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Me Bénéwendé Stanislas Sankara à propos de l’alliance avec le MPP : « Nous discutons pour que ce ne soit pas une alliance où on va à la soupe »
Publié le lundi 21 decembre 2015  |  Le Quotidien
Décorations
© aOuaga.com par A.O
Décorations : la nation reconnaissante à plus de 800 de ses fils
Jeudi 10 décembre 2015. Ouagadougou. Palais de Kosyam. Plus de 800 personnes ont été décorées à la veille du 55e anniversaire de la fête nationale de l`indépendance pour services rendus à la nation en présence du président de la transition, président du Faso, Michel Kafando. Photo : Me Bénéwendé Sankara, président de l`UNIR/PS




Me Bénéwendé Stanislas Sankara, candidat malheureux à l’élection présidentielle du 29 novembre 2015 dont le parti est la 4e force politique à l’issue des législatives a coupé court aux rumeurs qui circulent par rapport à son alliance avec le MPP. « Affirmatif !», a-t-il révélé à votre journal le vendredi 18 décembre 2015 lors d’une interview avant même que les instances de son parti ne s’y prononcent.
Le Quotidien : A l’issue de l’élection présidentielle, le candidat Me Bénéwendé Sankara de l’UNIR-PS a été classé 4e après Roch Marc Christian Kaboré, Zéphirin Diabré et Tahirou Barry. Quels sont vos sentiments ?

J’allais être à l’aise pour mieux vous répondre si la même question avait été posée à celui qui a été 14e.

Me Bénéwendé Stanislas Sankara, président de L’UNIR/PS :
Etes-vous satisfait de ce classement ?

Pas du tout parce que je ne suis pas allé à l’élection présidentielle en perdant. Je suis allé avec la conviction de gagner. Je prends acte et j’en tirerai toutes les leçons aussi bien pour moi que pour le parti. C’est pourquoi d’ailleurs, en la matière, je dis que je ne perds jamais. J’apprends toujours. Se retrouver avec 2,63% de voix est un score vraiment en deçà de mes attentes et de celles de mes militants dont je connais l’abnégation et la détermination.

Qu’est-ce qui n’a pas marché ? Au regard de l’engouement des militants pendant la campagne, apparemment beaucoup de candidats ont été désillusionnés…

Je pense que c’est prématuré de tirer des conclusions. Nous avons convoqué le bureau politique le samedi 19 décembre 2105 pour faire le 1er bilan. D’ores et déjà, ce qui a manqué au premier chef c’est les moyens financiers. Nous n’avions que la subvention de l’Etat comme principale ressource. Un parti comme l’UNIR-PS, les militants ne cotisent pas. Les 100 F CFA de cotisation mensuelle ne rentrent même pas. C’est un handicap sérieux. Je comprends maintenant que les gens ne mettent pas devant leurs convictions politiques, mais l’argent. Je pensais autrement. Voilà l’une des leçons que je tire.

Qu’en est-il des résultats pour les législatives ? Avec 5 députés, vous êtes la 4e force politique après le MPP, l’UPC et le CDP. Etes-vous satisfait ?

Pas du tout. Nous avons successivement eu lors des précédentes législatures 3 et 4 députés. Maintenant, nous sommes 5 députés. Mais cela ne reflète toujours pas la réalité. Quand nous sortions pour les meetings, il y avait foule. Mais rappelez-vous que beaucoup aussi n’avaient pas de cartes d’électeurs. C’est vrai que tout à l’heure j’ai parlé de manque de moyens financiers, mais il faut reconnaître que ceux qui couraient, qui se disaient des insurgés et malgré les efforts que nous avons fait pour les sensibiliser n’avaient pas de cartes d’électeurs. Le résultat de 5 députés que nous avons eus est en deçà de la structuration du parti. L’UNIR-PS est sur le terrain politique depuis 15 ans. Nous avons des structures qui ont une certaine implantation. Ce n’était pas des questions organisationnelles. Nous allons tirer toutes les leçons. Mais ce sont les mêmes causes. C’est vrai que les gens disent qu’avec nos 5 députés, nous sommes des faiseurs de roi. Mais ce n’est pas le défi que nous avons voulu au début. Nous avons voulu avec l’UNIR-PS montrer que nous sommes un parti suffisamment organisé et que nous avions un projet de société qui prenait en compte les aspirations actuelles du peuple burkinabè. Nous avons eu contre nous la quête effrénée de l’unité des sankaristes. Cela a joué contre nous. C’est malheureux. L’UNIR-PS est resté le seul parti sankariste visible qui a eu des députés. Les Mosse disent que le germe qui est à l’intérieur tue la graine. Mais il faut dire merci à Dieu pour les résultats que nous avons obtenus. Même si c’était un seul député, l’essentiel est qu’il reflète la vie de notre peuple.

Madame Sankara avait annoncé son arrivée à Ouagadougou pour vous soutenir. Finalement, c’est un message de soutien qu’elle a envoyé. Son absence vous a-t-il desservi ?

Très rapidement, nos détracteurs se sont servis de cela pour dire que si elle venait, elle allait essuyer la honte. Elle a envoyé un message de soutien. Mais ce n’était pas suffisamment pour convaincre les plus sceptiques même si elle a dit que c’était pour des raisons de santé. J’en conviens avec vous.
Si l’on analyse les résultats grosso modo, on a l’impression que l’ancienne opposition n’a pratiquement pas eu grand-chose à part l’UPC quand on considère que le MPP est un transfuge de l’ancienne majorité…

Rappelez-vous de l’histoire de l’UPC. Quand elle venait en 2010, c’était une force politique toute nouvelle mais pas vierge parce que nous nous connaissons tous. Aux législatives de 2012, elle a bousculé très rapidement l’UNIR-PS pour prendre la place du chef de file de l’opposition. D’un point de vue de l’analyse politique, il faut inscrire cela dans les mutations sociales. Ce sont les aspirations de l’heure. Je pense que c’est en fonction de cela que le MPP, avec la plate-forme qui existait par rapport à la non modification de l’article 37, est arrivé 1er à l’issue de ces élections. Le MPP après sa création a adhéré au chef de file de l’opposition politique. Sur ce plan, il faut rappeler que le combat que j’avais mené était la clarification du chef de file de l’opposition. Il s’agissait de la définition même du parti de l’opposition. Souvent on oublie. On voit seulement le cadre institutionnel. Nous avons mené la lutte contre l’ADF-RDA qui avait même usurpé le titre du chef de file de l’opposition. Elle avait un représentant à la CENI alors qu’elle était dans la majorité ou la mouvance selon les expressions. Nous avons dû clarifier cela. Cette loi a permis de créer l’institution où seuls les partis de l’opposition s’y retrouvent. Ils sont organisés avec un responsable qui est le président du parti de l’opposition ayant plus de députés. Personne ne peut quereller au MPP d’avoir été de l’opposition et d’avoir soutenu la même plate-forme que les autres partis de l’opposition. C’est pour l’histoire.

Selon vous, c’est l’ancienne opposition qui a triomphé à ces élections ?

Bien sûr et de la belle manière. Maintenant je regrette que certaines personnes pour des calculs politiques veuillent oublier l’histoire.

Après l’épisode des élections, place est maintenant au jeu des alliances quand on sait que le MPP n’a pas obtenu la majorité absolue pour siéger seul à l’Assemblée nationale. Il se susurre que le MPP vous fait la cour. Confirmez-vous cela ?

Affirmatif !

Quelles sont les raisons qui vous ont amené à accepter ?

D’abord le MPP est de la social-démocratie. L’UNIR-PS est un parti socialiste d’obédience sankariste. Avec le MPP et d’autres partis politiques, nous appartenons à la grande gauche. Nous avons même à une certaine période pour des raisons politiques suspendu notre participation. Nous avons appartenu au même regroupement qu’est le chef de file de l’opposition. L’essentiel aujourd’hui est que le projet que nous avons proposé ait des concordances avec le programme du candidat du MPP. Nous discutons sur ces aspects pour que ce ne soit pas une alliance où on va à la soupe comme certains le susurrent. Je suis d’accord avec le secrétaire général de le CGTB quand il dit qu’il n’y aura pas de trêve sociale pour le président Roch Marc Christian Kaboré. Pendant la campagne, j’ai passé tout mon temps à dire que nous aurons une transition dans une transition. Il faut un gouvernement qui va faire face immédiatement aux grandes préoccupations des populations. A ce niveau, nous avons plus intérêt à conjuguer nos efforts et nos énergies pour travailler à ramener la démocratie par le bas. Ce sont des questions qui sont laissées à l’appréciation de tous les Burkinabè mais aussi de l’UNIR-PS qui est un parti d’avant-garde. Il réunira ses instances pour réfléchir à cela. Mais de mon point de vue, ce qui est annoncé comme gouvernement d’alliance populaire devrait être l’esprit de l’insurrection populaire en terme de défis à relever sur tous les angles que ce soit la lutte contre l’impunité et la corruption. Très souvent, j’attends les gens se poser des questions. C’est vrai que le système Blaise Compaoré reste intact. C’est son régime qui n’est pas là. Mais qu’est-ce qui prouve que ce ne sera pas le début du démantèlement du système pour alterner avec une autre gouvernance ? Il faut juger le maçon au pied du mur.

15 ans dans l’opposition, est-ce que vous n’êtes pas fatigué ou bien le temps est venu de vous reposer ?

M. Hermann Ouédraogo, vous voyez bien que je ne chôme pas dans mon cabinet. J’ai du boulot. J’ai dû fermer momentanément pour des activités politiques parce que pour moi c’est un sacerdoce.
Peut-on s’attendre à voir Me Bénéwendé Sankara ministre ? Cela fait-il des clauses de votre négociation ?

Quelqu’un a écrit sur la toile que l’opposition est la case de Me Sankara. Cela m’a fait rire. C’est vrai que mon parcours politique pendant 27 ans, je me suis opposé à Blaise Compaoré depuis le 15 octobre 1987. En 2000, j’ai créé avec des camarades l’UNIR-MS. Mais quand on crée un parti politique, c’est la conquête du pouvoir d’Etat sinon j’allais créer une association. Me Sankara vise la conquête du pouvoir d’Etat. Donc je ne suis pas fatigué. Celui qui a été élu est plus âgé que Me Sankara ou bien ? (Rires aux éclats).

Mme Sankara aurait désapprouvé votre choix de faire alliance avec le MPP et aurait souhaité que le nom de son mari n’y soit pas associé. Cela est-il vrai ?

Je ne peux pas confirmer. Il faut poser la question directement à Mme Sankara. Pour dire vrai, j’ai entendu parler. Mais je n’ai rien vu. Certaines personnes ont dit qu’on aurait usurpé sa page facebook. Honnêtement, je n’ai pas lu. Si c’est vrai, elle doit avoir une bonne raison. Aujourd’hui, le nom Sankara appartient à toute l’humanité. Je dois rappeler que j’ai été de ceux-là qui ont soutenu que l’on ne devait pas utiliser les noms des héros sur les bulletins de vote. La loi est toujours là. Pour moi, ce n’est pas une innovation. Dans tous les cas, le nom de son mari est le nom de son mari. Elle est ayant-droit. Si elle veut protéger le nom de son mari, c’est sa liberté. Mais je ne suis pas sûr que ça vienne d’elle. Mais si c’est vrai, c’est sa liberté.

Pourriez-vous avoir la même indépendance une fois à la majorité présidentielle vis-à-vis de certains dossiers notamment de justice ?

La loi portant statut de l’avocat prévoit des incompatibilités. Si je suis ministre pour servir mon pays, je tirerai toutes les conséquences. Rappelez-vous que je me suis battu pour que le député même s’il est avocat puisse plaider. Cela a permis à beaucoup de confrères de se jeter en politique. Ce qui améliore même la qualité du débat politique. Mais si vous êtes dans le gouvernement en tant que ministre, il doit avoir une incompatibilité. De ce point de vue, il y a des avocats talentueux qui peuvent continuer le combat que je mène. Rappelez-vous que je ne travaille pas seul. Il n’y a pas d’inquiétude à ce niveau.

Le CNT a pris des résolutions portant mise en accusation de deux anciens ministres, en l’occurrence Lucien Marie Noël Bembamba et Sidi Paré. Quelle appréciation faites-vous ?
Ce n’est pas la première fois. Beaucoup de dignitaires de l’ancien régime sont poursuivis.

Ils sont en attentes d’être jugés…

C’est comme une inculpation. Le juge va faire un travail de recherche d’indices et de confrontations des témoignages avant que le dossier ne soit clôturé et qu’il y ait une ordonnance de renvoi de jugement. La mise en accusation est une disposition prévue par la Constitution parce que ce ne sont pas des citoyens ordinaires. Il faut d’abord lever l’obstacle. C’est comme les officiers de police judiciaire. C’est ce qui explique la lenteur. Ne cherchons pas une justice expéditive. Je ne voudrais pas faire des comparaisons. Mais qui aurait cru que dans l’affaire Thomas Sankara, on nous aurait résisté pendant 17 ans ? La justice finit par triompher. C’est pour cela que nous luttons pour qu’il y ait la séparation des pouvoirs. Il y a des signes forts qui sont donnés. Il y a le Conseil supérieur de la magistrature dont le premier responsable est un haut magistrat. Je félicite Thérèse Sanou qui vient d’être nommée. En droit, même si on connait le coupable, il faut suivre toute la procédure et respecter toutes les garanties. Même le criminel a droit à la défense.

Quelle est selon vous la priorité pour le nouveau pouvoir ?

Tout est prioritaire. Dans mon programme, nous avons internalisé les travaux de la Commission nationale de réforme et de réconciliation. Si nous étions élus, il fallait tout de suite faire de la réconciliation un impératif. Il faut que les Burkinabè se surpassent pour partir à la cohésion sociale en réglant bien sûr ce qui divise. Nous le savons tous. Il y a des questions politiques, mais il y a aussi celles liées à la justice. Il y a en que l’on peut régler tout de suite. D’autres aussi doivent être régler autour du dialogue politique. Quand j’étais chef de file de l’opposition politique, j’avais écrit au fronton l’exigence du dialogue politique. Cela a payé. La réconciliation nationale de mon point de vue est un impératif incontournable. Il faut que les fils et les filles de ce pays se parlent. Il faudrait que l’on lave notre linge sale en famille. Déjà la communauté internationale a salué la maturité politique des Burkinabè. Nous sommes aujourd’hui un peuple modèle parce que nous avons pu régler nos différends sans intervention extérieure. Continuons dans cette lancée. Je crois que les nouvelles autorités sont dans la prédisposition de créer une vraie union nationale. C’est dans cette lancée, je crois que le MPP parle de gouvernement d’alliance populaire. On ne dit pas qu’il faut dénuer à l’opposition son rôle de s’opposer. Mais cela doit se faire dans le sens de l’ancrage de la démocratie et des institutions de notre pays. Il faudrait que l’on mette devant les questions de paix et de justice sociale comme préalables avant d’aller sur les chantiers de développement. Si on vous dit que la maladie n’a pas de trêve, cela veut dire que le gouvernement n’aura pas de trêve1


Interview réalisée par Raogo Hermann OUEDRAOGO
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