Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Burkina Faso    Publicité
aOuaga.com NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Activisme des OSC au Burkina : «le bon grain semble minime par rapport à l’ivraie»
Publié le lundi 20 avril 2015  |  Le Pays




Les organisations de la société civile ont pris une part active dans l’insurrection populaire qui mit fin aux 27 ans de règne de Blaise Compaoré. Tout en reconnaissant ce rôle des OSC, Ousmane Bodo Ouédraogo estime que certains leaders d’OSC en font trop car ils ont pris la transition en otage pour leurs seuls intérêts. C’est pourquoi il tire la sonnette d’alarme afin que le milieu des OSC soit assaini pendant qu’il est encore temps. Lisez plutôt.

OSC du Burkina : Les « agneaux » sont-ils devenus des « loups » ?

Les derniers remous et sorties médiatiques de leaders d’Organisations de la société civile (OSC), dont celles de Siaka Coulibaly de la Coalition pour le suivi de la transition et des élections (COSTE), ont mis en évidence la « guerre froide » qui couvait depuis longtemps déjà entre les OSC du Burkina et qui a fini par éclore dans l’après insurrection des 30 et 31 octobre 2014, avec la prégnance de la « dictature » de leaders d’un certain nombre d’OSC sur la transition.

Et cette situation laisse transparaître, nous semble-t-il, la « naïveté » des Burkinabè, qui avaient pris beaucoup de ces OSC comme des « saints», des « agneaux » mus par une réelle volonté de défendre les intérêts communs de ceux et celles pour qui elles ont été créées, de promouvoir de nobles idéaux et sans but lucratif comme le souligne l’article 1 de la loi n°10-92/ADP du 15 décembre 1992 (portant liberté d’association) : «Est association, au sens de cette présente loi, tout groupe de personnes physiques ou morales, nationales ou étrangères, à vocation permanente, à but non lucratif et ayant pour objet la réalisation d’objectifs communs, notamment dans les domaines culturel, sportif, social, spirituel, religieux, scientifique, professionnel ou socio-économique ».

Ainsi, sur la base de la loi 10 et de la loi N°56-93/ADP du 30 décembre 1993[1], beaucoup d’OSC sont nées et ont mené beaucoup d’actions salvatrices, souvent dans l’anonymat, qui ont bénéficié à des personnes nécessiteuses, indigentes, etc. ou qui ont contribué à l’adoption de textes et de mesures améliorant les conditions de vie des populations et qui méritent qu’on s’y attarde pour saluer la citoyenneté, la magnanimité, le don de soi, l’engagement sans faille pour la veuve et l’orphelin, pour la démocratie, pour la liberté d’expression, pour la justice sociale, pour les droits humains, pour la femme et l’enfant, pour le petit paysan, … en faisant fi de l’intérêt individuel et égoïste, qui est la marque de fabrique de certains perfides, avides de gain facile.
Ce qui se passe aujourd’hui au niveau des OSC, et qui n’est pas du goût, ni du citoyen lambda, ni même à l’interne de ces organisations, est vraiment « nauséabond », regrettable et mérite qu’on s’y penche ardemment.

Après avoir, main dans la main, dans le consensus et la solidarité, engagé, organisé et participé, pendant des jours, des mois, voire des années, à la lutte constante contre le régime anti-démocratique et antisocial de Blaise Compaoré, elles ont fini par vaincre (avec d’autres forces vives de la nation comme les partis politiques, les jeunes, les femmes, etc.) et certaines OSC se livrent aujourd’hui à une « bataille rangée » et acharnée, de positionnement, du « ôte-toi que je m’y mette », du dénigrement de l’autre, d’hégémonie de l’ego, souvent surdimensionné et qui ne leur fait pas du tout honneur. Alors là pas du tout ! Comme le note si bien Boureima Ouédraogo, Directeur de publication du Reporter[2], « …les Organisations de la société civile (OSC) qui ont participé à l’insurrection populaire ont, pour la plupart, étalé sur la place publique leur rapacité. […]

En outre, les organisations qui ont voulu garder leur indépendance sont l’objet de toutes les tentatives de liquidation. » Certains qui s’illustrent actuellement de mauvaise manière le regretteront amèrement à l’issue de la transition. qui se sent morveux, se mouche).
Regardez comment la Transition a été prise « en otage » par des leaders de certaines corporations « majoritaires » de nos jours, et parfois créées ex nihilo. Regardez le nombre de juristes (enseignants-chercheurs en droit, magistrats, avocats, fiscalistes, etc.) dans la sphère de la transition (CNT, gouvernement, autorités supérieures, Conseil constitutionnel, Commission de réconciliation nationale et des réformes, etc.) !

Ils sont tellement nombreux que certains mêmes démissionnent. Bien que cela soit nécessaire dans une nation, surtout avec une « insuffisance des règles constitutionnelles, avec une défaillance de l’encadrement constitutionnel de la gestion du pouvoir politique », comme le souligne le Pr Abdoulaye Soma[3], pour élaborer des textes de lois à la hauteur de nos ambitions actuelles de recherche d’une identité démocratique, reconnaissons quand même qu’il y a une grande disproportion par rapport aux autres corps de métier, non moins importants, et peut-être même plus, en ces temps de « vaches maigres », comme les économistes, les médecins, les éducateurs, les sociologues, les philosophes, les historiens, les hommes de culture, etc.

Et surtout pour un pays où la pauvreté et la misère sont le « pain quotidien » des populations, où le pauvre n’a pas droit à la santé, ni à l’éducation (continuum de l’éducation de base avec des paillotes comme classes, insuffisance d’amphithéâtres pour les étudiants et système LMD[4] en déphasage avec les moyens mis en place), où règne une déliquescence sociale, une morale agonisante, voire agonisée (suivez mon regard) et où l’éthique et la parole donnée ont foutu le camp depuis belle lurette, où la tendance des politiques et des élites est à l’oubli et/ou à la négligence de notre passé, assez glorieuse par ailleurs, et où la quête de notre identité culturelle semble ne plus avoir de sens, ni d’intérêt pour eux.

Pendant que nos « juristes » peaufinent des textes et lois, affinés, élaborés, sans failles et sans bavure, pour la démocratie burkinabè, comme les 114 articles du pacte national pour le renouveau de la justice (nous attendons impatiemment l’application effective et les effets), nous « survivons », dans ce pays, sous un soleil de plomb, sans eau et sans électricité, avec des hydrocarbures (carburant, gaz) qui coûtent excessivement chères pour notre maigre bourse ; toutes choses qui sapent de façon gravissime notre économie, d’ailleurs sous « régime d’austérité ». A ce rythme, à l’issue de la transition, nous risquons de construire une nation « théorique », avec de beaux textes qu’on ne pourra jamais appliquer ou qu’il n’y a personne sur qui appliquer, car c’est parce qu’on a mangé à sa faim, qu’on a bu à sa soif, qu’on s’est soigné, qu’on s’est logé, qu’on a un emploi, que l’on peut se permettre de comprendre ce « verbiage intellectualiste », à la sauce socratique, que ces « érudits » d’une « race » nouvelle nous « imposent », avec forte conviction et grande vivacité.
A bien y regarder de près, la « naïveté » des Burkinabè repose sur le fait qu’ils pensent que ces « loups » qui se battent aujourd’hui sont des « agneaux » depuis. En effet, quand on regarde les textes qui régissent ces OSC, les objectifs nobles qu’elles poursuivent et certaines réussites (à saluer d’ailleurs), pourquoi ne pas croire que « tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes » ?

Eh bien non ! Ce qui se passe aujourd’hui n’est que la partie visible de l’iceberg et la suite logique de leurs contradictions « congénitales ». En effet, la plupart des leaders de ces OSC se connaissent très bien. Leurs frustrations, leurs luttes intestines et fratricides parfois, leurs rancœurs d’aujourd’hui, ont été cultivées et exacerbées depuis les bancs scolaires et universitaires et véhiculées jusqu’à nos jours dans leurs organisations. Et mieux dans la transition, de telle sorte qu’elle « tangue » par-ci par- là, au gré de leur « ego » et de leur ambition, pas toujours sincère et dépourvue d’agenda caché. C’est pourquoi, les « novices » que nous sommes ne comprendront que dalle ! Certains ont formé des groupuscules d’autodéfense, d’autres se sont coalisés pour contrecarrer les premiers. Pour paraphraser Boureima Ouédraogo du Reporter, « il y a des francs-tireurs, embusqués et prêts à dégainer chaque fois que leurs intérêts personnels sont contrariés ». Cela a d’ailleurs engendré des clans qui se vouaient aux gémonies, rien que pour des postes, des privilèges, d’ailleurs éphémères. Ah l’égo, quand tu nous tiens !

Mieux, on n’arrive pas à savoir qui est qui dans tout ça. On se dit OSC alors que c’est le camouflage presque parfait d’un parti politique ou de recherche de gain facile. Les exemples de la FEDAP/BC[5], et tout récemment la fulgurante transformation de l’association « Burkina Nouveau » (loi 10) en un parti politique « Union pour un Burkina nouveau » (loi n°032-2001/AN du 29 novembre 2001[6] en sont une illustration parfaite d’une « auberge espagnole ». Aussi, d’autres en ont fait leur « gagne-pain ». Regardez la composition de certains bureaux et le personnel de certaines OSC, parfois c’est quelques membres de la famille du leader, ses amis, ses parents, ses promotionnaires, etc.

Certaines OSC sont dans plusieurs secteurs d’activités à la fois pour « capter » les financements des bailleurs de fonds et d’autres suivent la mouvance de la mode du moment que les institutions de Bretton Woods (FMI, BM[7]) savent bien nous « pomper » et nous « imposer » à travers des politiques (qu’on ne réalise jamais) du genre « éducation pour tous », « santé pour tous », « santé maternelle et infantile », « promotion des droits humains », « genre et développement », « bonne gouvernance », « employabilité des jeunes », « droits de la femme et de l’enfant », « droits des personnes vivants avec un handicap », « OMD[8] » et que sais-je encore.

Il y en a même qui créent des OSC au nom de l’action humanitaire pour l’aide aux pauvres, alors que c’est pour distribuer quelques subsides, devant les caméras, et se constituent ainsi un tremplin (politique, économique, etc.) pour accéder à des emplois « juteux » et/ou décrocher des marchés publics, sans aucun mérite. Et après on se pavane dans de grosses « caisses », se construit des villas haut standing et on pratique le sport favori nocturne. S’enorgueillir avec ça, c’est tout simplement indécent, répugnant, inhumain et immorale.

De l’autre côté, on a les « arrivants », sortis, parfois de nulle part, comme des « fourmis », peu avant et après l’insurrection des 30-31 octobre 2014, peuplant tout d’un coup la « faune » des OSC, ignorant les antécédents des premiers et n’étant pas toujours les bienvenus de ceux-ci, se sont tout de suite heurtés aux velléités hégémoniques des « anciens », notamment sa frange « élitiste ». Mais, comme ces « nouveaux », armés de leur courage et légitimés par la lutte ayant entraîné la fuite de « l’enfant pas terrible du tout de Ziniaré », ne s’avouent pas vaincus et ne veulent pas se laisser « faire », il y a donc inévitablement le « clash » qui se manifeste par des déclarations fracassantes, parfois à l’emporte-pièce, parfois à contre-courant des intérêts des uns et des autres, à des retournements de veste, à des sabordements et/ou à des phagocytoses qui ne disent pas leur nom. Ce «foisonnement» bourdonnant d’OSC d’avant et de post- insurrection n’est que la résultante, pour la plupart, d’intérêts égoïstes, car à notre entendement, le « bon grain » semble minime par rapport « l’ivraie » et il n’est pas souvent sous les feux de la rampe comme les autres.

Mais heureusement, Dieu merci, tous ne sont pas pareils. C’est pourquoi nous voulons tirer la sonnette d’alarme, pendant qu’il est encore temps. Et d’ailleurs, comme ils savent si bien concocter des textes «irréprochables », ils n’ont qu’à se mettre en « conclave », en « jamborée » (comme on sait si bien le faire au Burkina) pour faire les « Etats généraux des OSC », pour un « toilettage » intégrale et sans complaisance des textes qui les régissent et des pratiques, afin qu’un « pacte » pour le renouveau des OSC du Burkina jaillisse de leurs réflexions « élitistes », leur gymnastique favorite. Et cela devrait passer par regarder de près le processus et les conditions de création, les procédures de reconnaissance, les attributions des membres, les droits et devoirs, la règlementation du financement, l’obligation de rendre compte, les sanctions, etc.

Les leaders encore consciencieux dans les OSC, pour éviter la lente mais inexorable « dérive » qui se profile à l’horizon si on y prend garde, et par-delà les textes (un bon texte de loi ne vaut que par celui qui l’applique), devront sonner le tocsin pour revenir aux valeurs cardinales d’une organisation de la société civile, digne de ce nom, entre autres, le respect de la parole donnée, la culture de l’intégrité, de l’éthique et du souci du collectif sur l’individuel, le respect et la protection du plus faible et du bien commun, le devenir de la Nation, etc. Voire l’impérieuse nécessité de mettre en place un « conseil de surveillance, de contrôle et d’éthique des OSC », pour assainir le milieu, encore faut-il qu’on y mette des hommes intègres, dotés d’une grande probité et soucieux de l’intérêt commun !

Alors, messieurs les leaders des OSC, réveillez-vous rétablissez les choses, pour un Burkina radieux !
Commentaires