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Dialogue intérieur / Marche et contremarche au pays de Kabila : La RDC retient son souffle
Publié le jeudi 26 mai 2016  |  Le Pays




Le bras de fer entre le pouvoir congolais et l’opposition doit connaître un regain d’intensité avec ce qui s’apparente à «un duel de rue» dans les artères de Kinshasa. En effet, dans l’élan de lutte contre les velléités de pérennisation de Kabila au pouvoir, la plateforme de l’opposition a battu le rappel de ses troupes pour battre le macadam en signe de protestation contre l’arrêt de la Cour Constitutionnelle qui autorise le président Joseph Kabila à se maintenir au pouvoir au-delà de 2016 en cas de glissement du calendrier électoral. Et, «réponse du berger à la bergère», la coalition au pouvoir appelle aussi ses ouailles à descendre dans la rue sur toute l’étendue du territoire national pour, au contraire, défendre non seulement la Cour constitutionnelle et son arrêt, mais aussi manifester son soutien au dialogue national prôné par le chef de l’Etat. Hier, en fin d’après-midi la sagesse semblait prendre possession des esprits dans les rangs du pouvoir. En effet, une décision de report de la marche des militants du PPRD aurait été prise. Mais avec un prince qui a souvent raidi la nuque, il est prudent d’attendre de voir. En tout cas, le débat politique sur l’alternance court donc le risque de se muer en un combat de rue. Si l’on n’en est pas encore à l’affrontement entre militants du pouvoir et ceux de l’opposition, on n’en est qu’à un pas !

Le pouvoir mise sur les risques d’affrontements entre les deux camps

De toute évidence, la ligne de fracture entre les acteurs de la scène politique congolaise promet aujourd’hui de fortes secousses sismiques et l’administration qui devrait prévenir les risques, a joué au pyromane dans la prise de ses décisions. En effet, alors qu’elle fait de tout le pays un boulevard pour les adeptes du parti présidentiel (le PPRD), l’opposition, elle, se voit confinée dans la seule ville de Kinshasa où, sous prétexte d’éviter les pillages, le centre-ville lui est aussi interdit. Cette injustice, plus que tout autre chose, traduit son inféodation au pouvoir. Au-delà de la tentative de contenir les manifestations de l’opposition tout en amplifiant celles des partisans du pouvoir, l’autorisation à manifester pour la Dynamique dans la seule ville de Kinshasa, est un acte de provocation. Elle vise à pousser à son paroxysme la colère des militants pro-démocratie, les incitant ainsi à des actes de violence pour servir de prétexte à la répression. L’opposition doit donc garder toute sa lucidité pour ne pas tomber dans le piège et surtout, pour faire la preuve de sa maturité.
En tout état de cause, cette politique du «deux poids, deux mesures» met à nu la stratégie du régime Kabila qui sue de tous ses pores la fébrilité et la peur, dans ce combat qu’il mène contre son opposition. La coalition gouvernementale entend gagner toute la guerre des chiffres pour faire la preuve de sa popularité. Il nourrit sans doute ainsi le dessein de pouvoir se targuer sur les ondes, de mobiliser tout le pays sans se priver du plaisir de snober une opposition dont le cercle de rayonnement s’est pour l’essentiel, limité à la seule capitale. Une stratégie gouvernementale qui consiste in fine à se chatouiller pour rire. Avec ses marches et contremarches, il y a fort à parier que le pouvoir mise sur les risques d’affrontements entre les deux camps, pour espérer donner un coup d’arrêt définitif aux manifestations au nom de l’ordre public. Mais plus calculateur encore, en appelant ses militants à descendre dans la rue, le pouvoir fait surtout la preuve de son réalisme
politique, en utilisant non seulement la même arme que celle de l’opposition, mais aussi en faisant la preuve qu’il est bien conscient que c’est dans la rue que le pouvoir se conquiert et qu’il ne faut pas laisser le terrain à l’opposition.
Si besoin en est encore, Kabila fait ainsi la preuve qu’il continue sur sa lancée, celle de neutraliser toute opposition à son rêve presque libidinal du pouvoir à vie. En effet, après avoir réussi à contraindre Moïse Katumbi à quitter le pays, il augmente la pression sur le reste de l’opposition. C’est donc le service de nettoyage qui se poursuit. Mais il devrait faire attention au retour de la manivelle. Car, à force de répression, il augmente aux yeux de l’opinion internationale le capital de sympathie de l’opposition qui, au passage, peut aussi renforcer sa cohésion interne et sa détermination face à l’adversaire. Pire, en décuplant le taux d’explosivité de la scène politique, Kabila prend le risque de plonger son pays dans un embrasement généralisé. Un acte irresponsable s’il en est ! Et en la matière, on sait toujours quand ça commence, mais jamais là où ça s’arrête.

Cette chienlit congolaise ressemble à celle qui a précédé la chute de Blaise Compaoré

C’est en cela que cette stratégie ressemble plus à une tactique de la terre brûlée. Même s’il n’a plus le souci de l’histoire qu’il lit volontairement à l’envers, lui dont le père a débarrassé la RD Congo d’une des plus féroces dictatures tropicales, celle de Mobutu, il devrait se soucier de sa personne car même le pyromane n’est pas toujours épargné par les flammes du feu qu’il allume. Il devrait surtout comprendre que la RDC n’est pas l’île perdue de Robinson Crusoé, mais plutôt un pays qui est membre à part entière de ce continent africain qui s’est résolument engagé sur la voie de la démocratie.
L’opposition qui s’est mise quant à elle du bon côté de l’histoire, doit maintenir le cap au-delà des actes de provocation. Elle peut toujours s’inspirer de l’école burkinabè où la détermination a fini par payer, malgré les stades de football remplis «recto verso». D’ailleurs, fort étrangement, cette chienlit congolaise ressemble à celle qui a précédé la chute de Blaise Compaoré. En tout état de cause, l’opposition peut se féliciter des divergences qui se dessinent au sein de la coalition au pouvoir où l’unanimité ne semble pas totale sur le maintien au pouvoir de Kabila au-delà du délai constitutionnel. Elle peut surtout se féliciter de la sortie de la communauté internationale qui devrait augmenter la pression sur Kabila pour le faire lâcher du lest.

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