La commémoration du 1er anniversaire du putsch a conduit les autorités le vendredi 16 septembre 2016 au cimetière de Gounghin pour un dépôt de gerbe de fleurs où elles se sont inclinées sur les tombes des martyrs. Les parents des victimes, quant à elles, ont boycotté la cérémonie au motif que rien n’a bougé sur le plan judiciaire, et qu’en outre elles n’ont pas été impliquées dans l’organisation de cette commémoration. Pour cela, les proches des disparus ont fait du brouhaha pour exprimer leur mécontentement.
Le 16 septembre 2015, la transition postinsurrection traversait l’une des pages les plus sombres de son histoire. Le processus venait d’être interrompu par le coup d’Etat manqué du Général Gilbert Diendéré. Ce passage en force n’a pas rencontré l’assentiment du peuple qui s’est mobilisé pour lui faire échec.
La revue des troupes à 9h précises marque l’arrivée du Premier ministre, Paul Kaba Thiéba, qui est accueilli au rythme du Dytaniè avec la fanfare nationale qui met au pas la forte représentation gouvernementale présente et composée, entre autres, de René Bagoro de la Justice, de Remi Dandjinou de la Communication, de Filiga Michel de l’Enseignement supérieur, d’Auguste Denise Barry, du maire de la capitale, Armand Beouindé, de Tahirou Barry ministre de la Culture, du chef d’état-major général des armées, Pingrenoma Zagré.
Après les salutations d’usage, Salifou Diallo, le président de l’Assemblée nationale, est invité avec le chef du gouvernement à déposer symboliquement une gerbe de fleurs en la mémoire des victimes du coup d’Etat du général Gilbert Diendéré .
Pour Paul Kaba Thiéba, Premier ministre, rendre justice répond à un devoir de mémoire pour ceux qui sont tombés sur le champ d’honneur pour la liberté, la démocratie, la stabilité et pour défendre le peuple burkinabè. « Nous sommes là pour exprimer notre émotion, notre douleur et notre compassion. Les élections ont eu lieu grâce à leurs sacrifices. Le gouvernement va respecter tous ses engagements, toutes les réparations vis-à-vis des proches de ceux qui sont tombés », a-t-il dit
Selon Salifou Diallo, président de l’Assemblée nationale, il faut tirer les leçons pour que plus jamais au Burkina Faso il y ait ces tentatives assassines attentant à la liberté et à la démocratie par des individus qui occasionnent des pertes en vie humaine. « C’est pourquoi au-delà de nos divergences politiques, religieuses, de nos appartenances culturelles, nous devons nous élever sur le sacrifice de ces martyrs pour fonder une nation », a-t-il soutenu.
Commémoration sur ton de discorde
Le Premier ministre et sa délégation quittent le cimetière municipal sans pouvoir saluer les parents des victimes qui refusent de le rencontrer et boycottent, du même coup, l’audience à la Primature qui était prévue le même jour à 13h.
Une fois les autorités parties, les parents des victimes, furieux et regroupés près des tombes, entament une autre cérémonie en hommage à leurs parents tombés sous les balles assassines. Tous, ils se sont inclinés en direction du carré des martyrs et ont entonné en cœur le Dytaniè. Une minute de silence a été observée également avant que, les larmes aux yeux, les proches des disparus ne se séparent en scandant justice! justice!
Pour Souleymane Ouédraogo qui a perdu un de ces proches, le droit n’a pas encore été dit. « Tous ces militaires et le Général Gilbert Diendéré qui leur ont fait subir des sévices pendant le putsch sont présents et au camp Guillaume. Ils sont tous connus et malgré tout on nous parle de Haute Cour de justice », a-t-il lancé tout nerveux.
A en croire Monsieur Lingani, les autorités ont commencé à organiser cette cérémonie à la dernière minute et eux, proches des victimes, n’y ont aucunement été impliqués. « Nous voulons la justice », a-t-il dit pour terminer.
Au dire de Hamadé Zonou, c’est devant chez le Mogho Naaba qu’il a reçu deux balles au niveau du tiers moyen de la cuisse. « Le nerf sciatique a été également touché. J’ai subi deux interventions et je marche encore avec les balles. On se prend en charge tout seul en dépit des sommes reçues lors des décorations. Le pied enfle et j’ai du mal à marcher. On demande justice et réparation», a-t-il conclu.
Harold Alex Kaboré