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L’Observateur N° 8402 du 25/6/2013

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Licenciement des jeunes volontaires : Courroux Marin, 3 000 naufragés !
Publié le mercredi 26 juin 2013   |  L’Observateur




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Ceux qui se demandaient si l'actuel locataire de la mairie de Ouagadougou aurait suffisamment de cran pour être aussi bibêga que son illustre prédécesseur peuvent à présent être rassurés : Marin a de la poigne ; l’homme sait bander les muscles et, par dessus tout, il sait prendre des mesures qui laissent bouche bée. Et ceux qui sont en passe d’en faire les frais sont sans doute les éléments de la Brigade des jeunes volontaires pour la sécurité routière.



Ils viennent en effet d’écoper d’une terrible fatwa que le maire, dans son courroux inextinguible, a lancée contre eux sans autre forme de procès. Et illico presto, 3 000 jeunes se retrouvent désormais sans emploi, renvoyés comme des malpropres sur un coup de colère. Trois milliers de jeunes travailleurs jetés dans la rue, ce n’est pas la fin du monde. Oui, mais c’est la fin de plusieurs mondes qui risque d’avoir cours.

Acte 1 de la tragédie : samedi 22 juin 2013, le gouvernement rencontre les forces vives de la région du Centre. A cette rencontre, les éléments de la Brigade des jeunes volontaires, qui étaient conviés, prennent la parole et exposent leur mécontentement. A leurs yeux, «rien» n’aurait été fait pour eux par l’Etat. L’édile de la capitale n’est pas du même avis, et c’est pendant qu’il expose ses arguments que les jeunes de la Brigade choisissent de quitter la salle de débat.

Acte 2 de la tragédie : le maire, qui n’entend pas s’en laisser conter, choisit la Maison des jeunes de la capitale pour fustiger l’attitude des "indisciplinés", laquelle constitue à ses yeux un affront grave à l’encontre des membres du gouvernement ainsi que de la municipalité qui, après tout, est leur employeur. Dans la foulée, il décide de mettre fin à leur collaboration ; ce qui signifie en termes clairs que les éléments de la Brigade sont purement et simplement licenciés. Fermez le ban.

Mais la décision du maire interpelle forcément. Pour plusieurs raisons : que le maire et le Gouverneur se sentent froissés par le comportement de ces jeunes, cela se comprend ; les actes d’irrespect ne grandissent personne. Mais de là à les "dégager" tous, pour reprendre cette frissonante terminologie sous la Révolution démocratique et populaire (RDP), il y a un pas qu’il ne fallait raisonnablement pas franchir. Car, enfin, pareille décision donne l’impression, par sa radicalité, qu’elle a été prise sur un coup de sang ; les réactions épidermiques ont la caractéristique de n’avoir pas été suffisamment réfléchies, et peuvent avoir des conséquences que l’on n’a pas forcément anticipées. Et puis, ça ne fait pas responsable, tout ça : l’impulsion, l’immédiateté de la décision ainsi que le caractère presque irrévocable qu’elle revêt. Et tout cela pour qui ? Pour quoi ? Dans quel intérêt ?

Cette mesure n'est pas sans rappeller une certaine décision qui, sous les années de plomb de la Révolution, licencia environ 1 500 enseignants sur un coup de tête et força autant de foyers à emprunter le dur chemin de croix dont certains ne se relevèrent jamais. Avec l’excuse qu’à l’époque le pays était sous un régime d'exception, pour un oui ou pour un non, on vous clouait au pilori et on le prenait ainsi.

Mais, enfin, à ce jour, les choses ont changé ! Et le digne maire de la capitale aurait dû nous faire l’économie d’une pareille décision dont le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle ne le grandit nullement. Pire, renvoyer dans les roses 3 000 jeunes travailleurs dans un pays où le chômage est endémique, c'est augmenter le nombre de mécontents d'un régime jugé à tort ou à raison être à l'origine du mal-être des "Burkinabè d'en bas".

Surtout que l’homme vient de prendre la clé et les rênes de sa capitale. Asseoir sa popularité ne nécessitait pas pareil châtiment. Dans le climat socio-politique des plus délétères qu’on vit au pays des hommes intègres, plus de dialogue et de tact n’aurait pas été vraiment inutile pour résoudre pareille incompréhension.

Car enfin on est en république, et si manifester pacifiquement son mécontentement n’est plus permis, on se demande, Bon Dieu, où on est ! Le petit peuple, si on lui refuse cette faculté, que lui reste-t-il à la fin ? Sous quel régime sommes-nous ? Sans compter que l’utilité de cette Brigade est attestée par la population, qui bénéficie des bienfaits de la régulation qu’elle fait d’une circulation routière des plus pénibles aux heures de pointe. Pourquoi n’avoir pas privilégié le dialogue, plus intelligent et plus productif ?

Sous d’autres cieux, on a vu jeter des œufs pourris, manifester bruyamment, séquestrer des autorités de l’Etat. Ici la chose s’est manifestée de façon pacifique : on n’a pas besoin de charrier.

Il s’agit ici du type de décision prise à la hâte mais qui peut avoir de graves conséquences. Il est vrai que, depuis un certain temps, les uns et les autres ont déploré une certaine forme d'effritement de l'autorité de l’Etat, mais sa restauration ne se fera pas par cette manifestation d’autoritarisme qui confine à un aveuglement qui réduit au chômage des milliers de volontaires et touche par ricochet presque autant de familles que l’on condamne à végéter et Dieu sait pour combien de temps. Monsieur le Maire, la balle est dans votre camp ! Il faut que la raison prévale ; en toute sérénité, sans acrimonie et sans passion ! Ne serait-ce que par simple humanité !



Jean Claude Kongo

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