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Tueries à Guenon : « et si on vivait sans chef ! »
Publié le vendredi 6 mai 2016  |  L`Observateur Paalga




L’observateur averti qui a suivi le drame qui frappa si sévèrement Guenon, au regard de l’accalmie qui règne aujourd’hui dans cette petite bourgade du Nahouri, peut, à juste raison, pousser un ouf de soulagement et ressentir quelques motifs de satisfaction ; et pour cause !

Pour rappel des faits, l’éruption a éclaté le 2 mars 2012 et a eu pour prétexte (prétexte pas si banal que cela) une querelle de chefferie ; il s’en est suivi une tuerie inimaginable dont les corollaires furent absolument des plus effroyables :

Plus d’une dizaine de membres de la famille Liliou tués, certains ayant été brûlés vifs, des maisons éventrées, des boutiques mises à sac, des hangars terrassés, des habitations d’instituteurs et d’infirmiers saccagées, et pour couronner le tout, près (ou plus) d’un millier de personnes condamnées à l’errance à la recherche d’un asile pour sauver leur vie !

Et comme si cette horreur ne suffisait pas, la réplique du séisme social devait survenir trois années plus tard, en début juillet 2015 : nouvelles tueries, nouveaux saccages, nouveaux départs d’exilés. Provoquant les mêmes pleurs, les mêmes soupirs, les mêmes déscolarisations d’enfants, les mêmes peurs.

On avait des raisons de craindre le pire après ces comportements qui défient toute logique, toute humanité et toute raison ; mais depuis quelques semaines déjà, l’accalmie semble avoir repris ses droits. Les victimes mortes suite à cette folie de barbarie ne ressusciteront pas, certes, mais ceux qui étaient en exil forcé ont été à nouveau installés chez eux, et la vie semble reprendre son cours.

C’est l’occasion ici de féliciter tous ces acteurs de l’ombre, personnages politiques, responsables religieux et éminentes personnalités de la chefferie traditionnelle qui surent prendre d’eux-mêmes et de leur temps pour s’impliquer efficacement dans la résolution de ce conflit social difficile dont il faut dire que, sans leur intervention clairvoyante et sage, il se serait révélé sans doute plus dramatique et plus meurtrier.

Que sont devenues les belles promesses du PM ? (1)

La vie reprend donc ses droits à Guenon ; on peut déjà en être heureux, mais nul ne saurait vraiment s’en satisfaire car, subsiste à ce jour la peur du lendemain. A vrai dire, la tension qui oppose les uns et les autres est plus que palpable. Le climat est volatile et il suffirait d’un rien pour que la situation s’embrase de nouveau. Et cette éruption, si elle devait survenir, présente tous les symptômes qu’elle sera plus violente que celles déjà endurées. Une analyse élémentaire du problème révèle que la réplique de juillet 2015 s’est imposée parce que le problème posé déjà en mars 2012 n’avait pas trouvé solution. Les populations de cette région du Nahouri ont suffisamment souffert. Il convient de prendre à présent les mesures qui siéent, dussent-elles être drastiques.

Trancher le nœud gordien

Primo : il s’agit de la sécurisation des habitants de Guenon ; l’Etat qui, en son temps, a promis, par la voix de son Premier ministre d’alors de s’occuper de la question, devrait se pencher sans complaisance sur le problème : « Je promets, du haut de la tribune de l’Assemblée nationale, que toute la lumière sera faite sur ces tueries et que le gouvernement n’oubliera jamais les victimes », avait dit le premier des ministres de l’époque. Où en est-on de ces belles promesses ? Pourquoi les honnêtes citoyens qui vivent à Guenon continuent-ils d’avoir la peur au ventre ? Que prévoit-on de faire pour eux ? Et quand va-t-on le faire ?

En attendant, le positionnement de forces de défense et de sécurité basées à proximité, et pourquoi pas, dans Guenon, aura sans nul doute, non seulement un effet de dissuasion qui pourrait décourager même les plus téméraires des fauteurs de guerre, mais aussi permettra aux honnêtes habitants de cette bourgade de vaquer en toute quiétude à leurs occupations. Qu’on ne s’y trompe pas, si la réinstallation des habitants qui avaient fui le bourg s’est passée sans difficultés, il faut le reconnaître, c’est bien parce que des forces de défense et de sécurité étaient bien présentes pour accompagner et superviser l’opération. Nul n’ose imaginer ce qui se serait passé si les déplacés avaient décidé de se réinstaller tout seuls à Guenon. Ils ont essayé de le faire en octobre et on se souvient de la chasse-poursuite qui s’en est suivie avec des femmes et des vieux hachés avec des machettes. A ce jour, le chef du clan des Liliou est prudemment retenu par sa famille en exil à Ouagadougou. Qu’adviendra-t-il de lui s’il devait prendre la décision de rejoindre Guenon qui, après tout, est la terre de ses ancêtres, le lieu normal et naturel de son existence ?

Il est tout de même étonnant que jusqu’à présent, et malgré la gravité des faits qui se sont déroulés dans cette bourgade, aucune force de sécurité ne stationne à Guenon ; ni police, ni gendarmerie, ni militaire. Ce village est cependant le plus grand bourg du Nahouri et compte pas moins de 20 000 âmes ! Sans exagérer, on doit dire qu’au regard de ce qui s’y est passé, cette localité, en matière de sécurisation, mérite plus et mieux !

Nul ne vit normalement s’il sent, suspendue au-dessus de lui, une épée de Damoclès qui peut s’abattre à tout moment sur sa tête.

Secundo : La justice doit jouer sa partition ; en toute liberté, en toute impartialité, mais en usant de la fermeté que requiert la gravité du cas présent. Les parents des victimes tuées à la machette ou brûlées vives retiennent avec beaucoup de peine en ce moment leur colère, de même qu’ils ressentent indignation et frustration. A vrai dire, qui, à leur place, se paierait le luxe d’exprimer autre chose ? Il est normal que les coupables de ces exactions et massacres soient jugés, et s’ils sont reconnus coupables, qu’ils paient pour leurs actes. A ce jour, on est en droit de se demander où en est la justice dans cette affaire, quatre longues années après les premiers faits. Où en est-elle dans le traitement du dossier des inculpés, puisque des inculpés il y en a ? L’acception commune commande qu’on ne brusque pas l’appareil judiciaire. Pour qu’il soit efficace il lui faut du temps et la liberté de mouvement certes, mais dans ce contexte du Burkina Faso post- insurrection qui garde en mémoire le dilatoire et les dénis de justice subis par une kyrielle de Burkinabè dans un passé récent, il n’est pas exclu que trop de lenteur (même dans l’intention de bien faire) s’apparente à une intention masquée de camoufler, de laisser faire le temps qui efface les traces des mémoires, pour enfin laisser courir en toute impunité des citoyens coupables de crimes punis en temps normal par ce même appareil judiciaire ! Et alors, on se le demande : à quand le jugement ? Plus la réponse à cette interrogation traîne et plus elle suscite ressentiment chez les uns et témérité nouvelle chez les autres. Et c’est la bourgade de Guenon qui immanquablement, en ferait les douloureux frais !

Tertio : il faut avoir le courage de trancher le nœud gordien ! Le problème, à Guenon, c’est la chefferie ! En temps normal, un chef est tout un symbole ; celui de l’unité qui fédère, qui rassemble, qui regroupe. Un chef, c’est l’assemblage harmonieux qui met en symbiose sagesse, clairvoyance, sens élevé de la responsabilité et ce, au service des membres de cette communauté que ledit chef a pour responsabilité de diriger et de gouverner en toute justice, sagesse et équité. L’objectivité commande de constater que ce n’est pas le cas à Guenon. Lorsque deux chefs en viennent à se livrer à des querelles de chapelle, il est normal que les partisans de l’un et de l’autre décident de jouer les prolongations dans la rue et choisissent d’en découdre, au besoin, en faisant usage de la solution finale, peu importent les conséquences et le drame humain qui ne manqueront pas de faire suite à pareils jeux de vilains.

Aucun sacrifice n’est de trop lorsqu’il s’agit de sauver des vies humaines

Si la chefferie, à Guenon, ne peut se revêtir des apparats, vertus et qualités qui constituent les caractéristiques d’une chefferie digne de ce nom, en temps normal, pourquoi tenir vaille que vaille à la maintenir ? Pourquoi maintenir en place une institution qui, au lieu d’assurer ses fonctions régaliennes de maintien de l’unité et de la cohésion sociales, est plutôt source de clivages, de dissensions et de massacres inouïs, perpétrés au sein de cette population qu’elle est censée guider, éclairer et protéger ? La réponse à pareille interrogation semble relever du bon sens le plus élémentaire. Aucune chefferie digne de foi ne saurait s’abreuver du sang de ses propres sujets ! L’histoire de Guenon enseigne d’ailleurs que pendant de longues années ce village a vécu sans chefferie telle qu’on la connaît à ce jour, et qu’il ne s’en portait pas plus mal ! Mieux, ses ressortissants vivaient, s’entendaient et échangeaient en toute civilité et fraternité.

Si c’est le bonnet du chef qui fait problème, alors, que fort courageusement, qui de droit prospecte cette solution qui, d’ailleurs, n’a de radical que l’apparence : il n’est pas saugrenu que, pour leur propre unité, la cohésion et le besoin d’unité des fils de ce village, le bon sens commande aux habitants de Guenon de vivre sans chef, tout en se soumettant, à l’instar de tout citoyen burkinabè, à l’autorité de l’Etat.

N’eût été le côté dramatique de la situation, on dirait que la gestion de ce conflit macabre relève quelque part d’un bien plat truisme : mieux vaut vivre en paix sans chef que de vivre en guerre avec un chef !

Reste à savoir quelle sera la réaction des hommes de l’ombre qui, dans ce drame humain, ont fini d’administrer la preuve que ce sont eux qui, de loin, manipulent, corrompent, soudoient et tirent les ficelles de ce maudit jeu de scène tragique et cruel et cela dans le seul but d’assouvir de bien tenaces ambitions bassement égoïstes et éminemment personnelles. Pour le moment, la paix semble revenir à Guenon ; il lui faudra reprendre sa place à une guerre qui la lui avait usurpée. Mais cela ne saurait se faire qu’à certaines conditions

Croisons alors les doigts, que chacun accepte jouer sa partition en toute civilité, en toute loyauté, et en toute humanité ; l’interpellation s’adresse à l’Etat burkinabè, à l’appareil judiciaire de ce pays et aux habitants de cette petite bourgade de Guenon ! Aucun sacrifice n’est trop grand lorsqu’il s’agit de sauver des vies humaines. Et pour le cas qui nous préoccupe, de nombreuses personnes sont déjà mortes… des morts de plus… des morts de trop… il reste à œuvrer pour qu’ils ne soient pas morts pour rien !



Famille Liliou et les familles alliées : Nace, Koumenkam, Abatankora…
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L`Observateur Paalga N° 8221 du 27/9/2012

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