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Sidwaya N° 7257 du 19/9/2012

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Intervention de la Cedeao au Mali : « Le problème est à Bamako »
Publié le jeudi 20 septembre 2012   |  Sidwaya


Blaise
© Getty Images par DR
Blaise Compaoré le Président du Burkina Faso


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Présent en France dans le cadre d’une visite d’amitié et de travail, le président du Faso, Blaise Compaoré, a accordé une interview à la télévision France 24, le mercredi 19 septembre 2012. L’envoi des troupes militaires de la CEDEAO au Mali et les négociations avec les groupes islamistes occupant la partie septentrionale du pays sont, entre autres, les questions auxquelles le médiateur de la crise malienne s’est prêté. Sidwaya reprend pour vous cet entretien.

France 24 (F24) : Vous êtes le médiateur de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cela fait des mois que l’on parle d’une intervention des militaires de la CEDEAO. Il y a eu des réunions au niveau régional, une autre qui est prévue en marge de l’Assemblée générale des Nations unies le 26 septembre 2012. On a l’impression que les choses sont enlisées ?

Baise Compaoré (BC) : On peut regretter que malgré l’engagement et la détermination de la communauté internationale et bien sûr de la grande disponibilité de la CEDEAO, nous constatons que le processus de sortie de crise au Mali est en manque de souffle. Cela, d’une part, à cause de la fragilité des institutions républicaines à Bamako et d’autre part, du fait qu’il n’y ait pas un engagement très ferme pour aller au dialogue politique. Sans oublier qu’il y a la difficulté pour la CEDEAO et le Mali à s’accorder sur le dispositif militaire à mettre en place.

F24 : Le Mali, par l’intermédiaire de son président par intérim, Dioncounda Traoré, a officiellement demandé l’aide militaire de la CEDEAO, mais de façon très limitée que ce soit pour le nombre des troupes, mais aussi géographiquement. La CEDEAO peut-elle intervenir dans ces conditions ?

BC : C’est vrai qu’il y a eu la requête, mais les conditions qui accompagnent cette requête font qu’il est impossible pour la CEDEAO, aujourd’hui, d’être de façon efficace, sur le terrain. Ce qui fait que les discussions continuent avec les autorités maliennes.

F24 : Il n’y aura pas pour le moment de nouvelle demande d’une résolution du conseil de sécurité des Nations unies parce qu’en gros, c’est impossible ?

BC : Pour le moment, il va falloir attendre que les deux parties : la CEDEAO et le Mali puissent s’accorder sur un dispositif avant que cela soit apprécié correctement.

F24 : Est-ce que c’est au sein de la CEDEAO que certains Etats sont moins volontaires pour envoyer des soldats ou le problème se situe-t-il à Bamako ?

BC : Je pense que, pour l’instant, le problème est à Bamako, parce que Bamako voudrait avoir les troupes de la CEDEAO, mais il ne souhaite pas les avoir dans le Sud du pays. Alors qu’il est impossible pour la CEDEAO d’être efficace si elle n’a pas d’aéroport, d’antenne médicale et de transmission dans cette région. Si elle n’a pas aussi un dispositif qui permet d’éviter que les mouvements armés, par des infiltrations, puissent destabiliser Bamako, où il y a des ambassades des pays qui vont s’engager et aussi la représentation de la CEDEAO. Tout cela fait que la CEDEAO veut intervenir, mais en tant que partie malienne.

F24 : Où est le blocage à Bamako ? Est-ce le capitaine Sanogo, le Premier ministre ou le président de la transition ?

BC : C’est probablement parce qu’il manque un leader actuellement dans ce processus du côté du Mali.

F24 : Vous êtes aussi en contact avec les forces qui contrôlent le Nord du Mali. Ici en Occident, on les considère comme des fous de Dieu, des terroristes fanatiques. Vous leur parlez, ça ne plait pas à tout le monde dans la région. Est-ce que ce sont des gens avec qui on doit discuter ?

BC : Nous partons d’un principe. Il y a des Maliens qui demandent l’indépendance. Il y a des Maliens qui veulent appliquer la charia dans tout le Mali. Comme un peu partout ailleurs, je veux dire qu’il y a des Corses qui demandent l’indépendance, mais on ne les attaque pas. Il y a des Québécois qui demandent l’indépendance, on ne les attaque pas non plus. On discute d’abord pour voir si on peut les intégrer dans la République. Si on peut limiter ces revendications qui sont extrêmes et parfois extrémistes. C’est lorsque le dialogue politique échoue que l’on peut imaginer d’entreprendre des actions de fermeté. Sinon, nous savons qu’il y a d’autres groupes pour lesquels nous pensons qu’il faut avoir des attitudes de fermeté. Les groupes Ansar dine et le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) avec qui nous avons eu des contacts sont des Maliens qui demandent à la fois l’indépendance ou la charia.

F24 : Ansar dine est un groupe avec qui on doit discuter ?

BC : Nous avons eu des contacts et nous pensons qu’en discutant avec eux, on peut arriver à les faire comprendre que nous sommes dans un monde où on ne prend pas les armes pour obliger les hommes et les femmes comme au moyen âge.

F24 : Est-ce que vous diriez que Ansar dine est plus prêt à dialoguer que le pouvoir à Bamako ?

BC : Pour l’instant, ils ont envoyé une délégation pour discuter avec nous. Ils ont reçu mes envoyés. Mais nous attendons toujours d’avoir une structure du gouvernement chargée des négociations parce nous n’en avons pas encore reçue.

F24 : Si je comprends bien, des groupes qui contrôlent le Nord du Mali, An sardine est plus prêt et plus structuré à dialoguer que le pouvoir à Bamako ?

B.C : An-sardine l’a annoncé la dernière fois. J’y ai envoyé mon ministre des Affaires étrangères et Iyad Aghali a dit qu’il acceptait la médiation. Il a même dit qu’il soutient la médiation du Burkina Faso. Cela veut dire qu’il y a une disponibilité plus forte.

F 24 : Mais, comment vous pouvez à la fois négocier avec eux et pousser une intervention militaire de la CEDEAO à laquelle le Burkina Faso est prêt à participer avec des armes ?

B.C : Même en discutant avec eux, je leur dit que l’indépendance ne marchera pas. Il y a beaucoup de composantes de la population au Nord-Mali qui sont contre l’indépendance. Je leur dit que ce sera alors difficile pour eux. A An-sardine, j’ai dit qu’au 9e et 10e siècle, on pouvait prendre des armes pour obliger quelqu’un à prier dans un sens ou dans l’autre, mais au 21e siècle, cela n’est pas possible. Le Mali, la région, le Burkina Faso seront contre. Il faut que nous discutions sur d’autres bases. Voilà les questions que nous évoquons avec eux.

F 24 : Patientez-vous que quelque chose de structurer se mette en place à Bamako ? Ou est-ce que vous vous fixez une limite pour leur dire que vous ne pouvez plus attendre ?

B.C : Suite à la réunion des chefs d’état-major de la zone ouest-africaine, la CEDEAO va se retrouver pour apprécier et voir dans quel sens il faut aller. Dans la mesure où nous savons que ce n’est pas la sécurité du Mali qui est engagée, mais celle de l’ensemble de la zone. Le Burkina Faso a 1200 km de frontière avec le Mali et la moitié est une frontière dite Azawad aujourd’hui. Comprenez que même pour nous et les autres voisins, c’est une préoccupation.

F24 : On parle souvent de sahelistan, d’africanisthan, en disant que ce sont les conséquences de l’intervention occidentale en Libye. Est-ce que vous êtes d’accord avec ces analyses ? A quel point cela menace-t-il votre pays ?

B.C : Ces menaces ont commencé bien avant l’intervention en Libye. Il y a une dizaine d’années que nous avons ce phénomène d’insécurité lié à ces groupuscules dans le Sahara, autour des prises d’otages et de trafics divers.

F24 : Mais est-ce que les choses ne se sont pas empirées après l’intervention ?

B.C : Il est vrai qu’après le démantèlement de l’arsenal militaire en Libye, il y a eu des mouvements qui ont transporté un certain nombre de matériel pour renforcer le dispositif de ces mouvements armés.

F24 : Vous parlez des otages, il y a des otages occidentaux, notamment français. Dans la zone, vous êtes aussi impliqué dans les tentatives de médiation pour les faire libérer. Certains otages ont été libérés dans votre pays ces derniers temps. Avez-vous des nouvelles des otages français ?

B.C : Ce que nous savons, comme le gouvernement français et la plupart des pays voisins, c’est que les otages sont toujours en vie. Nous voyons actuellement avec les autorités françaises comment trouver une passerelle pour qu’un dialogue puisse s’instaurer véritablement et voir dans quel sens nous pouvons faire libérer ces otages.

F24 : Avez-vous des preuves récentes que les quatre otages français enlevés il y a deux ans sont en vie ?

B.C : Les preuves de vie sont ce que nous recevons aussi comme message de la part de ces milieux. Nous n’avons pas engagé de négociations avec eux. Nous attendons, qu’avec les autorités françaises, nous puissions voir ensemble, comment nous allons poser au mieux cette question de négociation.

F24 : On a beaucoup parlé, ces derniers temps, de présence de forces spéciales françaises sur votre territoire, d’opération américaine un peu sécrète pour des vols de reconnaissance.

Pourquoi le Burkina Faso ouvre ses portes à la présence occidentale ?

B.C : Nous travaillons avec les occidentaux depuis des décennies. Le monde est ainsi fait et par exemple, la France coopère avec le Qatar. Vous êtes partout dans le monde. La France et le Burkina entretiennent des relations beaucoup plus anciennes que certains Etats. Il y a les mêmes niveaux de coopération avec les Etats-Unis. Nous partageons des valeurs et nous pensons que nous pouvons partager, à la fois des informations et avoir avec eux de l’assistance en matière de formation. Nous n’avons pas d’engagements, ni avec la France, ni avec les Etats-Unis, pour des opérations militaires pour l’instant.

F24 : Vous dites pour l’instant. Est-ce à dire que c’est quelque chose qui peut arriver ?

B.C : Comme partout, dans le monde, ces rapports peuvent conduire à des niveaux un peu plus élevé en fonction de la disponibilité des uns et des autres.

Propos retranscrits par

Steven Ozias KIEMTORE
et Omar Patinéma OUEDRAOGO

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