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Affrontement entre armée loyaliste et RSP : Des riverains du camp Naaba Koom 2 témoignent
Publié le jeudi 1 octobre 2015  |  Le Quotidien
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© Autre presse par D.R
Des éléments de l`ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP) dans la cour et la devanture de l`hôtel Laico à Ouaga 2000 durant leur éphémère putsch




Le mercredi 30 septembre 2015, après l’affrontement entre l’armée loyaliste et le défunt RSP, nous sommes allés à la rencontre de quelques riverains du camp Naaba Koom. Ils racontent le calvaire qu’ils ont vécu même si, ont-ils reconnu, il n’y a pas eu de dégât matériel et humain. L’ambiance était celle des autres jours. Les habitants vaquaient à leurs occupations habituelles. Seulement quelques artères étaient interdites d’accès.

Abdel Aziz Ismaël Ouattara, locataire situé à 300 mètres du camp Naaba Koom « Les tirs ont été vraiment un traumatisme »
Quand on nous avait informé de rester à la maison, on n’imaginait pas c’était en vue d’un affrontement. A plusieurs reprises, on avait su que le quartier était en sursis mais de là à imaginer un affrontement, non. Les tirs ont été vraiment un traumatisme. On a ressenti une grande peur. Le Burkina n’a jamais connu d’antécédent dans un conflit interne au sein de l’armée. Il est vrai qu’il y a eu le conflit de 2011 entre militaires et policiers, mais cela n’avait pas eu cette ampleur. On se réjouit déjà que les choses aient été brèves. On était tous terré dans nos maisons, les lumières éteintes et on est resté dans cette position de 15h à 20h. Les informations n’étaient pas très fluides et on ignorait ce qui se passait. A la RTB, on ne nous a pas dit grand-chose. Omega FM a diffusé une interview de Diendéré mais qui ne reflétait rien de la réalité et surtout que c’était caution à beaucoup d’interprétations. Je me demande comment un général puisse donner un mot d’ordre et des éléments récalcitrants puissent s’opposer à cela et tenir toujours les armes ? On était un peu sceptique et on avait peur de ce qui allait se passer. A des intervalles assez distants, on entendait souvent des tirs sporadiques. Par exemple à 16h on entendait des lourdes décharges. Peu de temps c’est le silence. Pareil vers 17h et ainsi de suite. On est resté dans cette incertitude jusqu’au matin. Même ce matin on a entendu quelques tirs mais on ne sait pas trop ce qui se passe. Au préalable on aurait voulu déguerpir comme on l’a déjà fait à plusieurs reprises mais à un moment donné on se lasse. On est déjà parti deux fois mais il n’y a rien eu. Cette fois-ci on n’était pas trop disposé à partir. Cela été dur. On a beaucoup eu peur, mais on a chacun évoqué Dieu. Heureusement que tout est rentré dans l’ordre.

Sauzeraus Jean Yves, franco-burkinabè, retraité
« Il y a eu des coups d’armes lourdes avec de gros calibres qui faisaient vibrer les fenêtres »
On est près de l’endroit où se sont passés les évènements. Donc la journée d’hier, on a attendu que ça se passe. Comme ils étaient tout justes à côté à chaque fois qu’ils tiraient les mitrailleuses on était aux premières loges pour entendre les bruits des détonations. Cela nous a vraiment fait peur. Dans l’après-midi, il y a eu des coups d’armes lourdes avec de gros calibres qui faisaient vibrer les fenêtres. Ce qu’on craignait c’est qu’il y ait des ripostes des gens car le camp est à moins d’un kilomètre d’ici. Donc s’ils avaient riposté aux forces loyalistes, on risquait de prendre des éclaboussures. On souhaite que tout cela se termine. Si je sors aujourd’hui c’est que les choses se sont calmées. En fin de compte, les militaires des deux côtés n’ont aucune raison de s’en prendre à la population car c’est un problème qu’ils doivent régler entre eux. Il faut bien qu’on continue à vivre et à manger. C’est la raison pour laquelle je suis obligé de me déplacer.

Tiablé Coulydiati, gardien
« C’est aux environs de 15h que l’on a commencé à entendre les tirs et ce jusqu’à 20h »
On peut dire que c’est aux environs de 15h que l’on a commencé à entendre les tirs et ce jusqu’à 20h. On était dans la maison et on ne pouvait pas sortir. C’est par la suite que le propriétaire nous appelé pour nous rassurer de sortir parce que les tirs avaient cessé. Le propriétaire de la cour était absent avant le coup d’Etat. Il était hors du pays. C’est de l’extérieur qu’il nous a appelés pour nous rassurer de sortir. Sa famille non plus n’est pas présente. On constate ce matin qu’il n’y a rien.

Idrissa Kanazoé, gardien
« On entendait la terre qui tremblait »
On ne souhaitait pas cela. Mais comme c’est arrivé nous n’avons d’autres vœux que de nous confier à Dieu et prier pour qu’il y ait la paix. La plupart des propriétaires n’habitent pas les maisons. Les locataires qui habitaient avec nous sont partis à cause de la crise. Depuis hier soir quand on a entendu la nouvelle, on a cherché un abri vers les maisons en étage pour nous cacher. On entendait la terre qui tremblait et on ne savait pas qu’on allait sortir sain et sauf. Jusque-là on peut dire que ça va. Grâce à Dieu dans la zone on n’a eu de dégâts ni de pertes en vies humaines. On peut dire qu’on a eu la chance parce qu’on a été informé plus tôt.

Saïdou Ouédraogo
« C’était tellement chaud qu’on ne pouvait même pas se concentrer pour prier»
Comme on a été informé de ne pas sortir, on a été obligé de rester à la maison. Le principal problème est qu’on n’arrivait pas à trouver à manger. On entendait les coups de fusil mais on n’a pas appris qu’il y a eu de pertes en vie humaine. C’était tellement chaud qu’on ne pouvait même pas se concentrer pour prier. Si tu commences et que tu entends un coup de feu, tu perds le réseau avec Dieu. Il y a eu des tirs de petits calibres mais c’était juste pour effrayer les gens afin qu’ils puissent rester chez eux. Pour cette fois c’était un peu plus sérieux.

Sabine Bamogo
« La plupart des gourous ont fui »
On était au travail quand on nous à prévenu de rentrer parce que la situation était tendue. On s’est par la suite retrouvé chez une vieille. A un moment donné on était devant la porte et on a vu les militaires qui faisaient face à la maison de la vielle. Il y a un parmi eux qui nous a menacés de déguerpir sinon on aura une balle. Quand ils ont commencé les tirs, on a été obligé de repartir chez un autre voisin car la maison de la vielle n’était pas solide. Je ne sais pas s’ils ont su que nous étions là-bas, mais ils ont renvoyé une balle encore vers nous. Heureusement la balle est passée juste derrière moi et se dirigeait vers un autre monsieur qui, à son tour, s’est abaissé. On ne pouvait vraiment pas rester dehors. Finalement on est resté ensemble jusqu’au matin. La plupart des gourous ont fui, mais nous les pauvres on n’avait pas trop le choix. On est resté tout en se confiant à Dieu et Dieu merci on n’a rien eu.

Laurent Ilboudo
« Aux environs de 20h, on entendait des cris qui remontaient vers la classe A de Ouaga 2000 »
Un peu plus tôt dans la matinée, l’endroit était plus calme et la peur n’était aussi avancée. Mais au fur et à mesure que le temps passait il y a eu plus de peur parce qu’on entendait des tirs aux armes lourdes. Quand on a fait le communiqué pour dire aux gens de rentrer chez eux, beaucoup ont commencé à ranger. Un peu plus tard aux environs de 20h, on entendait des cris qui remontaient vers la classe A de Ouaga 2000, mais malheureusement personne ne pouvait aller voir ce qui se passait à cause de la peur. On ignorait si la personne a été touchée ou s’il s’agissait de dégâts matériels. On est resté chez nous et c’est entre 2h et 3h du matin qu’on a constaté que les tirs avaient cessé. Ce matin est calme et les gens ont repris leurs activités comme d’habitude. Les gendarmes ont barricadé chez le Nonce apostolique parce qu’il semblerait que le général s’y trouve. Mais notre souhait est que cela ne se répète pas une troisième fois car cela risque d’être compliqué.
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