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Libertés publiques : Bientôt une ré-immatricualtion des associations
Publié le mardi 14 juin 2016  |  Sidwaya




Des changements notables sont en train d’être effectués au niveau de la direction générale des libertés publiques et des affaires politiques pour la création et la gestion des associations. Dans cette interview réalisée, le 8 juin 2016, le directeur général, Aristide Béré, décline cette nouvelle vision qui est impulsée à son institution. Il se prononce également sur les missions dévolues à sa direction.

Sidwaya (S.) : Quelles sont les missions confiées à votre direction ?


Aristide Béré (A.B.) : Nous avons quatre axes d’intervention. Le premier axe concerne les Organisations de la société civile(OSC). Nous sommes chargés de la reconnaissance des OSC et d’assurer leur police à travers le suivi du respect par ces organisations de la règlementation relative à la liberté d’association. Notre deuxième champ d’actions est relatif aux affaires politiques, c’est-à-dire la reconnaissance des partis et formations politiques. Nous avons un troisième champ d’actions qui est constitué des religieux et coutumiers. C’est-à-dire que nous sommes chargés aussi, des affaires coutumières et religieuses. Nous avons enfin un domaine dit réservé, à savoir les affaires politiques dites résiduelles en ce que tout ce qui est en rapport avec les acteurs politiques sont chapeautés à notre niveau.


S. : Quels sont les critères que doit remplir une association pour avoir une reconnaissance officielle ?


A.B. : La loi est assez libérale en ce qui concerne la reconnaissance des partis et des OSC. Parce que la loi dit : les associations se créent librement. Cela veut dire que l’on peut bien créer son association sans être tenu de venir vers nous. Lorsqu’on vient vers nous, c’est que l’on recherche une reconnaissance officielle. A cet effet, nous exigeons un certain nombre de pièces ou d’actes. Il y a d’abord, le Procès-verbal(PV) de l’association, les statuts et règlements intérieurs, les Cartes nationales d’identité burkinabè (CNIB) en plus de la demande adressée au ministre en charge de l’administration territoriale.


S.: Combien d’associations et de partis politiques compte-t-on au Burkina Faso ?


A.B. : A la date du 30 mai 2016, nous avons enregistré 170 partis et formations politiques. Sur cet effectif, il y a 145 partis et formations politiques qui ont pu participer au processus électoral dernier et 25 regroupements d’indépendants. Pour ce qui concerne les associations, bien malin qui pourra vous donner le nombre exact. Mais, nous pouvons tout de même estimer ce nombre à environ 12 000. Il y a environ 2 000 associations qui sont créées par an et à la date du 7 juin 2016, nous avons enregistré 1 603 dossiers ne serait-ce que pour l’année 2016. Nous sommes largement au-dessus de la moyenne.


S. : L’on a l’impression que même une association de malfaiteurs peut bénéficier d’un récépissé. Y a-t-il des précautions qui sont prises pour éviter les surprises ?


A.B. : Tout le monde ne peut pas créer une association même si, l’article 4 de la loi dit que les associations se forment librement. Elles sont régies tout de même quant à leur fonctionnement et organisation aux principes applicables aux droits et aux obligations au contrat. Ce qui veut dire que pour créer une association, il faut avoir la capacité pour contracter, il faut être majeur. Il ne faut pas être sous le coup d’incapacité comme la tutelle ou sous protection de justice. En plus, il faut un objet certain qui forme la matière de votre engagement. Il faut une cause licite dans votre association. Nous examinons pour savoir si, la cause est conforme aux engagements. Il faut aussi avoir le consentement des partis puisque les mineurs ne peuvent pas avoir de consentement. Si, nous avons des doutes sur la moralité d’une association, la loi nous permet de déclencher une enquête de moralité avec le concours des services de police et de gendarmerie qui peuvent nous situer avec précision sur la moralité des uns et des autres. Cela pour éviter que les associations soient des leviers d’actions illicites.


S.: Il est courant de voir des OSC défendre des positions politiques. Quelle est la frontière qui sépare l’association du parti politique ?


A.B. : Toute la difficulté entre les associations et les acteurs politiques réside dans la compréhension de ce qu’on entend par politique. De façon normale, une association doit faire la politique. Cela veut dire que l’association doit donner sa lecture de la vie en société. Elle doit pouvoir appuyer les actions publiques. Elle doit pouvoir donner sa lecture, sa compréhension, en clair, elle doit participer à la gestion politique. Et ça, c’est faire de la politique. Quand une association dénonce une situation qui ne fonctionne pas bien au sein d’une administration, c’est une action politique, lorsqu’une association appuie l’Etat dans la mise en œuvre d’une politique publique comme la lutte contre le paludisme, l’alphabétisation des filles, la lutte contre l’excision, etc. Ce sont des actions politiques, mais ce ne sont pas des actions politiciennes. C’est ce qui est interdit par la loi, c’est-à-dire de soutenir la conquête et la dévolution du pouvoir politique, cela est du ressort des partis politiques.

S.: Quelles sanctions peuvent encourir une association qui ne respecte pas l’objet de sa création ?


A.B. : Il y a un contrôle avant et après. Le contrôle avant vise au moment de la constitution de l’association à contrôler, si les membres de l’association n’ont pas un objectif contraire à l’objectif normalement poursuivi par une association. Ensuite, après, nous vérifions si les actions accomplies par les OSC ne sont pas contraires aux normes. Lorsque cela arrive, c’est vrai qu’il n’y a pas une trop grande publicité autour, mais il y a des interpellations, des convocations afin de mieux comprendre. Il arrive que l’on dissolve l’association. Vous avez l’exemple de la Fédération associative pour la démocratie et le progrès avec Blaise Compaoré (FEDAP/BC).


S. : Envisage-t-on de nouveaux textes pour régir les associations ?


A.B. : Oui, il y a des nouveaux textes en cours de validation.


S.: Quels sont les changements que pourraient apporter ces nouveaux textes ?


A.B. : Le Conseil national de la transition(CNT) a adopté le 20 octobre 2015, une nouvelle loi. Il s’agit de la loi 064 portant liberté d’association au Burkina Faso. Cette loi pose des conditions beaucoup plus restrictives quant à la création des associations. Dans ce nouveau texte, il y a d’abord la dimension des ONG parce qu’avant il n’y avait pas la consécration de la notion d’ONG. Normalement les associations nationales ne pouvaient pas avoir le statut d’ONG. Or, ce statut confère un certain nombre d’avantages fiscaux et douaniers. Donc, avec les nouveaux textes, les associations nationales peuvent acquérir le statut d’ONG et bénéficier des avantages évoqués plus haut.
Et dès demain (NDLR : 9 juin 2016), nous allons revoir le décret portant modalité d’agrément des ONG. En plus, nous avons soumis au ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité intérieure, un projet de décret qui porte institution de frais dénommé frais associatifs. Désormais, la déclaration, le renouvellement, les demandes d’utilité publique, les reconnaissances des associations étrangères seront soumises au paiement d’un certain nombre de frais. Nous prévoyons mettre en place un guichet unique des associations parce que dans le circuit de traitement des dossiers d’associations, il faut aller à la police pour les légalisations, aller payer les timbres au trésor public, venir déposer chez nous après pour aller au secrétariat général du gouvernement pour la publication au Journal officiel. Donc, il y a quatre à cinq structures étatiques qui sont impliquées dans le traitement des dossiers d’associations. Nous avons donc proposé de mutualiser toutes ses structures au sein de la direction générale des libertés publiques et nous avons déjà commencé à tester ce dispositif. Maintenant, lorsque vous voulez créer votre association, vous n’avez qu’à venir avec vos papiers même pas légalisés à la Direction générale des libertés publiques parce qu’il y aura des policiers sur place qui vont les légaliser. Ensuite, nous avons constaté que beaucoup de demandes sont rejetées pour non-conformité. Pour nous, il ne sert à rien de recevoir le dossier de quelqu’un alors qu’il est mal monté. C’est pourquoi, nous avons mis en place un dispositif qui permet le traitement des dossiers à un niveau basique ; c’est-à-dire qu’il y aura deux administrateurs civils qui seront chargés d’examiner le fond et la forme de chaque dossier. Si votre dossier est accepté, il est transféré tranquillement à la signature du ministre. Au retour, le dossier est déclaré au Journal Officiel et vous n’avez qu’à revenir rechercher votre dossier avec le Journal Officiel joint. Si tout est normal, votre récépissé vous est délivré dans l’intervalle d’une ou deux semaines. D’ailleurs concernant le récépissé, nous avons pensé à le réformer. Actuellement, il tient sur trois ou quatre pages. Il y a des falsifications des récépissés que l’on observe. Hier (NDLR : 7 juin 2016), nous étions avec l’Office national d’identification qui va nous proposer un format de récépissé infalsifiable avec des dispositifs de sécurité qui permettent à chaque association d’avoir un numéro d’identification unique, de le loger dans une base de données qui pourra être consulté par n’importe qui sur le territoire national et à l’étranger. Lorsque tout ce dispositif sera prêt, nous allons lancer une opération de ré-immatriculation des associations en attribuant à chaque association, un numéro d’identification unique. Ce n’est qu’après cette opération qui sera clôturée à la fin de l’année que l’on pourra donner avec précision le nombre d’associations au niveau national, provincial et régional.


S. : A propos des frais dits associatifs, de quoi s’agit-il exactement ?


A.B. : Pour les frais, nous avons travaillé avec le ministère de l’Economie et des finances sur la perception des droits associatifs. Il a été retenu que pour la constitution d’un dossier d’association, le déclarant doit payer 15 000 F CFA, s’il veut renouveler le récépissé, c’est 10 000 F CFA, 50 000 F CFA pour la déclaration d’utilité publique et 100 000 F CFA pour les associations étrangères. En clair, maintenant, si vous voulez créer une association, vous payer 15 000 F CFA pour déclarer et 25 000 F CFA pour la publication au journal officiel. Les associations qui existent déjà seront obligées de se ré-immatriculer à hauteur de 10 000 F CFA.


Interview réalisée par :
Gaspard BAYALA
Théodore Z. DAKUYO
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