A l’issue d’une mission de quatre jours à Washington, aux Etats-Unis, à la recherche de financements pour le Plan national de développement économique et social (PNDES), le Premier ministre, Paul KabaThiéba, tire un bilan « très satisfaisant ». Les raisons !
Sidwaya (S.): La mission que vous venez de boucler à Washington a-t-elle été utile ?
Paul KabaThiéba (P.K.T) : Nous sommes venus ici pour discuter avec nos partenaires du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale sur les relations bilatérales entre le Burkina Faso et ces deux institutions de BrettonWoods. Nous avons rencontré la Directrice générale du FMI,dans la matinée du mardi 4 octobre 2016, et cela s’est très bien passé. Dans la répartition des rôles, le FMI surveille un peu les cadres macro-économiques des Etats. Il était important que le Fonds apporte son appui à la viabilité macro-économique du PNDES (NDLR : Plan national de développement économique et social). C’est ce qui a été fait. Nous nous sommes parlé franchement et le FMI s’est engagé à nous accompagner et à faire le plaidoyer auprès d’autres partenaires techniques et financiers. C’est une très bonne nouvelle pour le Burkina Faso.Dans l’après-midi, nous avons rencontré le président de la Banque mondiale. Là aussi, nous avons eu des échanges très amicaux. Comme vous le savez déjà, la Banque mondiale a accepté d’organiser avec nous la table ronde des bailleurs de fonds pour le financement du PNDES. Les discussions ont été fructueuses, puisque la Banque mondiale a affirmé un engagement très fort à accompagner le Burkina Faso, à porter le PNDES, non seulement à son sein, mais aussi auprès des PTF. C’est encore là une crédibilité accrue pour le PNDES. Aussi, la Banque mondiale a promis nous apporter son soutien pour relever les défis énergétiques auxquels nous faisons face. Elle a accepté de nous aider à régler le gap énergétique du pays, mais aussi soutenir notre politique de mixte-énergétique. De façon générale, nous pouvons affirmer que le cadre macro-économique qui est projeté à travers le PNDES, et qui va soutenir le quinquennat du président du Faso, a été jugé crédible par nos partenaires. La caution de ces deux institutions de BrettonWoods de notre référentiel de développement est majeure, et constitue une grande victoire pour le Burkina Faso. Donc, nous repartons confiants. Je regarde l’avenir avec beaucoup plus d’optimisme, en termes de notre capacité à obtenir des financements au profit du PNDES. J’ai vu que nos partenaires ont confiance au gouvernement en place, en ses capacités à entreprendre et à mettre en œuvre les réformes annoncées. La mission a été utile.
S. : Vous avez aussi échangé avec des responsables d’institutions spécialisées du Groupe de la Banque mondiale. En quoi ces échanges étaient-ils nécessaires ?
P.K.T : Effectivement, il s’agit de la Société financière internationale (SFI) et l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA, en anglais). La SFI est la structure au niveau de la Banque mondiale qui s’occupe du financement du secteur privé. Nous y avons obtenu l’engagement personnel de son président à supporter le Burkina Faso dans ses efforts de développement, par un appui à la promotion du secteur privé. La SFI a indiqué qu’il serait bon que l’ensemble des institutions financières (FMI, BM) travaille dans une synergie d’action pour accompagner le Burkina Faso. La MIGA, quant à elle, est une structure qui apporte son assurance, une sorte de garantie pour les investisseurs qui veulent intervenir dans les pays en voie de développement. Là également, la rencontre a été fructueuse et l’Agence a décidé de renforcer sa coopération avec le Burkina Faso. Si la MIGA s’engage, ça crédibilise davantage les projets d’investissement.
S. : Il a également été question, au cours de votre séjour, des chances pour le Burkina Faso, de bénéficier d’un autre programme du Millennium challenge corporation (MCC). L’espoir est-il permis?
P.K.T : Vous savez que l’année dernière (2015), le Burkina Faso n’a pas été élu au MCC. Depuis son élection à la magistrature suprême, le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, ne cesse de se battre pour que le pays puisse obtenir un autre compact. Lorsque nous avons échangé avec les responsables du MCC, il est ressorti que notre pays est bien placé pour être bénéficiaire d’un nouveau programme. Nous espérons beaucoup que cela va aboutir, pour pouvoir réaliser des investissements structurants, à savoir, les routes. Nous aurons la réponse avant la fin de cette année 2016.
S. : Vous avez reçu en audience de nombreux investisseurs potentiels. Y a-t-il eu du concret ?
P.K.T : Nous avons reçu des responsables de plusieurs fonds d’investissement, des industriels qui veulent investir au Burkina Faso. Dans la perspective des préparatifs de la table ronde, nous cherchons à mobiliser non seulement les investisseurs du secteur public, mais aussi ceux du privé. C’est pourquoi, nous avons estimé bon de présenter, à ceux que nous avons reçus, les opportunités du PNDES. A titre d’exemple, nous avons rencontré le président de la Banque africaine d’import-export, basée en Egypte, avec pour objectif de financer le commerce interafricain. Les responsables de cette banque ont décidé de faire le déplacement du Burkina Faso pour évaluer les projets d’investissements en matière d’infrastructures. Nous avons discuté aussi avec une délégation de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) qui s’est engagée à financer le PNDES, à participer à la table ronde et à mobiliser l’ensemble des Partenaires techniques et financiers (PTF) du Golfe autour de notre Plan. Le DG de la BADEA a promis venir nous voir avant la rencontre de Paris, prévue pour les 7 et 8 décembre 2016, pour que nous puissions échanger dans un cadre bilatéral, sur les portefeuilles des projets du PNDES, afin de voir ceux que la BADEA pourra financer. Nous avons, par ailleurs, parlé avec la Société islamique pour le développement du secteur privé (ICD), une filiale de la Banque islamique de développement (BID). Le DG de cette structure qui s’occupe du financement du secteur privé, a manifesté sa volonté de soutenir le PNDES. Il a annoncé qu’il viendra au Burkina Faso. Il est engagé à financer les investissements sociaux, notamment à l’université et dans les hôpitaux, à faciliter les partenariats publics-privés, et à financer les programmes énergétiques. Il a pris l’engagement de travailler avec nous pour monter des Sukuk (ndlr : des obligations islamiques, une alternative à l’obligation classique qui est illicite en islam et ici il n’y a pas vraiment de taux d’intérêt).Cela va créer de nouvelles ouvertures pour le Burkina Faso pour le financement de son développement.
Parmi nos audienciers, il y a eu, en outre, les dirigeants d’une société américaine avec laquelle le Burkina a acheté des dispositifs de confection de maisons préfabriquées dans le but de construire rapidement des écoles et des centres de santé. Ce projet est en léthargie depuis quelques temps. Les équipements, qui nous ont coûté plus de 8 milliards de F CFA, sont à Ouagadougou dans des entrepôts. Grâce à la rencontre que nous avons eue avec le DG de cette société, nous allons pouvoir remettre ce projet au goût du jour. Nous verrons comment les préfabriqués pourront s’inscrire dans notre stratégie d’élimination des classes sous paillottes et d’érection de centres de santé dans toutes les localités du pays.
S. : L’un des temps forts de votre séjour a été le face à face avec les Burkinabè de Washington. Qu’avez-vous comme message à leur endroit ?
P.K.T : La rencontre que nous avons eue avec nos compatriotes vivant à Washington et environnant a été un grand moment de retrouvailles. Nous avons eu droit à un exposé de la ministre de l’Economie, des Finances et du Développement sur le PNDES. Nos compatriotes nous ont posé beaucoup de questions, non seulement sur le PNDES, mais aussi sur l’actualité nationale. C’est une excellente chose que de s’intéresser aux problèmes du pays même à des milliers de kilomètres. C’est le signe que les Burkinabè restés sur place, et ceux partis voir ailleurs, forment ensemble une nation. Cela correspond parfaitement à la vision du président Roch Marc Christian Kaboré de faire en sorte que les Burkinabè de l’extérieur fassent partie intégrante de la famille.Ces compatriotes vivant hors de nos frontières constituent un capital pour le pays, dans la mesure où, étant à l’étranger, ils ont un œil neuf sur les problématiques nationales. Ils doivent également pouvoir participer aux scrutins. C’est un engagement pris par le président du Faso et le gouvernement travaille à son opérationnalisation.
Propos recueillis à Washington
par Koumia Alassane KARAMA