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PDP/PS: «Le parti n’est pas mort avec le Pr Joseph Ki-Zerbo»
Publié le mardi 12 avril 2016  |  FasoZine
Feu
© Autre presse par DR
Feu Joseph Ki-Zerbo




Fondé en 1994 par l’historien et politicien Joseph Ki-Zerbo, le Parti pour la démocratie et le progrès, Parti socialiste (PDP/PS) ne jouit sans doute plus de son aura d’antan. Cependant, malgré un apparent désaveu de l’électorat à l’endroit de cette formation politique, de fidèles militants croient à son renouveau. C’est dans cette dynamique d’action que lors du sixième congrès ordinaire tenu le samedi 2 avril dernier, ils ont confié les rênes du parti à Toro Drabo, enseignant vacataire au département de géographie de l’Université de Ouagadougou. Avec son vice-président, Samuel Somda, et les autres membres du bureau, il a la lourde tâche de replacer le parti en position idéale sur l’échiquier politique national. A travers cet entretien réalisé le dimanche 10 avril 2016 à Ouagadougou, les deux responsables évoquent, entre autres, la stratégie de relance du parti, la crise avec l’aile Mouvement de libération nationale – Burkina Faso (MLN-BF), conduite par Françoise Toé, candidate malheureuse à la présidentielle de novembre 2015 et leur soutien à Roch Marc Christian Kaboré à cette élection.



Fasozine: Comment se porte le parti des «papys»?

L’homme n’est pas réduit à son âge, l’homme c’est ce qu’on appelle la conscience. La conscience détermine tout. On est homme par la raison et le cœur. Pour parler de «papys», je vous dirai qu’il y a des «papys» dynamiques, propres, non corrompus et prêts à tous les combats. On peut avoir aussi des jeunes qui n’ont pas la conscience et qui ne donnent rien. La lutte, comme on le dit, c’est le peuple. On ne devrait pas voir la lutte en termes de jeunes ou de vieux mais en termes de conscience. C’est pourquoi, dans le passé, des jeunes ont pris le pouvoir et le résultat a été ce que vous connaissez. Quand Blaise Compaoré prenait le pouvoir, il était jeune et il était entouré de jeunes. Qu’ont-ils fait de ce pouvoir? Aujourd’hui au Burkina Faso, le peuple est exploité. Qui l’exploite? Un certain nombre de gens. Parmi ces gens, il y a des jeunes et des vieux. Et parmi ceux qui sont exploités, il y a également des jeunes et des «papys». Le problème pour nous ne se résume pas en termes de vieux, de jeunes mais en termes de lutte de classes. C’est cela la réalité des faits. On dit que nous sommes le parti des «papys» mais n’est-ce pas mieux d’avoir des papys conscients? Du reste, nous avons avec nous des jeunes conscients qui montent. Ils sont dans le parti, et même dans le bureau exécutif pour certains. Ce terme de «papys» a toujours été utilisé pour rabaisser le parti. On dit coûte que coûte, d’enlever les vieux. Non il faut enlever le vieux quand celui-ci n’est plus capable et n’est plus opérationnel. Il y a des «papys» opérationnels mais il y a aussi des jeunes non opérationnels.

Quelle stratégie compte mettre en place la nouvelle équipe que vous dirigez, pour redonner au PDP/PS lustre d’antan?

Comme toute organisation, nous devons penser à nos racines et à la société africaine. Nous devons emprunter des voies qui prônent le développement endogène. C’est à dire un développement conçu par nous, exécuté par nous et pour nous. Nous allons utiliser ce que nous avons. Comme le disait Jimmy Cliff, «nous allons utiliser ce que nous avons pour obtenir ce dont nous avons besoin». Et pour cela, nous allons faire recours à tous les anciens du parti. Nous allons nous appuyer sur eux pour mieux faire connaitre la doctrine et les objectifs du parti. Avec cette diffusion des idéaux du parti, beaucoup viendront prendre part à la lutte. Nous irons vers tout le monde pour leur expliquer notre vision du développement endogène, le développement africain. C’est parce que les gens ont délaissé ce type de développement que nous n’arrivons pas à décoller réellement. Aujourd’hui, notre parti est celui qui ne traine pas de casseroles derrière lui. Beaucoup de gens savent déjà que le parti est l’un des meilleurs et ils veulent s’engager à militer à nos côtés. En somme, nous allons entreprendre un travail de conscientisation.

Lors de la présidentielle du 29 novembre 2015, le PDP/PS a-t-il opté de soutenir Roch Marc Christian Kaboré du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP, au pouvoir)?

Lors des élections passées, nous avons été présents aux législatives dans six provinces. Malgré une certaine discrétion, le parti a pu bien battre campagne. Dans la province du Kadiogo par exemple, nous avons obtenu près de 2 000 voix, ce qui n’est pas mal par rapport aux législatives de 2012. Quant au soutien à la candidature de Roch, je dirai qu’avant les élections, nous avons réfléchi et nous nous sommes rendus compte qu’à la présidentielle de 2010, avec le candidat François Kaboré, nous avons occupé le dernier rang. Donc, pour cette année, nous n’avons pas vu de candidat à l’interne qui pouvait rehausser l’image du PDP/PS à la présidentielle. Si nous devions aller à cette élection pour se retrouver dernier de la liste, ce n’était pas la peine et cela allait porter un autre coup dur au parti. C’est ainsi que nous avons essayé de voir les partis qui avaient des candidats et qui sont de la même tendance idéologique que nous. Donc c’est par rapport à des alignements idéologiques que nous avons décidé de soutenir Roch Marc Christian Kaboré. Ce sont ces raisons qui nous ont amenés à soutenir un candidat d’obédience socialiste.

Qu’avez-vous gagné en contrepartie de votre soutien à Roch Marc Christian Kaboré, actuellement président du Faso?

Comme l’a dit Salifou Diallo, le président de l’Assemblée nationale, ce n’est pas une question de partage de dividendes. En toute sincérité, nous avons conduit le processus mais nous n’avons rien eu. Certes, pendant la campagne électorale, nous avons eu de l’appui financier pour mobiliser les militants et participer aux différents meetings qu’organisait le candidat du MPP. En dehors de cela, on n’a pas eu de récompense en tant que telle. Ce n’est pas à cause des postes que nous avons décidé de soutenir le candidat Roch et nous n’avons rien revendiqué non plus.

Qu’en est-il de la création du Mouvement de libération nationale/Burkina Faso (MLN/BF) de Françoise Toé, qui constituerait l’aile majoritaire du PDP/PS?

Le problème MLN/BF est né lors des législatives. Ce groupe a toujours travaillé de manière indisciplinée. Ce groupe, sans même contacter le président du parti, a organisé un congrès d’investiture de Françoise Toé. On ne peut pas tenir un congrès de désignation et d’investiture d’un candidat à la présidentielle sans que le président du parti ne soit informé. C’est dans la presse que nous avons lu que Françoise Toé est la candidate du PDP/PS. Et deux jours après que le président a dit qu’elle n’était pas la candidate du parti. C’est le secrétaire général adjoint qui s’est permis de convoquer ce fameux congrès sans en aviser le président. Nous avons donc mis fin à cette situation. Lors des législatives, cela s’est répété, c’est-à-dire qu’ils ont constitué leur liste de candidatures sans en aviser le bureau du parti. Au dépôt des listes, à la demande de la Ceni (Commission électorale nationale indépendante, NDLR) nous avons désigné notre mandataire en la personne de Mme Tiendrébéogo. Lorsque ceux de l’autre groupe sont arrivés, la Ceni leur a demandé d’aller voir la mandataire du PDP/PS et c’est ce qui les amenés à venir nous voir pour qu’on trouve ensemble des solutions. Nous étions au dernier jour de dépôt des listes et le président, une fois contacté, a dit qu’il n’était plus possible de procéder à une fusion des listes. C’est face à notre refus qu’ils ont décidé de prendre le nom de MLN/BF pour se constituer en regroupement d’indépendants.

Ceux du MLN/BF sont-ils toujours membres du PDP/PS?

Je voudrais préciser dans un premier temps qu’ils ne sont pas majoritaires, car le bureau a été élu par la majorité des sections du parti. Maintenant qu’ils sont au MLN/BF, lors de notre dernier congrès, il a été dit qu’un militant du parti ne peut appartenir à la fois à deux formations politiques. Mais comme la loi a évolué en permettant la participation des regroupements d’indépendants aux élections, nous avons aussi clairement indiqué qu’un militant ne peut être à la fois membre du parti et d’un regroupement d’indépendants. Nous avons remanié le règlement intérieur qui exclut d’office tous les militants appartenant à ce regroupement d’indépendants. Je crois que c’est clair et il faut qu’ils se mettent en tête qu’ils ne sont plus du PDP/PS, mais d’un regroupement d’indépendants qu’ils ont eux-mêmes nommé MLN/BF. S’ils le veulent, ils peuvent le transformer en parti politique. Pour les municipales à venir ils ont même copté un certain nombre de nos militants pour les amener au MLN/BF. S’ils avaient le souci de l’unité du parti, ils n’auraient pas agi ainsi. Qu’ils se mettent donc en tête qu’à partir de notre dernier congrès, ils ne font plus partie du PDP/PS.

Il semble que c’est parce que vous avez peur qu’ils prennent la direction du parti que vous avez anticipé dans l’organisation du dernier congrès sans les informer…

Nous ne pouvons pas comprendre que d’anciens membres du bureau politique qui se sont fourvoyés en allant au MLN/BF, veulent que nous les invitions à notre congrès. Nous ne pouvions pas les inviter parce qu’ils se sont exclus du parti dès lors qu’ils ont battu campagne avec un autre regroupement. Pour nous, ils ne font plus partie du PDP/PS et c’est pourquoi nous ne les avons pas invités. S’ils veulent, ils n’ont qu’à transformer leur MLN/BF en parti politique, cela ne nous regarde plus. Nous avons organisé notre congrès pour ne pas tomber dans l’illégalité car l’échéance pour le faire était pour le 13 avril et non pas parce que nous avons peur d’eux.

Après les départs comme ceux d’Emile Paré, d’Etienne Traoré, du Dima de Boussouma, de François Kaboré et les actuelles bisbilles avec l’aile de Françoise Toé, votre parti survivra-t-il à tous ces soubresauts?

Il n’y a pas de crise au PDP/PS. Ceux qui viennent et ne s’y sentent pas peuvent repartir. Ceux dont vous avez cité les noms, personne ne les a chassés. Ils sont partis d’eux-mêmes. Un combattant pour le progrès ne peut pas voir les résultats de sa lutte dans l’immédiat. Ceux qui sont au PDP/PS sont des combattants de longue haleine. Des jeunes viennent et partent et les vieux sont là et ne partent pas. Ils ont leur esprit chevillé au parti, même malgré l’absence de la force musculaire. C’est une vie normale au PDP/PS. Ce n’est donc pas une crise. A mon avis, tous les partis politiques vivent de départs et d’arrivées.

Quelles sont vos priorités pour la relance du parti?

C’est d’abord travailler à restructurer le parti en implantant des structures là où ne sommes pas représentés. Plus la société burkinabè va avancer, plus elle reposera sur des gens qui prônent des valeurs. Et là nous travaillerons comme un parti d’idées, sur des valeurs parce que les valeurs sont plus importantes que l’argent que l’on reçoit sur place. Nous allons travailler davantage sur l’idéologie. Nous pensons donc que dans cinq ans, c’est-à-dire d’ici à 2020, nous pourrons atteindre les résultats escomptés.

Finalement, au vu de tout ce qui se passe, n’est-on pas en droit de dire que le fondateur Joseph Ki-Zerbo, est décédé en 2006 avec son parti ?

Il est vrai que Joseph Ki-Zerbo n’est pas remplaçable. Je suis convaincu qu’il souhaite et veut que le parti qu’il a fondé demeure et reste indépendant sans aller dans la mouvance. Un parti survit à son fondateur. Nous n’avons pas intérêt à ce que le parti meurt, car s’il venait à disparaitre, ce sera comme une deuxième mort pour Ki-Zerbo. Nous ferons de notre mieux pour que le parti survive. Nous avons espoir…le parti n’est pas mort, il vit et il vivra.

Par Dimitri Kaboré
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