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Safiatou Lopez à propos de la crise entre le RSP et le Premier ministre : « Nous avons peur que le dénouement de cette crise provoque plusieurs pertes en vies humaines »
Publié le vendredi 3 juillet 2015  |  Le Quotidien
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© aOuaga.com par A.O
Société civile : l`APDC lance ses activités de 2015
Dimanche 18 janvier 2015. Ouagadougou. Maison du peuple. L`Association pour la promotion de la démocratie et la participation citoyenne (APDC) a lancé ses activités de 2015 en présence du Premier ministre Yacouba Isaac Zida. Photo : Safiatou Lopez/Zongo, présidente de l`APDC




La présidente de l’Association pour la promotion de la démocratie et de la participation citoyenne (APDC), Safiatou Lopez, n’est pas restée muette face à l’actualité de ces derniers jours, à savoir la crise entre le Régiment de sécurité présidentielle et le Premier ministre. Dans une interview qu’elle nous a accordée, le mercredi 1er juillet 2015, à Ouagadougou, elle appelle les deux parties à communiquer sur le différend qui les oppose. Pour l’heure, la présidente de l’APDC dit n’avoir pas de position tranchée sur la crise entre le RSP et le PM parce qu’elle dit ne pas maîtriser tous les contours de cette crise. Lisez plutôt !

Quel regard portez-vous sur la crise entre le Premier ministre et le RSP ?

La situation que vit le peuple burkinabè aujourd’hui est une situation d’incertitudes, parce que la majorité des Burkinabè souhaite que nous respections le calendrier électoral. C’est dire que les élections sont la priorité pour la majorité des Burkinabè. Depuis dimanche (ndlr, le 28 juin 2015), il y a une évolution de la situation nationale qui est inquiétante pour le peuple burkinabè. Elle est d’autant plus inquiétante que nous ne maîtrisons pas la situation au sein du RSP. C’est vrai que nous nous sommes, plusieurs fois prononcés, sur la question au sein des OSC. Ce que nous demandons aux uns et aux autres, c’est de taire les divergences et d’avoir un consensus pour que nous puissions sortir de cette situation d’incertitudes. On nous parle des revendications du RSP. A ce niveau, je me pose des questions sur la légitimité de ces revendications. Nous savons que l’armée a pris part à la mise en place des institutions de la Transition. L’armée était présente de façon active. Donc, nous pensons qu’il n’appartient pas à un seul camp militaire de faire des revendications. Normalement, c’est à l’armée de décider si elle veut ou non retirer ses éléments de la transition. Même si le RSP a raison, il risque de ne pas être bien compris des populations. Nous avons un chef d’Etat qui est garant de la Charte. Il faudrait le consulter pour qu’il prenne des dispositions qui s’imposent. Il y a eu des coups de feu, mais on ne sait pas au juste ce qui se passe. L’armée ne communique pas. Ni le Premier ministère ni la présidence ne communique. Donc, la population est obligée d’écouter les rumeurs. Et quand on est obligé d’écouter les rumeurs pour se faire une idée, c’est très dangereux, surtout pour une Nation. On nous dit que le RSP ne constitue pas un danger pour le Burkina Faso. Pourtant, nous avons vu le Premier ministre partir chez le Mogho Naaba. Ce qui nous amène à nous poser des questions. On nous dit après qu’ils se sont entendus. Après cela, nous apprenons que l’on a essayé d’arrêter le Premier ministre. On ne maitrise pas les données. Qu’il y ait une communication. Nous, nous ne comprenons pas le langage des armes. Peut-être que si on tire un coup de feu, cela a un sens. Peut-être que si on tire deux coups de feu, cela a un autre sens. Nous ne connaissons rien à ce sujet. C’est mieux qu’ils s’asseyent autour d’une même table avec le chef de l’Etat pour trouver un consensus. C’est mon point de vue. Je ne m’avancerai plus pour dire ceci ou cela parce que je ne maîtrise pas les données. Tant que les autorités de la transition ne font pas une déclaration pour dire ce qui se passe réellement, je ne peux pas avoir une position. Nous voyons que la crise est profonde. Mais, il va falloir communiquer avec le peuple sur ce qui se passe dans ce camp militaire. Pourquoi y a-t-il deux camps dans le même camp ? Si le RSP a raison, qu’il nous explique ce qui se passe réellement. Que les autorités aussi nous expliquent ce qui se passe. A partir de là, nous pourrons être situés afin de prendre une position.

On se rappelle que certains éléments du RSP avaient dit que le Premier ministre utilise certaines OSC contre eux. Votre réaction…
Moi, je sais que je ne suis pas utilisée. Je sais que personne ne m’utilise.

J’ai une capacité d’analyse. Je sais que je ne suis pas manipulée. Mon patriotisme n’est pas à vendre.

D’ailleurs, je ne sais pas combien on va me donner pour m’acheter.

On se souvient qu’en février dernier, vous étiez à la Place de la nation à l’occasion de ce meeting où il était question de demander au RSP de dégager. Est-ce qu’avec le recul, votre position a changé par rapport à l’avenir et à l’existence du RSP?
Je voudrais rectifier quelque chose. A ce meeting, si je me souviens, on a demandé le démantèlement et la délocalisation du RSP. Nous avons également demandé le changement de la dénomination du RSP. Et nous pensons que cela est plus que jamais nécessaire. Il faut qu’il y ait un dialogue parce qu’il y a un problème de communication qui est très sérieux. Je me demande pourquoi personne ne fait une déclaration depuis que la crise a été déclenchée le dimanche. Je ne représente pas toutes les OSC. Si des gens ont pris de l’argent et se font manipuler, cela m’échappe. Si tu creuses un trou pour ton ennemi, il ne faut pas trop creuser parce que tu risques d’y rester. Je suis neutre. Nous soutenons la Transition et cela ne peut en être autrement puisque nous avons mis ces institutions en place. Mais, si la Transition a des failles, nous allons le dénoncer. Soutenir, c’est bien. Mais, il faut pouvoir dire la vérité à l’autre. Aujourd’hui, même au sein du Collectif tous unis pour une transition réunie, nous ne pouvons pas prendre une position tranchée. On ne peut pas se tabler sur des rumeurs pour prendre position.

Beaucoup de Burkinabè pensent que le problème du Burkina aujourd’hui, c’est le RSP. Epousez-vous ce point de vue ?
Je dirai que le seul problème, c’est la crise au sein du RSP. On sait qu’il y a une crise et elle est profonde. Il faut donc crever l’abcès. Nous avons peur que le dénouement de cette crise provoque plusieurs pertes en vies humaines. Aucune vie humaine ne doit être sacrifiée. Il faudra un consensus, sinon l’Histoire les rattrapera un jour.

Est-ce que vous avez tenté une démarche auprès de l’autorité pour comprendre le problème ?
Je dis que, de façon officielle, tout le peuple burkinabè doit être informé. Si cela est fait, nous pourrons prendre une position. Mais, s’il n’y a pas de déclaration, ce sera compliqué de savoir ce qui se passe. Nous pensons que l’autre page est refermée et qu’il va falloir avancer.

Pensez-vous, comme certains, qu’il faut d’abord prendre le temps de résoudre le problème du RSP avant de parler des élections ?
Nous devons arriver aux élections. Nous devons respecter le calendrier des élections. Donc, il faut que nous soyons situés sur ce qui se passe au sein du RSP. Certains disent que des gens tapis dans l’ombre font tout pour prolonger le délai des élections. Et dans cette situation, il est difficile pour nous d’avoir une position.

Et si jamais, vu l’évolution de la situation, on décidait de prolonger la date des élections ? L’accepteriez-vous ?

Il faudra vraiment qu’ils nous donnent des raisons assez solides pour que nous acceptions cela. Nous ne pouvons pas suivre comme des moutons. On a pris beaucoup de risques pour en arriver là. On a vécu ce qu’on a vécu, on a vu ce qu’on a vu ; mais nous avons avancé. Aujourd’hui, on doit savoir là où mettre les pieds. Nous ne pouvons pas suivre aveuglement.

Lorsque certains éléments du RSP ont fait le tour de certaines radios, ils ont laissé entendre qu’ils vont arrêter et présenter au peuple les vrais voleurs de la République. N’ont-ils pas fait allusion à certains responsables des OSC ?
Comment les OSC peuvent-elles être des voleuses ? Où allons-nous voir l’argent pour voler ? (Rires). Ils sont allés installer le grand-père des voleurs ailleurs. Donc, nous allons leur demander de nous ramener le grand-père des voleurs. Ici, il n’y a que le père, les enfants et les petits-enfants. Ce sont eux qui les connaissent. Mais, c’est un terrain assez glissant pour eux. Je n’ai géré aucune institution et personne ne peut me parler de vol. Donc, je sais que cela ne nous concerne pas.

Vous parlez de grand-père des voleurs. De qui s’agit-il ?
C’est l’ancien chef de l’Etat. Où les voleurs ont-ils appris le vol durant les 27 ans ? Il ne faut pas qu’on se foute du monde. Qui sont les voleurs qu’ils veulent aller arrêter ? En plus, le fait d’aller menacer dans les radios n’est pas une bonne chose. C’est pour toutes ces raisons que le peuple prend souvent des positions tranchées contre eux. Il ne faut pas qu’ils soient surpris de cela. D’un côté, on a le RSP qui est un camp militaire. De l’autre côté, on a l’armée républicaine. Normalement, il y a un seul chef d’Etat-major des armées au Burkina Faso. Il doit avoir un problème de communication. Tout cela constitue un désordre qu’ils doivent résoudre en leur sein. Et à partir de ce moment, ils pourront se faire comprendre par la population. Autant ils ne nous comprennent pas, autant nous ne les comprenons pas. Lorsque nous avons parlé de démantèlement, certains éléments du RSP ont dit que nous ne voulons pas d’eux. Il y a même des éléments du RSP qui nous ont demandé pourquoi nous les détestons. C’est là que j’ai compris qu’ils ne nous comprennent pas. Nous ne les détestons pas. Tous autant que nous sommes, nous sommes des filles et fils du Burkina Faso. Nous ne pouvons pas détester une partie du peuple. Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi ils sont allés menacer les radios. Souvent, dans les radios, les gens appellent et racontent n’importe quoi sur nous. Mais, est-ce que nous sommes allés menacer les radios ? C’est parce qu’ils ont les armes qu’ils pensent qu’ils ont le droit d’aller menacer les radios ? Non, cela n’est pas normal parce que j’ai appris qu’ils y sont allés avec des armes. Comment puis-je communiquer avec quelqu’un qui tient une arme ? Ils savent bien qu’à la radio, les gens ne sont pas armés, c’est déjà un problème. Ils peuvent communiquer avec les radios et les médias sans armes. Nous ne voulons plus revivre le problème que nous avons déjà vécu. Ce que nous voulons, c’est arriver aux élections et avoir un chef d’Etat.

Selon vous, qui du général des armées, du chef de l’Etat ou du Premier ministre doit communiquer sur la situation actuelle au sein du RSP ?
D’abord, le chef de l’Etat doit faire une déclaration officielle. Mais, on ne comprend plus rien…

Mais pourquoi tout ce monde-là se tait ?
Je ne sais pas pourquoi ils se taisent. C’est pourquoi je leur demande de se prononcer. Ils ont l’obligation de nous situer sur les problèmes réels au sein du RSP. Personne ne sortira gagnant dans cette situation. L’avenir du Burkina Faso se trouve entre leurs mains. Et, c’est à eux de faire en sorte qu’on ne leur pose pas de question un jour.

N’avez-vous pas peur, avec les récentes évolutions, de faire des déclarations sur l’actuelle crise entre le RSP et le Premier ministre?
Il s’agit de mon pays. Si je peux contribuer à quelque chose, je le ferai. En tant que citoyenne, je dois remplir ma part de responsabilité. Le problème avec le RSP, c’est qu’il parle, mais ne communique pas. A quoi riment les menaces. A quoi servent les menaces si nous pouvons nous asseoir et discuter. J’ai écouté la radio où on dit que c’est le chef d’Etat major particulier qui a présenté ses excuses. Est-ce que c’est une bonne démarche ? Même quand Blaise était là, on parlait. Pourquoi on ne peut pas parler aujourd’hui. Quel est le problème que le peuple ne doit pas savoir ? C’est qu’il y a anguille sous roche.

Et si la solution à cette crise était finalement le départ de Zida ?
Comme je vous l’ai dit, je me pose des questions sur la légitimité de ces revendications. Si l’armée veut retirer ses éléments de la Transition, c’est à elle de décider. Maintenant, si c’est un camp militaire qui se lève pour mener des revendications, cela devient préoccupant. Si les éléments du RSP communiquaient réellement entre eux, ils n’allaient pas se lever pour faire ce genre de revendications. Nous voulons qu’ils résolvent leur problème à l’interne pour sortir le peuple burkinabè de là. Ils sont aussi des fils et filles de ce pays1

Propos recueillis par G. Maurice BELEMNABA et Alphonse C. GUEBRE
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