, celle-ci est soumise à un débat pour amendement en Conseil des ministres, avant d’être introduite à l’Assemblée nationale. Quand une loi est votée, elle passe au Secrétariat du gouvernement avant d’être transmise au Président du Faso qui l’examine pour promulgation, a notifié M. Traoré. Les lois ne peuvent entrer en vigueur que lorsqu’elles sont publiées dans le journal officiel, 8 jours après. Toutefois, il a fait savoir que la loi doit tenir compte de l’environnement et du contexte dans lequel elle a été initiée. Et les députés ont la lourde mission, a-t-il estimé, de procéder à la vérification de la mise en œuvre de la loi ou à l’explication de celle-ci aux populations à la base.
Quid du budget-programme ?
Mais bien avant l’ancien président de l’Assemblée nationale, Mélégué Traoré, le Directeur général du budget-programme, Abdoul Rachid Soulama, s’est entretenu avec les journalistes, le 22 octobre dernier, sur le contenu du budget-programme. Accompagné du Conseiller technique du ministre en charge du budget, Lassané Ouédraogo, il a expliqué que le Budget- programme est le moyen pour atteindre un objectif. « C’est en 1997 que l’idée du budget-programme est née. Il est appelé budget-programme, parce qu’il est conçu sur la base d’un programme qui se décline en plans, en actions et en activités visant à atteindre un certain nombre d’objectifs au profit des populations», a-t-il précisé. Pour lui, le budget-programme est conçu pour 3 ans et est renouvelé annuellement par l’Assemblée nationale. Contrairement à l’ancien budget appelé budget-objet qui avait pour finalité la dépense ou l’absorption des fonds alloués sans se soucier de l’atteinte des objectifs fixés, le budget-programme se définit en français clair, selon M. Soulama, comme ce qu’il faut dépenser pour atteindre un objectif. Comme innovations majeures de ce nouveau mécanisme de dépenses publiques, chaque ministre, a-t-il laissé entendre, sera ordonnateur de dépenses de son département, contrairement à l’ancien budget où le ministre en charge de l’Economie et des finances constitue le seul ordonnateur des dépenses publiques. L’autre innovation majeure et pas des moindres du budget-programme, est que celui-ci permettra d’en finir avec les problèmes liés aux procédures de décaissement de fonds, qui étaient jugées lentes. Comme pays qui ont déjà expérimenté le budget-programme, il a cité entre autres, la France et certains pays d’Afrique centrale comme le Gabon et le Cameroun.
Mamouda TANKOANO