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Le Pays N° 5304 du 25/2/2013

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Crise d’hysterie dans les etablissements secondaires : Un phénomène inquiétant à Gaoua
Publié le mardi 26 fevrier 2013   |  Le Pays




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Les trois semaines écoulées, les cours dans les établissements de Gaoua ont connu des perturbations liées à cette crise qui est en passe d’affecter la majorité des établissements secondaires du Burkina. A cette période, des élèves de quatre établissements secondaires de Gaoua étaient touchés par cette crise dite de génies. La persistance du phénomène malgré les sacrifices des coutumiers, les prières des différentes confessions religieuses pour chasser les démons sur les filles, inquiète plus d’un Gaoualais en particulier les parents d’élèves. Une rencontre suscitée par le proviseur du lycée Bafuji le 23 février dernier devrait permettre de trouver des pistes de solution.

A la date du vendredi 22 février 2013, ce sont quatre établissements de Gaoua qui ont vécu des scènes de frayeur à cause de cette crise d’hystérie. Le ou les génies baladeurs ont en effet affecté le lycée municipal, le lycée Bafuji, le collège Thuonbga et le complexe Notre dame de l’annonciation. Les manifestations sont généralement similaires. Le phénomène qui affecte généralement les filles les met dans un état d’agitation, de surexcitation qui conduit les victimes dans un déchaînement souvent incompréhensible à en croire les témoins qui les regardent d’un œil lucide. Le constat est fait que quand la crise se déclenche pour une deuxième fois dans un établissement, généralement, la majorité des filles sont affectées. Selon le proviseur du lycée Bafuji, Makessé Dembélé, Ini Reine Da est à chaque fois parmi les victimes. Le président des parents d’élèves du lycée Bafuji, Diolompé Sié, a sa fille qui en est victime au moins deux fois. En tant que président de l’APE de cet établissement , il a participé à une rencontre initiée par le proviseur du lycée Bafuji le 23 février, réunissant l’ensemble des chefs d’établissements secondaires de la place, des présidents d’APE desdits établissements, des représentants des confessions religieuses et des personnes ressources. Il a souligné qu’à l’issue de la première crise d’hystérie dans l’établissement, deux sacrifices, à des endroits différents, ont été faits.

Certaines filles sont réellement possédées

Malheureusement, la crise a repris de plus belle dans cet établissement. Le reportage fait par Karim Dianda les 21 et 22 février a, un tant soit peu, convaincu certains esprits cartésiens du caractère mystérieux du phénomène. Une voix diffusée sur les ondes de la radio Gaoua semblait celle d’un génie. Selon le journaliste Karim Dianda, l’un de ces individus qui a pris possession du corps de Palé Yéri s’exprimait en ces termes : « Moi, je m’appelle Ana Rok Sana, je viens de la Côte. Moi je suis venu pour visiter votre école seulement. Après ça, si vous me donnez ce que je veux, je repars tranquillement et sans problème. Je ne suis pas seul, j’ai un patron, moi. Moi, je suis venu pour faire ma mission hein ! » Et pour le journaliste qui était ce jour sur le théâtre de la crise, leur caméra « a refusé le 22 février de filmer les images des filles qui faisaient l’objet d’attaque de génie. On a tenté de filmer une des filles et lorsqu’elle s’en est aperçue, elle a fait des yeux un peu hagards et a tenté de bondir sur notre caméra ; nous avons pris du recul. A partir de ce moment, dès qu’on oriente la caméra sur quelqu’un, on ne voit rien. Mais lorsqu’on la pointe à terre, on voit l’image ». Il a poursuivi en soulignant que de retour au studio, les « images » déjà enregistrées ce jour-là n’ont révélé en réalité aucune image. « Ce phénomène, il faut vraiment le prendre au sérieux parce qu’il n’est pas forcément de l’imaginaire », avait conclu le journaliste Dianda. La rencontre du lycée Bafuji au soir du samedi 23 février en est parvenue à la même conclusion qui consiste à accorder la plus grande attention au problème et à agir promptement. Il est ressorti des débats que des génies ont dû être dérangés dans leur logis à travers les constructions qui ont suscité l’abattement de certains arbres. Qu’à cela ne tienne, le représentant du maire, Yamansa Jean Baptiste Sib, a confié qu’il rendra compte des conclusions au maire qui convoquera certaines personnes considérées comme des autochtones, notamment les Touna qui vont tenter de résoudre le problème.

S’assurer qu’une provocation humaine n’est pas à la base du phénomène

Et il va falloir se rendre dans le village de Bakoulena où résident encore les dépositaires de certains rites de Gaoua pour les inviter à se déplacer afin d’assurer les sacrifices nécessaires. Les prières des autres confessions religieuses sont aussi nécessaires. Mais le fait que le phénomène a tendance à affecter plusieurs établissements du pays, voire d’Afrique, a fini par convaincre certains que le problème est beaucoup plus complexe et dépasse le cadre de Gaoua. Pour un des intervenants, il faut, en plus de ce qui est fait localement, mobiliser une équipe pluridisciplinaire constituée de psychologues, de médecins et de sociologues pour comprendre et permettre de juguler le problème. Ce dernier s’est même demandé si des individus malins ne sont pas à la base de ce phénomène qui traumatise les jeunes filles. Le phénomène a quitté les jeunes filles élèves pour atteindre une parente d’élève du lycée municipal et un garçon du lycée Bafuji. Du jeudi au vendredi 22 février, 26 filles étaient victimes dans le seul lycée Bafuji, selon le proviseur Masseké Dembélé.

Dans cette même lancée, une campagne d’évangélisation organisée par le renommé abbé Bicaba dans la cour de la cathédrale de Gaoua dans la nuit du 23 février a permis de montrer davantage à quel point le problème est complexe. En cette nuit de prières et de louanges ayant drainé un grand monde, des personnes sont encore entrées en transe, faisant preuve des mêmes agitations intenables. Parmi elles, il y avait au moins un jeune homme et aussi quatre filles des établissements de la place qui en étaient victimes la veille. Il s’agit de Palé Yéri Clémence, Palé Akissi, toutes du lycée Bafuji, Charlotte du municipal et Christine de Thuonbga. Cela a amené un observateur à dire que si des prières ont suffi pour réveiller la crise chez ces filles, c’est la preuve que l’homme même peut être à la base de l’incitation de ces génies qui peuvent sommeiller en certaines personnes à travers certaines paroles spécifiques. La drogue y joue-t-elle un rôle ? En tout cas, face à cette crise à plusieurs inconnues, la voie est ouverte à toutes les hypothèses. Un autre constat montre que certaines personnes se lancent dans cette agitation du fait éventuellement de la peur ou de leur état psychique. En effet, dans cette nuit de délivrance assurée par l’abbé Bicaba, une des filles, visiblement dans un état de défaillance mentale, s’est jetée dans l’agitation avant de se réveiller avec un sourire. De plus, il ressort que les personnes asthmatiques sont parfois dans la danse. Mais, à côté de ces cas, d’autres présentent parfois un tableau sérieux. Au lendemain de la nuit de prières, donc le 24 février, nous avons rendu visite à une fille qui était en transe la veille à la séance de prière. Cette dernière a recouvré son état de lucidité. Mais ce n’était pas le cas pour sa camarade Akissi qui la prend pour sa jumelle. Elle est arrivée in cognito et s’est posée sur le même tabouret que ‘’sa sœur jumelle’’. Un individu a essayé de remonter leur morale en disant que tout se passe dans la tête et qu’elles doivent être très fortes pour surmonter cette épreuve. « Non, ça se passe dans le corps. Même quand tu fais un effort, ça vient », avait dit Akissi avant de fondre en larmes. « Ma vie est en danger », avait dit cette fille de la 4e du lycée Bafuji avant de se lever, chapelet en mains, pour se diriger vers sa maison. Selon des témoignages, elle menace même parfois ses parents, preuve que ce phénomène est à prendre au sérieux. Les victimes souffrent de leur mal, les non-atteints travaillent la peur au ventre et les parents d’élèves s’inquiètent sur le sort de leur progéniture.

Hompko Sylvestre KAMBOU

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