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Le Burkina Faso au chevet de sa justice
Publié le vendredi 27 mars 2015  |  AFP
Justice
© L’Express du Faso par Evrard Ouédraogo
Justice : des états généraux pour refonder le 3e pouvoir
Mardi 24 mars 2015. Ouagadougou. Palais des sports de Ouagadougou. Le président de la transition, président du Faso, Michel Kafando, a donné le coup d`envoi des états généraux de la justice qui se proposent, en 5 jours, de faire le diagnostic des maux du 3e pouvoir et de le refonder pour une société équitable




Ouagadougou - Des états généraux se tiennent jusqu’à samedi à Ouagadougou pour rendre sa "crédibilité" à la justice du Burkina Faso, compromise sous le régime du président déchu Blaise Compaoré, renversé par la rue en octobre après 27 ans de règne.

Son successeur, le chef de l’Etat Michel Kafando, arrivé au pouvoir mi-novembre, a fait du rétablissement de ce pilier républicain le principal objectif de sa courte mandature, qui doit s’achever après les élections d’octobre prochain.

Quelques 2.000 personnes - magistrats, avocats, ONG, gouvernants... - ont entamé depuis mardi le diagnostic de l’appareil judiciaire en vue de "réconcilier" la population avec sa justice.

Sous Blaise Compaoré, la justice "puait la corruption" et le "trafic d’influence", regrette la garde des Sceaux Joséphine Ouédraogo, interrogée par l’AFP. Elle avait "perdu toute crédibilité, car "le système judiciaire était assujetti à l’exécutif", certains magistrats étant même "devenus des politiciens".

Quand certains crimes et délits arrivaient au niveau judiciaire, "on mettait le pied dessus parce que les gens qui avaient des relations jusqu’au plus haut niveau du régime étaient intouchables", relève-t-elle.

La fréquente "immixtion de l’exécutif" mettait "à rude épreuve" l’indépendance de la magistrature, pourtant garantie par la Constitution, observe Moussa Stéphane Sory, conseiller à la cour d’appel de Ouagadougou, longtemps procureur en première instance.

Et de citer le cas d’un ancien directeur général des Douanes, soupçonné de corruption et d’abus de biens publics, relâché en 2008 après que Zakalia Koté, alors garde des Sceaux, eut bloqué les poursuites au motif que le douanier n’était pas "n’importe qui".

La compromission de la justice burkinabè était de notoriété publique. Boureima Bandini, un prédécesseur de M. Koté, avait même reconnu alors qu’il était aux affaires l’existence de "juges acquis" au régime.

Ce déni de justice a été à l’une des principales causes de la révolte populaire qui a balayé fin octobre le système Compaoré. Les manifestants ont vilipendé les dossiers emblématiques de crimes économiques et de sang restés impunis.

- Gouvernement ’attendu’ -

Le gouvernement intérimaire a "pleine conscience" d’être "attendu" sur le terrain judiciaire sous peine d’une nouvelle "insurrection" de la rue, observe le juriste Abdoul Karim Sango, enseignant à l’Ecole nationale de la magistrature.

Un premier pas, majeur, a été franchi récemment. Un juge militaire a été désigné pour instruire l’assassinat du président Thomas Sankara, un chef d’Etat iconoclaste et intègre assassiné en 1987 lors du putsch ayant porté M. Compaoré au pouvoir. L’image de M. Sankara a été brandie durant la "révolution" d’octobre.

Le procureur général du Faso a été saisi fin décembre pour la réouverture du très sensible dossier Norbert Zongo. Ce journaliste a été assassiné en 1998 alors qu’il enquêtait sur la mort d’un chauffeur de François Compaoré, frère cadet de l’ex-président.

Le gouvernement dit "de transition", qui a succédé au régime Compaoré, veut juger les dossiers "emblématiques" et les dignitaires de l’ancien régime, comme le réclame une bonne partie de la société civile, insiste Joséphine Ouédraogo.

"Si des gens peuvent nous proposer une formule qui ne s’appellera pas +tribunal d’exception+ mais qui nous permet, dans le respect de la Constitution, de nous saisir des dignitaires du régime déchu ou de certains dossiers emblématiques qui piétinent encore, nous applaudirons", souligne-t-elle.

Les états généraux en cours relèvent d’une même logique de "sursaut national" et de "prise de responsabilité collective" afin de soigner "ce grand malade qu’est la justice", explique la ministre.

Des réformes concernant le statut du magistrat ou les attributions et le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature y ont notamment été proposées. Un "pacte national" devrait être signé entre les différents acteurs samedi.

La compétence des magistrats burkinabè n’est toutefois pas en cause, remarque le juriste Abdoul Karim Sango, président de commission à ces assises judiciaires. "Il n’y a aucune raison que les juges ne disent pas le droit" maintenant que le "système" Compaoré a été "décapité", note-t-il.

Et de trancher : "Si dès la semaine prochaine, la justice est invitée à réactiver (d’autres) dossiers emblématiques, on pourra commencer à dire que nous nous dirigeons vers un changement."

roh/jf/dom
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