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Sidwaya N° 7233 du 14/8/2012

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Marie Blanche BADO, ex-directrice général du FDE :« L’électricité se trouve maintenant démocratisée »
Publié le mardi 14 aout 2012   |  Sidwaya


Marie
© Autre presse par DR
Marie Blanche Bado, ex-directrice Général DU FDE


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Avec le départ à la retraite de sa première directrice générale, Marie Blanche Bado qui a lancé en 2005 le programme « Electricité pour tous », le Fonds de développement de l’électrification (FDE) tourne une autre page pleine de lueurs d’espoir. Le processus de vulgarisation du courant électrique sur le territoire burkinabè apparaît aujourd’hui une réalité irréfutable au regard du bilan septennal qui se dégage des différentes opérations entreprises dans une centaine de contrées les plus reculées du pays. C’est dans un optimisme oint de lumière que l’ex-première responsable de cet ambitieux chantier livre ses derniers propos avant un repos bien mérité.

Sidwaya (S.) : Vous avez piloté l’opérationnalisation du Fonds de développement de l’électrification (FDE) à partir de 2004 et veillé à la mise en œuvre du processus depuis 2005. Quel bilan peut-on retenir de votre mission au moment où vous quittez la tête du Fonds, admise à la retraite ?

Marie Blanche Bado (M.B.B.) : Aucune œuvre humaine n’est parfaite. Il faut cependant reconnaître que l’opération d’électrification rurale a fait un grand bond. Les résultats engrangés sont à l’honneur du gouvernement, des acteurs et autorités en charge des questions d’électrification, des bailleurs de fonds, des consommateurs de la SONABEL qui contribuent à hauteur de 1,8 milliard de FCFA par an (Taxe de développement de l’électrification ou TDE), des élus locaux, des populations bénéficiaires et surtout des responsables des Coopératives d’électricité appelées communément « Coopel ».

La volonté politique apparaît comme le socle de cette avancée notable : soixante (70) localités électrifiées à ce jour, treize (13) localités en instance de mise en service, douze (12) en cours d’électrification (stade d’achèvement), cinq localités dont les contrats sont en cours de signature, vingt-cinq (25) localités en phase de passation de marché (lancement de l’appel d’offres), cinquante (50) localités en cours sur cofinancement de l’UE (stade de validation du dossier d’appel d’offres). A cela s’ajoutent la formation à la nouvelle approche de plus de deux cent cinquante (250) membres de coopératives d’électricité (Coopel), le renforcement de capacités de cinquante (50) cadres de l’énergie, l’instruction en cours de deux (200) projets d’électrification. Ce sont plus de cent vingt mille (120 000) personnes qui profitent de l’électricité dans les zones rurales grâce au processus engagé en 2005. Le chemin parcouru en huit (8) de mise en œuvre est remarquablement long et satisfaisant. Cette embellie ne doit pas être une raison pour dormir sur des lauriers. Les défis liés à l’électrification de nos populations des zones rurales sont énormes. Je me réjouis de passer le relai à un professionnel du secteur de l’électricité qui saura prendre la mesure de l’immensité du travail restant pour apporter sa pierre à l’édifice commun.

S. : L’exécution du programme d’électrification rurale a fait couler beaucoup d’encre et de salive. Comment avez-vous résolu les questions récurrentes de la défaillance de certaines entreprises et des pannes répétées de moteur qui ont semblé gripper la machine du Fonds à un moment donné ?

M. B. B. : Sur ces aspects, le FDE a lui aussi vécu son amère expérience à l’image d’autres institutions. L’un des objectifs du premier projet était l’émergence de nouveaux acteurs de l’électrification rurale (bureaux d’études, entreprises d’électricité locales) et le renforcement des capacités de tous les acteurs pour valoriser l’expertise nationale. L’exécution de certains des premiers projets ont connu des difficultés ; les marchés des entreprises défaillantes ont été résiliés pour être réattribués, d’autres ont été frappées de pénalités de retard. Toute chose qui a allongé les délais d’exécution mettant à mal la patience des populations des localités concernées. Par ailleurs, l’utilisation des poteaux-bois et la technique du système monophasé (SWER) a suscité des débats stériles. Cela a également amené à sensibiliser les populations sur le bien fondé et l’économie réalisée par ces techniques.

Sans fanfare ni tambour, nous avons sagement usé des dispositions légales en notre faveur pour résoudre les différentes difficultés apparues en dissipant les incompréhensions et en parvenant à mener à terme les objectifs fixés au FDE. De nos jours, les entreprises en général et celles intervenant dans le secteur de l’électricité sont bien formées et aguerries pour s’inscrire durablement dans l’esprit des procédures. Il est évident que nous avons su surmonter nos erreurs de jeunesse pour satisfaire les attentes des populations des zones rurales du pays.

Pour ne prendre que l’exemple du système diésel isolé, il y a une amélioration de la situation avec le renforcement de capacités de suivi des coopératives d’électricité (Coopel) et un bon climat de collaboration avec la SONABEL. C’est un parfait tandem qui s’est instauré entre nous et les services de la Nationale d’électricité. Des difficultés existent certes étant donné que notre œuvre est humaine mais elles sont aujourd’hui d’autres ordres.

S. : Quel tact avez-vous usé pour surmonter, auprès des populations cibles, l’amalgame, voire l’antagonisme, entre la SONABEL et le FDE ?

M. B. B. : En fait, il n’y a jamais eu d’amalgame entre ces deux entités. L’une est l’opérateur historique constituant le premier segment de la politique nationale en matière de fourniture d’électricité et l’autre considérée comme le bras armé de l’Etat pour apporter l’électricité aux plus pauvres à travers des mécanismes de subvention. Le gouvernement a été assez clair dans la déclinaison de sa vision. La SONABEL et le FDE ont toujours œuvré dans une synergie d’action. Ce sont deux maillons complémentaires de l’Etat.

Certaines personnes ont cru bon, à un moment donné, de chercher des poux sur un crâne rasé pour mettre à mal les chantiers du FDE. Ils se sont trompés d’astuce. Les autorités centrales du ministère en charge de l’Energie, le ministre en tête, se sont investies à lever toute équivoque sur la question. Chacun semble avoir compris la dynamique insufflée par l’Etat et nul ne peut utiliser cet argument d’antagonisme pour entraver l’opération d’électrification. La volonté politique a ainsi pris le pas sur les ambitions individuelles.

La collaboration entre la SONABEL et le FDE est franche et sincère. Les acquis énumérés tantôt relèvent de cet esprit de complémentarité et de subsidiarité qui a toujours guidé les missions respectives des deux entités. La SONABEL a même mis à la disposition du FDE deux cadres de haut niveau. Leur contribution à notre mission a été tellement considérable que l’on ne cesserait d’être particulièrement reconnaissant, à l’ancien directeur général de la SONABEL, actuellement ministre en charge de l’Energie. Depuis longtemps, il a personnellement œuvré au rapprochement de ces deux segments.

S. : Quel a été l’impact des innovations techniques propres adoptées dans l’accélération de la mise en œuvre du processus notamment dans le cadre de la réduction des coûts ?

M. B. B. : Si jusqu’à une époque récente, l’électricité était considérée comme un luxe, c’est à cause des coûts inhérents aux investissements. Ils se révèlent exorbitants et la pérennisation des projets posent souvent problème. La singularité du Burkina Faso, c’est d’avoir réussi à mettre en place une cogestion acceptée par tous les acteurs et abouti à des procédés techniques qui minimisent les coûts des installations. Toutes les sources d’énergie (thermique, hydro-électrique, solaire) sont explorées quand il s’agit d’électrifier une localité.

Le choix final se fonde sur les opportunités du moment.

La démarche participative et les innovations technologiques ont permis au Burkina Faso à être à ce jour l’un des rares pays en Afrique où se côtoient à la fois dans le même espace le SWER, les interconnexions classiques, le Système de câble de garde isolé (SCDGI), les systèmes diésel isolés, les systèmes hybrides (diésel/Photovoltaïque) et les kits photovoltaïques individuels (en cours de mise en œuvre dans 20 localités) La pertinence du programme repose sur sa bonne conception et le dialogue avec les acteurs locaux.

A maintes reprises, le FDE a reçu des délégations venues de plusieurs pays d’Afrique s’imprégner et s’inspirer du modèle burkinabè. Lors des rencontres sur l’électrification rurale en Afrique, le Burkina Faso est cité en exemple. Mais nous pensons qu’il reste encore beaucoup à entreprendre pour améliorer et accélérer l’électrification du pays dont l’objectif est l’éclairage des huit mille (8 000) villages.

S. : Quelles sont les chances et les contraintes pour un pays comme le Burkina Faso pour réussir réellement la vulgarisation de l’énergie électrique dans les zones les plus reculées du pays ?

M. B. B. : Contrairement à certains pays, l’électrification rurale bénéficie au Burkina Faso d’une volonté politique clairement affichée. C’est une chance énorme qui a conduit de nombreux partenaires techniques et financiers à accompagner le programme. Divers projets ont essaimé le territoire national. Les populations ont compris que le courant électrique est un levier de développement socioéconomique et elles ne se font pas prier dans leur quête de se l’approprier. Les populations désireuses de bénéficier d’une opération d’électrification se constituent elles-mêmes librement en société coopérative et libèrent des parts sociales.

C’est une adhésion unanime à laquelle l’Etat apporte pleinement sa partition.

Le courant électrique se trouve maintenant démocratisé ces dernières années. Ce n’est plus le seul luxe des grands centres urbains. Dans certaines localités éclairées, des coopératives d’électricité font de plus en plus face à un engouement réel. Elles sont nombreuses celles qui n’arrivent pas à satisfaire la demande croissante. Le renforcement des installations initiales se pose comme une nécessité actuelle. L’une des difficultés essentielles est donc l’accès aux sources de financement pour les Coopel afin de leur permettre d’étendre leurs réseaux électriques pour prendre en compte de nombreux clients en attente. L’accompagnement des banques et établissements financiers au secteur privé dans le secteur de l’électricité avec des ressources à des taux dits de développement serait un vrai ouf de soulagement pour la pérennisation des acquis.

S. : Quelle devrait être la part des populations bénéficiaires pour un aboutissement rassurant du processus d’électrification rurale et une pérennisation des acquis ?

M. B. B. : Il appartient aux populations de savoir mieux s’organiser autour de personnes-ressources motivées. Le programme national d’électrification rurale s’exécute dans un souci de pérennisation. Celles-ci doivent à présent témoigner de leurs capacités à assurer cette survie comme le véhicule aussi le processus de décentralisation. Les populations doivent comprendre que les réalisations sont avant tout les leurs. Aucune autre considération ne devrait leur faire perdre cela de vue. Il sied donc qu’elles initient, d’ores et déjà, avec leurs responsables de Coopel des pistes de renforcement de capacités à même de les aider à assurer la pérennité des systèmes électriques.

L’implication des populations bénéficiaires dans la gestion des infrastructures électriques de leur localité doit être sans faille et s’exprimer de façon responsable. C’est un outil de développement sur lequel elles ont intérêt à y veiller toutes. De leur participation au processus et leur détermination à trouver les solutions idoines aux problèmes qui vont survenir dépendra la survie des installations.

S. : En tant que responsable pionnière de la mise en application de la Politique nationale d’électrification rurale, le taux de couverture nationale de 60% visé par le gouvernement à l’horizon 2015 ne s’avère-t-il pas utopique en 2012 ?

M. B. B. : Non ! Pas du tout. Ce n’est pas une utopie. Tous les efforts du gouvernement concourent à sa mise en œuvre. Les résultats auxquels le FDE est parvenu en huit ans en sont une illustration. La SONABEL et le FDE s‘attellent à atteindre ce taux dans les délais prescrits. Le problème qui nous inquiète et que nous essayons de résoudre, c’est la capacité et le nombre d’entreprises locales à exécuter les travaux. Actuellement, elles sont très chargées.

Le gouvernement a réaffirmé sa volonté de réaliser cette ambition chère au chef de l’Etat lui-même. Il en a fait son cheval de bataille. Le ministère en charge de l’Energie et l’ensemble de ses partenaires ont engagé l’électrification de plus de trois cents (300) localités qui seront achevées au plus tard en 2014. Donc en 2015, plus de cinq cents (500) localités seront électrifiées étant donné que deux cents (200) localités le sont à ce jour. Le taux de couverture de 60% est jouable et sans un effort particulier. Il faut simplement conduire à terme les projets et programmes en cours dans les délais.

Interview réalisée par Enok KINDO et Alban KINI

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