Le dépôt et la vente anarchiques de carburant sont devenus au Burkina, un phénomène plus que préoccupant. En effet, dans nos villes et campagnes, l’on peut observer que bien de domiciles et autres boutiques tiennent lieu d’endroits où l’on entrepose et vend à qui veut du gasoil, de l’essence et autres produits inflammables. Tout récemment, cette pratique a été à l’origine d’un incendie qui a emporté des vies humaines dans la capitale économique du pays, Bobo-Dioulasso. A l’instar de Bobo-Dioulasso, bien d’autres localités ont vécu ce genre de drames de par le passé même si l’on n’y a pas enregistré le même nombre de morts. Le phénomène est donc général et ne semble pas prêt de connaître un recul malgré le fait que nul n’ignore qu’il est potentiellement très dangereux et en dépit du fait qu’il n’est pas autorisé par les textes en vigueur. Et quand on aborde ceux qui s’adonnent à cette activité illégale voire criminelle, l’on est en droit d’être estomaqué face à la légèreté de l’argumentaire qu’ils développent pour justifier la pratique. La substance de cet argumentaire peut être résumée comme suit: « Nous sommes conscients que nous sommes dans l’illégalité. Seulement, nous n’avons pas le choix. Car nous avons des bouches à nourrir et des enfants à soigner et à scolariser ». Ce discours ne peut pas et ne doit pas prospérer dans une société encore moins dans un Etat de droit. Car au rythme où vont les choses, le risque est grand de voir nos rues se transformer en des hauts lieux de vente à ciel ouvert de drogues et autres stupéfiants si ce n’est déjà fait. En effet, dans la logique des trafiquants de carburant, ils ne peuvent pas se priver de cette autorité parce que c’est leur gagne-pain. Si l’Etat devait se plier à cette logique, autant leur suggérer d’ouvrir des points de vente de substances addictives, puisque cette activité est juteuse. En réalité, le grand mal qui ronge le Burkina et qui est à l’origine des actes inciviques qui écument l’ensemble de la société est née du fait que l’Etat n’a plus de « couilles ». Et comme le microbe se développe en terrain favorable, l’incivisme s’est rendu maître de la cité. Dans ces conditions, il ne faut pas parler d’émergence encore moins de développement. Car rien de grand et de durable ne peut être réalisé dans un pays où les habitants, sur un coup de tête, peuvent entreprendre tout ce qu’ils veulent sans se soucier de savoir si cela est autorisé ou non par la loi. Et quand le drame survient, comme ce fut le cas tout récemment à Bobo-Dioulasso, l’on s’empresse de l’attribuer au destin et à Dieu. Que c’est facile ! Ce sont ces genres de posture qui sont véritablement à la base du grand retard accusé par l’Afrique dans bien de domaines. De ce point de vue, il est impératif que l’Etat siffle la fin de la récréation dans le dépôt et la vente du carburant au Burkina Faso. C’est vrai, cela ne va pas manquer de susciter des grincements de dents. Pour autant, l’Etat ne doit pas faire preuve de mollesse lorsqu’il s’agit pour lui de protéger les vies des citoyens. On l’a vu, tout dernièrement, aux abords de l’hôpital Yalgado Ouédraogo, que la fermeté de l’Etat a payé, lorsqu’il a détruit sans état d’âme les kiosques qui encombraient les caniveaux. Les résultats ont été immédiats. Les grosses pluies qui ont suivi l’opération de déguerpissement, ont épargné l’hôpital. Pourtant au début, les commerçants qui étaient sur les lieux avaient opposé de la résistance au motif que l’Etat voulait les ruiner. C’est de cette façon que l’Etat devrait agir face à tous ceux qui se livrent consciemment à des activités illégales au détriment de la santé et de la vie des autres. Le dépôt anarchique de carburant au Burkina est l’une de ces activités.
Sidzabda