Dans le cadre du suivi de la campagne agricole 2016-2017, une délégation du ministère en charge de l’agriculture a échangé, le vendredi 18 août 2016 avec les producteurs de la Boucle du Mouhoun. Dans cette région, réputée grenier du pays, la physionomie de la campagne est globalement «rassurante» et présage de «très bonnes récoltes».
Annoncés pour une sortie dans la Boucle du Mouhoun, le ministre en charge de l’agriculture, Jacob Ouédraogo et le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba n’ont pu faire le déplacement pour des contraintes de dernières minutes. C’est le gouverneur de la Boucle du Mouhoun, Justin Somé qui a conduit la tournée de suivi de la campagne agricole de l’année en cours dans sa région. Il est allé traduire aux producteurs, les encouragements du chef du gouvernement et recueillir leurs préoccupations. La mission s’est rendue dans le village de Lémini dans la commune de Bourasso (Kossi), à Bokuy (Mouhoun). Dans le bassin rizicole de Lemini, le gouverneur Justin Somé a salué les efforts consentis au quotidien par les exploitants pour assurer à leurs concitoyens l’autosuffisance alimentaire. Assisté des premiers responsables des services techniques du ministère de l’Agriculture et des aménagements hydrauliques, il s’est entretenu avec les riziculteurs. Le bassin de Lémini est géré par une union de groupements de producteurs qui a la particularité d’utiliser la fumure organique comme intrant. Pour une superficie de 60 hectares aménagée, il a été mis en place, un fonds de roulement d’une valeur de 5 millions 880 mille F CFA au profit des 200 exploitants. Les crédits ont pu être recouvrés à 100% grâce à la bonne gestion administrative et financière des producteurs présentés comme des modèles dans la région. Mieux, au titre de la campagne agricole 2015-2016, les exploitants de la plaine de Lémini ont dégagé un excédent de production de 28 tonnes de riz paddy collectées par la Société nationale de gestion des stocks de sécurité (SONAGESS). Les producteurs ont saisi l’occasion pour soumettre quelques doléances au gouvernement : la réalisation de 10 puits à grand diamètre pour le maraîchage, un magasin d’une capacité de 25 tonnes et l’acquisition d’une décortiqueuse de riz. Leurs vœux ont été partiellement exaucés séance tenante car le gouverneur qui a remis du matériel de séchage, de compostage et d’arrosage ainsi que des équipements (charrues, charrettes), offerts par le ministère en charge de l’agriculture et le Projet riz pluvial (PRP). Après Lemini, c’est le champ d’Isaïe Yézouma Dakuyo, un autre producteur modèle que la délégation a visité à Bokuy sur l’axe Dédougou-Soukuy. Vice-président de l’Union provinciale des producteurs de coton de la province du Mouhoun, M. Dakuyo s’est progressivement taillé une stature d’agrobusiness man moderne par la mécanisation de son système de production. Son exploitation de 37 hectares a forcé l’admiration des visiteurs du jour. «Je crois que M. Isaïe Dakuyo a dépassé le cap de producteur modèle. C’est un entrepreneur agricole à encourager», a déclaré le chef de la délégation, Justin Somé. Le producteur a, en effet, une maîtrise totale de sa chaîne de production assurant lui-même la production de semences, de fumures organiques. Il travaille avec des équipements modernes, (tracteurs, charrues, semoirs, butteurs), assure le conditionnement de ses récoltes avec des égraineuses et le stockage dans deux magasins d’une capacité de 80 tonnes.
Une unité de transformation de maïs pour Dédougou
Manifestement intéressés par les performances de l’agriculteur, les responsables des services techniques de l’agriculture ont échangé avec lui sur certains aspects de son entreprise. Quel est le statut des terres exploitées par M. Dakuyo ? Comment a-t-il financé ses équipements de mécanisation ? Pourquoi ne pas miser plus sur la production du maïs (seulement 7 hectares) qui apparait à l’analyse des comptes d’exploitation comme plus rentable que le coton (30 hectares) ? Comment gère-t-il l’amortissement des équipements agricoles ?
En réponse Isaie Dakuyo avoue ne pas disposer de titres fonciers qui assurent la sécurité des terres que lui ont léguées ses ancêtres. A propos des financements, il a témoigné s’être battu dans un premier temps avec des bœufs de trait pour disposer ensuite de l’argent nécessaire a l’achat d’un premier tracteur en 2012. Le gouvernement lui a octroyé un second tracteur en 2014. L’entrepreneur gère aussi, à sa façon, les amortissements des équipements. En dehors de ses propres travaux, il loue ses égraineuses et ses tracteurs aux autres producteurs. Sur le choix du coton comme principale spéculation, l’agrobusiness man se justifie par le manque de débouchés pour les autres cultures telles que le maïs. Selon lui, c’est le coton qui supporte les crédits et c’est encore une partie des intrants destinés à la culture de l’or blanc qui est prélevée au profit des autres spéculations. «Si vous me trouvez des débouchés, je m’engage à produire beaucoup de maïs», lance-t-il à la délégation. Sur le sujet, le Directeur général de la promotion de l’économie rurale (DGPER), Dr. Abdoulaziz Ouédraogo a annoncé l’installation à Dédougou, à court terme, d’une unité de transformation du maïs en farine notamment pour créer de la valeur ajoutée et des débouchés. Une nouvelle qui a réjoui l’Union des groupements pour la commercialisation des produits agricoles (UGCPA/BM), que la délégation a aussi visitée à la sortie Ouest de la ville de Dédougou. Créée en 1993, cette union produit, collecte et commercialise les excédents céréaliers (maïs, sorgo, mil, niebé, bissap) à la SONAGESS, au Programme alimentaire mondial (PAM) et à des partenaires étrangers. Elle reste cependant confrontée aux difficultés d’un marché céréalier informel, le faible taux de respect des engagements des producteurs, l’accès à l’engrais en qualité et en quantité. L’ensemble des difficultés évoquées ont par la suite été débattues et des solutions envisagées au cours d’une rencontre de concertation avec les acteurs régionaux du secteur à la mairie de Dédougou. Pour le directeur général des productions végétales (DGPV), Alassane Guiré, cette sortie de suivi de la campagne dans la Boucle du Mouhoun a permis d’identifier les problèmes majeurs rencontrés par les producteurs, et des solutions seront apportées. Ce fut aussi l’occasion de «cerner les problématiques majeures par anticipation pour rendre compte au gouvernement sur les cas éventuels de déficit céréalier important, les inondations». Sur la base des prévisions météorologiques, «assez intéressantes» pour la Boucle du Mouhoun, on s’attend à une campagne bien arrosée d’excédentaire à très excédentaire avec une fin tardive des pluies. «La physionomie de la campagne est assez rassurante. Sur l’ensemble de la région, il y a une maîtrise des techniques culturales, les stades d’évolution des plants sont intéressants. Il n’y a pas de situation alarmante sur le plan phytosanitaire à part quelques cas isolés rapidement traités. Si les conditions se maintiennent en l’état, nous ferons de très bonnes récoltes dans cette région», a conclu M. Guiré.
Mahamadi TIEGNA