Le Burkina Faso a mis en place un système de prise en charge des malades selon lequel tout patient a l’obligation de s’adresser d’abord à la structure de santé de base, quitte à cette dernière de le référer à la structure immédiatement supérieure. Il faut rappeler que le système de santé du pays des Hommes intègres est organisé ainsi qu’il suit : au début de la chaîne, il y a les CSPS (Centre de santé et de promotion sociale). Au-dessus de ce palier, se trouve le CMA (Centre médical avec antenne chirurgicale). Immédiatement après ce niveau, se positionnent les CHR (Centre hospitalier régional). Au sommet de la chaîne se trouvent les CHU (Centre hospitalier universitaire). Le mode de fonctionnement de cette chaîne est très strict. Nul ne peut par exemple se faire prendre en charge par un CHU sans y être référé par une structure inférieure. La logique de cette procédure répond, dit-on, au souci d’éviter l’encombrement au niveau notamment des CHR et des CHU. L’on peut comprendre cette logique. En effet, si ces deux structures au nombre très réduit devaient prendre en charge tous les patients et ce, quel que soit le mal dont ils souffrent, nul doute qu’elles seraient totalement débordées au point que les agents qui y travaillent seraient dans une situation où ils ne seraient pas en mesure de poser le moindre acte médical. Déjà, ces structures ont du mal à faire face aux flux des malades qui se présentent à elles. Mais cette façon pyramidale, peut-on dire, de prendre en charge les malades, présente des inconvénients. Au nombre de ceux-ci, l’on peut évoquer les cas suivants. Le premier est lorsqu’un malade en souffrance s’adresse à un CSPS dans l’espoir que son mal trouvera solution. Il court le risque de faire le pied de grue devant la porte de la consultation. Si l’agent de santé estime que son cas mérite qu’il soit référé à un maillon supérieur, il lui revient de le faire en lui délivrant un acte dûment signé à cet effet. Dès lors, commence un véritable chemin de croix pour le malade.
La première préoccupation des malades, c’est de frapper à la porte la plus proche pour se soigner
Avec l’état piteux dans lequel se trouvent nos routes et pistes, il a tout le temps de rendre l’âme avant d’accéder à la structure de santé à laquelle il a été référé. Et ils sont nombreux les malades qui ont vécu cette situation. C’est le cas, par exemple, de cet enfant qui souffrait atrocement d’une maladie respiratoire. Le long temps mis par le CSPS pour l’examiner avant de se rendre compte que sa situation exigeait qu’il soit référé, a contribué à compliquer davantage sa prise en charge ultérieure. Une autre insuffisance de ce système est le scénario où un malade souffrant énormément, se présente, par exemple, à un CHR, pour s’entendre dire qu’il a l’obligation de passer d’abord par un CMA. C’est seulement à ce niveau que l’on peut prendre la décision de le référer à un CHR. Et là où l’on peut tomber des nues, c’est quand le CHR se trouve à un jet de pierre du lieu d’habitation du patient pendant que le CMA auquel il doit s’adresser se trouve à l’autre bout du monde. Le bon sens voudrait donc que le système de « réfèrement » des malades soit repensé de manière à faciliter l’accès aux soins des malades dans les meilleurs délais, surtout lorsque ces derniers sont dans une situation d’urgence. Si pour les maladies bénignes, l’on peut comprendre que l’on fasse l’obligation aux patients de s’adresser à la structure de santé de base pour se faire consulter, il est par contre inhumain de loger à la même enseigne les cas les plus urgents. Car dans cette situation, la première préoccupation des malades, et c’est humain, c’est d’abord de frapper à la porte la plus proche pour se soigner. Il faut absolument revoir la procédure de sorte à ne pas permettre que le système de « réfèrement » rigide mis en place, s’apparente à un long processus de mise à mort programmée des malades. Au nombre toujours des insuffisances de notre système de santé, l’on peut évoquer également l’absence notoire de couveuses pour les bébés prématurés, dans bien de nos maternités. La situation est surtout très prononcée dans les structures de santé de l’intérieur du pays. Même dans les structures de référence des deux grandes villes du pays, la situation est loin d’être reluisante. Imaginez dans ces conditions, le supplice que peut vivre une parturiente dont le bébé est dans cette situation. L’on peut rétorquer que l’Etat fait ce qu’il peut et que le problème est lié à un manque de moyens. Cette explication n’est pas dénuée de sens. Mais il faut avoir le courage de reconnaître que dans bien des cas, l’on pourrait pointer du doigt le manque d’organisation et de volonté politique.
Sidzabda