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Candidatures indépendantes : «Le Conseil constitutionnel doit se prononcer»
Publié le mardi 25 septembre 2012   |  L’Observateur




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Depuis longtemps, la question des candidatures indépendantes suscite des débats interminables. Si pour bon nombre d’organisations de la société civile, la loi électorale doit permettre aux citoyens non affiliés à un parti d’être éligibles, les partis politiques, eux, ne l’entendent pas de cette oreille. A l’occasion des élections couplées du 2 décembre prochain, la question a refait surface, et le porte-parole des partisans des candidatures indépendantes, Luc Marius Ibriga, nous confie, à travers l’interview qui suit, les raisons de leur combat.


Présentez-vous aux lecteurs


• Luc Marius Ibriga, maître assistant de droit public à l'université Ouaga II, porte-parole de la Coalition pour la candidature indépendante, qui est un regroupement de citoyens et d'organisation, notamment le Mouvement burkinabè des droits de l'homme et des peuples et la Coalition des organisations de la société civile pour les réformes politiques et institutionnelles. Cette structure est ouverte à tous ceux qui pensent que la question de la candidature indépendante est la défense d'un droit constitutionnel.


Justement sur le plan juridique, sur quoi vous vous êtes fondés pour soumettre une liste de candidatures indépendantes à la CENI dimanche dernier ?

Il y a, à notre sens, cinq (5) dispositions de la constitution qui fondent notre action :

- premièrement il y a l'article 1er, alinéas 1 et 2 de la Constitution, qui dispose que : "Tous les Burkinabè naissent libres et égaux en droit. Tous ont une égale vocation à jouir de tous les droits et de toutes les libertés garantis par la présente constitution" ; l'article 12, alinéa 1 de la même Constitution dispose également : "Tous les Burkinabè sans distinction aucune ont le droit de participer à la gestion des affaires de l'Etat et de la société. A ce titre, ils sont électeurs et éligibles dans les conditions prévues par la loi". Cela veut dire que la loi peut aménager ce droit, mais ne peut pas en enlever l'exercice au citoyen. Plus loin, l'article 13, en son alinéa 2, poursuit : "Ils (les partis et formations politiques) concourent à l'animation de la vie politique, à l'information et à l'éducation du peuple ainsi qu'à l'expression du suffrage".

Quant à l'article 32, il stipule : "La souveraineté nationale appartient au peuple, qui l'exerce dans les conditions prévues par la présente constitution et par la loi». Enfin, l'article 33, alinéa 2, dispose : «Le suffrage direct est toujours universel, égal et secret". Nous avons constaté que jamais la loi électorale n'a été soumise aux juges constitutionnels pour qu'ils jugent de sa constitutionnalité ou non. Nous avons cherché des situations analogues et nous nous sommes rendu compte qu'au Mali en 1996, l'Assemblée nationale avait voté une loi comme celle qui nous préoccupe aujourd'hui.

A l'époque, la Cour constitutionnelle malienne a invalidé cette loi en soulignant que, "dans un système de démocratie pluraliste, les candidatures, sous réserve des conditions d'éligibilité définies par la loi, sont libres, c'est-à-dire que chacun a le droit de se présenter fût-ce de son propre chef". Nous sommes dans la même situation, et c'est fort de cela que nous avons décidé de mettre le débat sur la place publique. Le débat a été jusque-là escamoté et accaparé par les partis politiques. Nous sommes à une période de réformes pour renforcer la démocratie, et il n'y a pas meilleur moment que celui- là pour poser l’acte que nous avons posé hier (NDLR dimanche dernier) en vue d’approfondir la réflexion.



Ne pensez-vous pas que vous menez un combat d'arrière-garde d'autant que le Conseil constitutionnel est en phase avec le code électoral ?


• Non, le Conseil constitutionnel n'est pas en phase avec le Code électoral. Vous savez qu'il ne peut pas être saisi par un citoyen, puisque la Constitution réserve ce privilège au président du Faso, au Premier ministre, au président du Sénat, au président de l'Assemblée nationale et à un dixième (1/10e) au moins des membres de chaque Chambre du Parlement. Par ailleurs, ces personnes ne peuvent le faire que lorsque la loi n'est pas encore promulguée, mais, pour le code électoral actuel, personne ne l’a fait. C'est cette attitude qui fait d‘ailleurs qu'on a beaucoup de lois anticonstitutionnelles.

Mais la chance, c'est que la révision constitutionnelle de juin 2012 a introduit deux (2) innovations majeures : l'article 157, alinéa 2, dispose que : "Si à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et liberté que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation» ; ça veut dire qu'un citoyen devant le juge peut demander qu'on interroge le Conseil constitutionnel quant à la légalité d'une loi.


Vous êtes donc dans ce cas ?


• Oui, à la seule différence qu'on n’est pas encore devant le juge. L'innovation majeure de la révision de juin 2012, alinéa 3, de l’article 157 précité dispose que : "Le Conseil constitutionnel peut se saisir de toutes les questions relevant de sa compétence, s'il juge nécessaire". Voilà une question fondamentale de constitutionnalité. Alors, Conseil constitutionnel, saisissez-vous-en, puisque vous n'avez jamais eu l'occasion de vous prononcez là-dessus. Nous sommes dans un Etat de droit, si cette instance se prononce, on n'a plus d'action judiciaire à faire.



Qu'allez-vous faire concrètement après le refus de la CENI de recevoir votre dossier ?


• Nous avons deux (2) approches possibles, mobiliser le plus grand nombre de Burkinabè pour dire qu'il est temps qu'on nous restitue nos droits. La candidature indépendante va améliorer le fonctionnement des partis politiques en instaurant la démocratie interne. Vous avez remarqué que beaucoup de partis ont attendu le dernier moment pour déposer la liste afin d’éviter que les gens aillent ailleurs. Des gens qui étaient placés en cinquième position au niveau de la base se retrouvent en tête de liste. Où est la démocratie ?

A quoi servent les primaires sans démocratie interne ? Ailleurs, comme au Niger, la candidature indépendante est permise, mais il n'y a aucun député indépendant. C’est le dynamisme des partis qui a créé cette situation de monopole de fait et non de droit. Après le plaidoyer, il y a la voie judiciaire, et nous entendons exercer tous nos droits. La CENI n’avait pas le droit de refuser notre dossier parce que l’administré a droit à ce que sa cause soit examinée. Il est possible pour nous de recourir aux instances supranationales.



Ne pensez-vous pas que vous menez un combat d’arrière-garde auprès de la CENI, qui n’est pas une instance habilitée à examiner votre problème ?


• Ce n’est pas un combat d’arrière-garde, parce que la question de la candidature indépendante avait fait l’objet d’une pétition engagée par le MBDHP, et en son temps, l’administration n’avait pu déterminer qui du préfet ou du maire devait parapher une pétition. En 2009, la requête a été aussi soumise à l’Assemblée nationale par la société civile, et tout récemment dans le cadre du CCRP et des assises nationales, nous avons fait le plaidoyer, mais les débats étaient biaisés, car on se bornait à des questions dites consensuelles. Ces élections couplées sont encore pour nous une occasion de nous faire entendre. Nous pensons que le Burkina Faso s’honorerait en donnant la liberté aux citoyens.



N’est-ce pas paradoxale de présenter une liste alors que vous êtes des indépendants ?


• C’est le mode du scrutin qui nous y oblige. Nous sommes indépendants parce que nous n’avons aucune attache avec un parti politique. Cela dit, nous ne sommes pas contre les partis politiques, nous voulons que ceux-ci aient une force réelle et non octroyée. Nous avons vu hier (NDLR : dimanche dernier) des partis qui n’ont pu réunir les documents nécessaires. Si les gens ne s’intéressent pas aux élections, c’est qu’il n’y a pas une offre politique de qualité pour les séduire. Les candidatures indépendantes sont un ferment de la démocratie, c’est pourquoi nous ne nous lasserons jamais de ce combat.



Propos recueillis par

Abdou Karim Sawadogo

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