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Massacre de manifestants en RD Congo : L’irresponsabilité du pouvoir congolais
Publié le mercredi 21 septembre 2016  |  Le Pays
Joseph
© Autre presse par DR
Joseph Kabila, président congolais




L’apocalypse prédite pour la journée du 19 septembre sur les berges du Congo, s’est réalisée. Sans surprise, Kabila a fait descendre un déluge de feu sur la tête des manifestants pro-démocratiques qui ont osé lui réclamer ouvertement le respect des délais prescrits par la Constitution. Bilan : plusieurs morts, de nombreux blessés et de nombreux dégâts matériels au nombre desquels figurent les sièges emportés par les flammes, de nombreux partis d’opposition.
Sans prendre part à la guerre de communication que se livrent les deux camps, la responsabilité de cette violence inouïe est imputable au pouvoir congolais. D’abord parce que la contestation est née de son refus de se conformer aux prescriptions constitutionnelles. Se dérobant à l’organisation à bonne date de l’élection présidentielle, il use de subterfuges comme l’arrêt controversé de la Cour constitutionnelle ou encore le dialogue politique, pour prolonger son bail à la tête de l’Etat. Ensuite, parce que le lourd bilan de la répression prouve que Kabila était préparé à faire usage de la force pour endiguer la contestation.

Kabila et les Raspoutine ont vu venir le chaos et l’ont même planifié en en créant les conditions


La stratégie, des plus macabres, était de frapper fort pour casser l’élan du mouvement de contestation qui devait aller en s’amplifiant, après que le dialogue national a pris du plomb dans l’aile. Cette réaction musclée laisse croire, comme l’indique l’opposition, que la marche a été infiltrée à dessein par le régime pour se donner le prétexte de la répression. En imputant la responsabilité de ces malheureux incidents à l’opposition, le pouvoir refuse donc de s’assumer et fait étalage sur la scène nationale et internationale, de son irresponsabilité. Kabila et tous les Raspoutine qui l’entourent sont d’autant plus irresponsables qu’ils ont vu venir le chaos et l’ont même planifié en en créant les conditions.
En bandant ainsi les muscles, Kabila lève le voile sur ses intentions et se révèle sous ses vraies apparences. Il est déterminé à s’accrocher au pouvoir, dût-il marcher sur les cadavres de ses compatriotes. Il achève ainsi de convaincre, même les plus sceptiques, que le dialogue politique qu’il prônait, n’était que de la poudre aux yeux et n’était destiné qu’à entraîner le débat politique national dans une zone de non droit, qui, au-delà de la prolongation de son mandat, est propice à tous les tripatouillages constitutionnels au service de son désir de pérennisation au pouvoir. En optant de s’abreuver du sang de son peuple pour étancher cet inextinguible soif du pouvoir, il s’inscrit dans l’abjecte et nauséeuse lignée des dictateurs qui ont corrompu l’histoire et que l’humanité voue aujourd’hui aux gémonies.
Après cette sanglante répression, le divorce entre Kabila et son opposition est définitivement acté. Si l’on sait désormais clairement que Kabila est prêt à faire payer à son peuple le prix fort du sang, la question qui taraude les esprits est celle de savoir quelle sera la réaction des opposants. Vont-ils se laisser refroidir par l’hécatombe créée à dessein par le pouvoir ? Tout laisse croire qu’il faut répondre par non, puisque l’opposition a de nouveau appelé à de nouvelles manifestations hier, qui se sont soldées par de nouveaux morts. Pouvait-il en être autrement, quand on sait que l’ampleur grandissante de la contestation traduit le ras-le-bol d’une population révoltée par la précarité de ses conditions de vie, alors qu’elle vit dans un eldorado minier ? La RD Congo semble donc prise dans l’engrenage des violences jusqu’à ce que l’un des protagonistes triomphe définitivement de l’autre. Deux scenarii se présentent. Soit Kabila mate les manifestants en faisant tomber la chape de la terreur sur tout le Congo comme il a été donné de le constater lors de cette triade de contestations, s’ouvrant ainsi définitivement le boulevard du règne à vie qui hante ses nuits, soit il est chassé par la rue ou par une nouvelle rébellion armée et devra, dans ce cas de figure, goûter aux amers sentiers de l’exil. Il pourrait même rejoindre dans les geôles de la Haye, certains de ses ennemis jurés qui se délecteraient de le voir aussi détenu dans les fers des sous-sols de la CPI.

Les condamnations de circonstance doivent faire place à des mesures plus coercitives

En attendant l’épilogue de cette crise, on peut déjà se risquer à dire que Kabila s’est tiré une balle dans le genou, car il peut dire adieu au dialogue national qui lui servait de couverture pour masquer ses obscures manœuvres dans le but de s’éterniser au pouvoir. A preuve, l’Eglise catholique vient de suspendre sa participation à ce dialogue et ce, au regard des tueries massives de ces derniers jours.
Maintenant que l’homme s’est revêtu de tous ses apparats d’ogre, la Communauté internationale qui s’était méprise sur son compte en l’accompagnant dans le dialogue qu’il a convoqué, doit revoir à son encontre, sa copie. Les condamnations de circonstance comme celles des USA ou de la France qui appellent à la retenue, doivent faire place à des mesures plus coercitives. Ne pas le faire, ce serait rendre orphelin le peuple congolais qui se bat, les mains nues, contre une dictature armée qui vient de faire preuve de son extrême vacuité morale. En optant pour la méthode forte face à un pouvoir qui n’entend que le langage de la violence, la communauté internationale se rattraperait de l’erreur historique qu’elle a commise de n’avoir pas réclamé de Kabila, dès le départ, comme l’opposition congolaise, le respect des délais constitutionnels. En encourageant un dialogue pipé, qui, du reste, n’est pas une disposition constitutionnelle opposable à la volonté du constituant originel qu’est le peuple congolais qui a réglementé scrupuleusement la succession au sommet de l’Etat, elle a, en effet, offert la verge au dictateur pour flageller son peuple. Et c’est maintenant qu’il faut agir, car vu l’ampleur de la boucherie, plus tard, ce serait peut-être trop tard.
Dans l’espoir donc que cette Communauté internationale ne se hâtera pas lentement pour venir jouer après coup aux sapeurs-pompiers, les Congolais assistent, les larmes aux yeux, à l’inscription de leur pays, par Kabila, en lettres de sang, au cercle de feu de l’Afrique centrale, après le Burundi, le Congo Brazza et le Gabon.

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