Depuis l'affaire qui l'oppose à son ancien employé Alidou Ilboudo, il s'est invité à son corps défendant sur la scène médiatique, convaincu que le traitement de son dossier par certains acteurs de la justice n'est pas de nature à faire jaillir la lumière. Cela dit, El hadji Ousmane Ilboudo, dit Concorde, puisque c'est de lui qu'il s'agit, reste confiant en la Justice pour l'aboutissement dudit dossier. Il n'a pas manqué de répondre à son employé qui l'avait traité de tous les noms d'oiseau dans une interview qu'il nous a accordée. C'était lors d'une rencontre avec la presse le 21 septembre 2016 à Ouagadougou.
"J'ai lu avec intérêt l'entretien que L'Observateur a accordé à Alidou Ilboudo dont je suis l'oncle. Le journal a fait un travail d'équilibre comme à son habitude. Mais je constate que l'interviewé s'est appliqué à m'insulter et à dire tout le mal qu'il pensait de moi. En effet il m'a traité de malade, de quelqu'un qui est en mal de popularité et de quelqu'un qui n'est qu'un simple débiteur devant même l'air, gracieusement donné par Bon Dieu, aux banques. Il a même défié tous les enquêteurs, tous corps confondus, du Burkina et d'ailleurs de prouver qu'il s’est rendu coupable de quoi que ce soit. De ceux qui me connaissent, personne ne peut accorder le moindre crédit à de telles allégations. Sur ma supposée maladie, je pense qu'il n'a fait qu'exprimer son souhait et ses attentes funestes lorsqu'il organisait le pillage systématique de mes biens. Visiblement son objectif était de m'enterrer, car sur 10 commerçants je vous assure que deux ne survivraient pas à ce que j'ai subi. Dieu merci, l'auteur de la vie dans sa souveraineté a décidé de me garder en vie et en bonne santé pour le moment; le jour où il décidera du contraire, c'est sûr que je n'y pourrai rien".
Je ne dois à aucune banque
C'est en ces termes que l'opérateur économique a introduit ses échanges avec les journalistes. Comment quelqu'un qui croule sous le poids des dettes peut laisser facilement filer deux milliards ? Lui demande un confrère. Avec un sourire en coin, il répond : "J'ai le monopole au Burkina de la marque des produits alimentaires que je vends ; mes partenaires sont, entre autres, à Singapour et en Malaisie. Il n'y a aucune banque au Burkina ou d’ailleurs qui peut lever le petit doigt pour témoigner que j'y ai contracté un prêt de 12 mois. Ce que je fais, ce sont des prêts de deux, trois ou tout au plus quatre mois et j'ai toujours respecté mes engagements. S'il y a une société ou une personne à qui j'ai emprunté 500 000 FCFA, qu'elle me le dise et je la payerai. Même si je n'ai rien, ma part est chez Dieu qui pourvoit à mes besoins.
Lorsqu'il dit que je suis en mal de popularité, que je fais de l'agitation médiatique pour rassurer mes partenaires, il ne peut que berner ceux qui ne me connaissent pas. En effet avant cette affaire qui m'oppose à lui, est-ce qu'on m'a déjà entendu parler dans des médias ? Pourtant les occasions n'ont pas manqué. Depuis une vingtaine d'années, je mène des œuvres sociales qui nécessitent la mobilisation des autorités et de la presse, mais je ne l'ai jamais fait. J'ai fait construire un barrage de plus d'un milliard et réalisé des infrastructures scolaires et sanitaires. J'ai un projet d'appui à l'hôpital Yalgado, et dans notre planning nous mènerons des actions pour appuyer l'Etat dans sa lutte contre la pauvreté et cela s'élève à deux milliards pour les dix prochaines années. Pour nous c'est un devoir en tant que croyant d'utiliser ce qu'on a pour servir les autres. Actuellement je suis en chantier pour un centre commercial à côté de la grande mosquée, je ne pense pas qu'une entreprise en faillite puisse s'engager dans un tel projet", a-t-il expliqué. L'accusé a juré sur tous les toits qu'il n’a rien et qu'aucune preuve ne peut être brandie contre lui.
Mais Concorde a été formel et parle en montrant une partie des ses pièces à conviction : « Je vous ai dit que c'est l'enfant de mon grand frère, je lui ai fait une totale confiance, car c'est lui qui déposait mon argent en banque était en contact avec mes clients et avait accès à mes coffres. Mais par suite d'une maladie, il a fait ouvrir des comptes au nom de ses amis où il plaçait mon argent. Ces derniers pour faciliter les transactions lui signaient des chèques en blanc. J'en ai dénombré 9 et dans l’un d'entre eux il a placé, tenez vous bien, 1 milliard 600 millions. L'argent ainsi volé étaient destiné à acquérir des parcelles et des cours et à acheter des actions dans bien de sociétés. J'ai des preuves irréfutables du payement des parcelles au nom de mes anciens clients. Le cas emblématique c'est celui de Ouédraogo Saïdou dont voici plus de 5 pièces d'identité différentes (ndlr il nous les montre), tantôt il est né en 78, tantôt en 1971, tantôt à Ouaga, tantôt ailleurs, j'ai pas mal de parcelles à son nom alors même qu'il a affirmé ne pas posséder la moindre parcelle même dans la zone non lotie. J'ai des preuves de l’acquisition de dizaines de parcelles par Alidou, mais je ne vous en dirai pas le nombre exact. Je souhaite que le juge d'instruction fasse tirer les comptes dont je parlais tantôt et je vous assure que vous allez tomber à la renverse ; sans preuve pourquoi vais-je me ridiculiser et perdre mon temps à la justice ? »
Mes attentes vis -à -vis de la justice
Mais où en est-on au juste avec le dossier ?
Le plaignant nous confie sa mésaventure : « Vous comprendrez pourquoi je refuse qu'on limite l'affaire à 115 millions décelés lors de la première investigation alors que le gendarmerie de Kosyam a mené des recherches fructueuses qui donnent un autre aperçu sur l'étendue du vol. J'ai donc fait appel après le procès en première instance. Le juge m'a dit que le dossier a été transmis à la Cour d'appel le 4 février 2014 mais de 2014, à 2015 je suis allé 22 fois à cette juridiction sans y voir la moindre trace. Pendant la Transition, j'ai soumis le dossier à la ministre de la Justice, Joséphine Ouédraogo d'alors, qui a instruit un de ses conseillers de m'aider à avoir les traces du dossier ; après ses investigations, il s'est rendu compte que le juge est parti en congé avec le dossier. Ce n'est qu'à son retour que le dossier a été finalement transmis à la Cour d'appel. Et là une autre surprise désagréable m'attendait : le dossier a été jugé à mon insu et à celui de mon avocat qui s'en est plaint. Le procureur général a même reconnu la faille après avoir constaté qu'une seule convocation figurait dans le dossier pour la forme, puisqu'elle n'a pas été transmise. Jusque-là j'attends qu'on retravaille sur la base des preuves irréfutables que nous avons rassemblées pour dire le droit, sinon c'est comme si on nous invitait à nous rendre nous-même justice."
Qu'à cela ne tienne, l'opérateur économique nous confie son espoir : "Malgré tous ces blocages je reste confiant, car la justice regorge de juges intègres qui ont sauvé des vies, qui ont fait et font cesser de couler les larmes de veuves, d’orphelins et de toute autre personne vulnérable comme aussi les puissants en toute âme et conscience. Les quelques écarts de comportement ne peuvent pas empêcher la marche quotidienne de cette noble institution". Preuve de sa détermination, il a remis le dossier à l'actuel ministre de la Justice et à d'autres institutions comme l'ASCE même s'il sait que celle-ci ne s'occupe pas de ce genre de problèmes. "Je n'ai pas encore eu l'occasion de le remettre à la présidente du conseil supérieur de la magistrature. C'est dire que je ne me lasserai jamais tant que justice ne me sera pas rendue", a-t-il martelé avant de conclure : "Je vous ai seulement montré 1/20e des preuves dont je dispose. L'enfant (ndlr Alidou Ilboudo) dit que je lui fais la force ; si je n'exprime pas ma gratitude à Dieu pour ce qu'il m'a donné et veux dénigrer ou mentir afin de m'enrichir, je suis donc le plus malheureux de la terre. Je prends l'engagement devant le peuple burkinabè avec qui je partage la même nation, les anciens qui m'ont mis au monde et éduqué selon les valeurs de notre société, les autorités coutumières et religieuses que je ne cacherai rien du dossier et que je communiquerai désormais dès la moindre avancée ou le moindre blocage".
Abdou Karim Sawadogo