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L’Observateur N° 8307 du 6/2/2013

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Tunisie : Le cadavre qui réveille les vieux démons
Publié le vendredi 8 fevrier 2013   |  L’Observateur




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Chokri Belaïd a été froidement assassiné de plusieurs balles, mercredi 6 février, alors qu'il sortait de son domicile tunisien ; un meurtre de plus et sans doute le meurtre de trop, dans une Tunisie encore trop volatile et pas encore vraiment remise des tourments que lui imposa une révolution du jasmin, à la mode à une certaine époque, dont on se demande légitimement aujourd'hui si elle aura au final fait plus de bien que de mal ou vice versa.



Ce meurtre pose d'autant plus problème que l'homme était loin d'être un inconnu sur la scène politique tunisienne: avocat et décidément l'une des figures de proue de l'opposition dans son pays, Chokri Belaïd était connu pour ne pas avoir sa langue dans sa poche; ce qu'il pensait, il avait le courage ou le malheur de ne pas en faire mystère, ce qui n'avait pas vraiment le don de plaire au régime en place, aux yeux duquel il avait fini par passer pour la bête noire de tout un système.

Pour une multitude de Tunisiens mécontents d'Ennahda, au pouvoir, et dont le désormais illustre disparu incarnait l'idéal, cette disparition est synonyme d'assassinat de la démocratie par le parti au pouvoir. En témoignent les manifestations de colère qui peuvent, si elles se poursuivent, entraîner le retour de vieux démons.

Le parti au pouvoir ne l'ignore certainement pas: il sait qu'Ennahda est montré du doigt dans ce meurtre, dont le commanditaire à ce jour reste à découvrir, du moins officiellement; dans la foulée, le Premier ministre a dissous le gouvernement, jusqu'alors composé dans sa grande majorité de membres du parti au pouvoir, et promis un nouveau cabinet, composé essentiellement de technocrates.

Reste à savoir si pareille mesure, censée être d'apaisement, se révèlera suffisante. Pour retrouver la confiance d'une bonne frange de la population tunisienne, depuis longtemps fort remontée et qui a fini par croire que leur révolution leur a été volée, il faudra faire plus et mieux qu'un banal exercice de saupoudrage politique qui, en l'occurrence, risque de ne tromper personne.

Des Tunisiens aujourd'hui se désolent de la tournure prise par leur révolution, qui chassa Ben Ali, et se disent prêts à retourner au charbon, histoire de récupérer ce qu'on leur a volé ; et ils se jurent qu'alors ils sauraient en faire bon usage; des hommes aussi déterminés sont à prendre avec sérieux.

En un mot comme en mille, le pouvoir en place a du pain sur la planche ; sa propre crédibilité se trouve aujourd'hui engagée ; et prouver sa bonne foi dans ces différentes affaires dont on l'accuse ne sera pas vraiment une sinécure. Reste peut-être une envisageable solution : ouvrir des pourparlers francs avec une opposition par moments aux revendications maximalistes, certes, mais qui a une certaine aura populaire, qu'elle est en mesure de capitaliser à tout moment.

La chose a du bon, même si elle nécessite une bonne dose de sublimation. Lui tourner résolument le dos peut signifier mettre le feu aux poudres dans une Tunisie à ce jour pas vraiment sortie de l'ornière. Pareil brasier, personne à ce jour ne saurait pésager ni sa durée ni son ampleur, ni l'importance des dégâts qu'il produira. Alors, prudence, il y a ici comme une obligation de négocier; il y va de l'intérêt de tous.



Jean Claude Kongo

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