Le bras de fer entre le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, et son adversaire, Jean Ping, est loin d’être terminé. Car, le candidat malheureux ne s’avoue toujours pas vaincu. Refusant d’accepter ce que d’aucuns considèrent comme un fait accompli, Jean Ping affûte ses armes et affine sa stratégie. En effet, après la journée de recueillement organisée le 6 octobre dernier et qui a été diversement appréciée, l’ex-président de la Commission de l’Union africaine (UA) entend organiser la résistance au régime Bongo. Comment compte-t-il s’y prendre ? Tout d’abord, Jean Ping demande des sanctions internationales ciblées contre dix dignitaires gabonais dont le président Ali Bongo et un de ses frères, la présidente de la Cour constitutionnelle, le président de la Commission nationale autonome permanente et plusieurs ministres, notamment de la Communication, de l’Intérieur et de la Défense. Quant à la diaspora gabonaise, Jean Ping lui demande une chose : coordonner et discipliner son action à travers une structure qui sera baptisée Conseil gabonais de la résistance. Et ce n’est pas tout. Il appelle ses compatriotes de l’ étranger à « mutualiser les contacts, sensibiliser et mobiliser en faveur de sa cause à travers les instances politiques des différents pays étrangers, mais également la Commission et le Parlement européens, le Parlement allemand, le Congrès Américain et la Cour pénale internationale ». Pour les faits d’arrestations arbitraires, d’exactions ou d’assassinats, celui qui se considère comme le président élu du Gabon, entend saisir incessamment Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits de l’Homme. S’agit-il là d’une mission funambulesque ? Telle est la question que l’on ne peut s’empêcher de se poser, tant le combat que compte engager Jean Ping promet d’être de longue haleine. Certes, l’homme fait preuve d’imagination, mais tout porte à croire qu’il prêche dans le désert. Le vin est tiré, il faut le boire. Car, on imagine mal Ali Bongo, déjà investi, reculer face à des sanctions internationales.
On attend de voir si le camp de Ping saura résister à l’usure du temps
Aussi, en inscrivant son combat dans la durée, Jean Ping oublie que ses partisans, ou du moins ceux qui croient encore en lui, courent le risque de se laisser gagner par la lassitude. Car, les hommes sont ainsi faits, qu’ils sont versatiles. On a vu des gens défendre une cause le matin, et le soir venu, tourner casaque, laissant perplexe l’opinion. Les exemples sont si légion que l’on ne se risquera pas à vouloir les citer exhaustivement. Mais le cas le plus emblématique a été celui de l’opposant burundais, Agathon Rwasa, qui, au départ, était vent debout contre le président Pierre Nkurunziza et qui, par la force des intérêts, en est devenu aujourd’hui un obligé, en acceptant de composer avec un régime aux abois. Certes, ce qui est possible sur les collines de Bujumbura ne l’est pas forcément à Libreville, mais les hommes politiques, de Kabarundo au Rwanda à Namponkoré au Burkina Faso, en passant par Midran en Afrique du Sud et Nzérékoré en Guinée Conakry, ont une caractéristique commune : l’ingratitude. En tout cas, on attend de voir si le camp de Ping qui est resté jusque-là soudé et uni, saura résister à l’usure du temps. Mais une chose est certaine : il ne faut pas compter sur la Communauté internationale pour faire changer le cours des événements au Gabon. Car, comme on le sait, les positions des grandes puissances évoluent selon leurs intérêts. Et c’est peu dire.
Boundi OUOBA