Accueil    Shopping    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Économie
Article



 Titrologie



Le Pays N° 5286 du 29/1/2013

Voir la Titrologie

  Sondage



 Autres articles


Comment

Économie

Jean-Paul Sawadogo, directeur général de la SOFITEX : « 122 milliards de F CFA seront distribués cette année aux producteurs dans la zone SOFITEX »
Publié le mercredi 30 janvier 2013   |  Le Pays


Campagne
© Autre presse par DR
Campagne cotonnière 2012-2013 : 55 milliards de FCFA du pool bancaire européen pour appuyer la SOFITEX


 Vos outils




Quel est le bilan de la campagne cotonnière 2012-2013 ? Quelles sont les perspectives pour la saison à venir. Qu’en est-il de la baisse du prix des intrants et de la hausse du prix d’achat du coton- graine souhaitées par les producteurs ? Quels sont les besoins de financement de la campagne 2012-2013 ? Les difficultés et la question du coton OGM introduit depuis quelques années dans les champs cotonniers. Voilà autant de questions que nous avons essayé de comprendre. Et pour en parler, qui mieux que le directeur général de la Société de fibre et textile du Burkina Faso (SOFITEX), Jean-Paul Sawadogo, pour nous donner des réponses adéquates. Nous l’avons rencontré le mercredi 23 janvier 2013 à l’occasion de la signature de la 22e convention de financement entre la SOFITEX et un pool bancaire européen.

« Le Pays » : Dans quel cadre se situe votre visite à Paris ?

Jean-Paul Sawadogo : Nous sommes ici à Paris dans le cadre du financement de la campagne de collecte, de transport et d’égrenage du coton de la campagne cotonnière 2012-2013.

C’est devenu une tradition. Chaque année, la SOFITEX vient à Paris pour une cérémonie du genre. A quand remonte le début de ce partenariat entre la SOFITEX et ces banques européennes ?

Ce partenariat avec ces banques date de deux décennies. Depuis vingt ans, la SOFITEX a recours à ces banques pour couvrir les besoins de financement de ses activités.

L’année passée, le financement était d’une cinquantaine de milliards de francs CFA. Peut-on s’attendre à une augmentation de ce montant cette année ?

L’année dernière, nous étions à une production de 350 000 tonnes. Cette année, cette production est estimée à 500 000 tonnes. Autant dire que les besoins de financement vont aussi augmenter. Effectivement, nous avons contracté en 2012, un crédit de 50 milliards de francs CFA. Cette année, nous misons sur 55 milliards de francs CFA. Mais il faut dire que les crédits que nous contractons avec les banques européennes viennent compléter ceux que nous prenons avec le pool national afin de pouvoir couvrir l’ensemble des besoins de la campagne nationale. A titre d’illustration, sur la base de 500 000 tonnes de coton graine, les revenus directs à payer aux producteurs de coton s’élèvent à 122 milliards de francs CFA. A cela, il faut ajouter les besoins pour les pièces de rechange, le transport, les salaires, etc. C’est pourquoi nous travaillons avec plusieurs partenaires.

On sait que l’un des points de discorde entre les cotonculteurs et la SOFITEX concerne le prix des intrants. Peut-on s’attendre à ce qu’une partie du montant contracté serve à subventionner les prix de ces intrants ?

Pour le moment, les prêts contractés servent à payer les producteurs et à financer les opérations de collecte et d’égrenage du coton. Ce ne sont pas des financements qui viennent pour contribuer à diminuer le prix de quoi que ce soit. Il faut dire que la question des prix des intrants est une préoccupation récurrente, étant donné que le Burkina Faso ne produit pas d’engrais, par exemple, et qu’il faut l’acheter sur le marché international. En plus, les prix des intrants varient d’une année à l’autre. Pour ce qui concerne la campagne 2011-2012, il faut saluer l’effort que le gouvernement burkinabè a consenti en accordant plus de 10 milliards de francs CFA comme subvention aux intrants. Cela a permis de les rendre plus accessibles aux producteurs. Il convient de souligner également qu’il n’y a pas de corrélation entre le prix du coton et celui des intrants. Au niveau des pays développés, les gouvernements accordent des subventions importantes aux producteurs, notamment de coton. C’est ce qui perturbe un peu nos marchés. Vous vous souviendrez qu’un certain nombre de pays constitués autour du C4 avaient désigné le président du Faso pour conduire un plaidoyer auprès de l’OMC (Ndlr : Organisation mondiale du commerce) et des pays développés producteurs de coton afin que les subventions accordées par les pays développés aux producteurs, à défaut d’être annulées, puissent être réduites de façon substantielle pour permettre une véritable concurrence. Cette lutte se poursuit, et il faut saluer l’effort déployé par le Burkina Faso, notamment le président du Faso, Blaise Compaoré, pour permettre de rendre compétitif notre coton sur le marché international.

On parle du coton génétiquement modifié (OGM) au Burkina Faso. Qu’en est-il de la situation aujourd’hui ?

Le coton génétiquement modifié a été introduit au Burkina Faso pour une raison bien simple. On a constaté à un certain moment que certaines maladies causées par les ravageurs du cotonnier étaient devenues résistantes aux pesticides et insecticides habituellement utilisés. Elles (ces maladies) causaient de véritables dégâts à la production cotonnière. Il a été donc envisagé, avec le partenariat de l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA), une solution consistant à trouver une variété qui résiste à l’attaque des ravageurs-suceurs. C’est dans ce cadre que le coton OGM a été introduit au Burkina Faso. Cette introduction a été faite sur la base de recherches, d’expérimentations pour s’assurer de la qualité de la semence introduite et que les conditions sont réunies pour permettre une véritable amélioration de la production cotonnière. Si vous voulez, le coton OGM est un mariage entre un coton burkinabè et un autre américain. Ce mariage permet de fabriquer des toxines à même d’éloigner les insectes ravageurs et suceurs sur le cotonnier. Après cette introduction, nous avons pu noter une nette diminution des maladies de cotonniers et une amélioration de la productivité. Aujourd’hui (campagne 2012-2013), nous sommes à 55% de coton OGM contre 45% de coton conventionnel cultivé au Burkina Faso. Cela est dû à la précaution prise au niveau de la recherche et à la SOFITEX, étant donné que c’est une nouvelle technologie qu’il convient d’introduire de façon progressive afin de pouvoir maîtriser l’ensemble des techniques nécessaires à une meilleure production cotonnière. Autrement, les paysans souhaitent emblaver leurs champs uniquement avec le coton OGM. Si on suivait l’expression des producteurs de nos jours, on serait à plus de 100% de coton génétiquement modifié, cultivé au Burkina Faso.

En 2011, le Burkina Faso a connu une campagne cotonnière marquée par la révolte de paysans détruisant des champs de ceux qui avaient opté de cultiver le coton cette année-là. Est-ce aujourd’hui, un vieux souvenir ?

Effectivement, en 2011 nous avons connu une situation très difficile. Cette année-là, les producteurs ont réclamé, à la fois, une diminution des prix des intrants et une hausse du prix d’achat du coton-graine. Toute chose ayant conduit à des frondes, à des destructions de champs et malheureusement à une perte de vie humaine dans le village de Mamou, commune de Yaho, dans la province des Balé. Suite à cela, il a été organisé des états généraux de la filière cotonnière qui a regroupé l’ensemble des acteurs : les cotonculteurs, les sociétés cotonnières, les banques, les chercheurs, les assureurs, les huiliers, les vendeurs d’engrais, etc. Au cours desdites assises, il a été discuté de l’ensemble des difficultés liées à la culture du coton au Burkina Faso. Les uns et les autres ont reçu des explications sur un certain nombre d’aspects. Par exemple, il a été expliqué que ce n’est ni l’Etat ni les sociétés cotonnières ni les producteurs qui fixent le prix d’achat du coton et que c’est un mécanisme qui intègre un certain nombre de facteurs du marché. Ce mécanisme est géré par une banque, en l’occurrence, la Bank Of Africa (BOA). Le mécanisme est présidé par le président de l’Union nationale des producteurs de coton du Burkina (UNPCB) et regroupe les autres acteurs que sont les sociétés cotonnières, l’Etat et les rechercheurs. Les états généraux ont été l’occasion de comprendre certains paramètres et ont permis l’apaisement de la situation et un engagement de la part des producteurs pour produire plus et mieux. Je puis vous dire que de nos jours, il existe une concertation permanente avec l’ensemble des acteurs de la filière coton pour éviter ce que nous avons connu en 2011.

Le métal jaune, l’or, a détrôné depuis 2009, le coton à la première place des produits d’exportation du Burkina Faso. Peut-on s’attendre à ce que très prochainement, « l’or blanc » retrouve sa place ?

C’est vous qui dites que le coton a perdu sa place de pionnière. Nous, nous ne percevons pas les choses de cette manière. Personnellement, j’estime que « l’or blanc » conserve toujours sa place de leader des produits d’exportation au Burkina Faso. Mieux, ce produit a même davantage plus d’éclat, à notre avis. Il s’agit d’une filière qui crée beaucoup d’emplois, qui intéresse plusieurs personnes en ce sens qu’il y a quatre millions de Burkinabè qui vivent de la production cotonnière. La filière contribue ainsi à une meilleure répartition des revenus au niveau des milieux ruraux. J’ai mentionné tantôt que pour une production de 500 000 tonnes, ce sont 122 milliards de francs CFA qui seront distribués comme revenus aux producteurs burkinabè dans la zone SOFITEX. Pour l’ensemble du pays où nous estimons une production de 630 000 tonnes de coton-graine, c’est environ 154 milliards de francs CFA qui seront repartis directement aux cotonculteurs. A cela, il faut ajouter les autres acteurs qui bénéficient de la filière cotonnière. On peut citer, entre autres, les huiliers qui reçoivent les graines de coton pour la fabrication de l’huile, de savon, etc. Ces huiliers emploient des Burkinabè pour faire fonctionner leurs entreprises. Il y a également les transporteurs. Cette année, par exemple, nous avons loué avec les transporteurs privés burkinabè, près de 500 camions pour le ramassage du coton. Eux aussi sont appelés à employer des citoyens. Il y a également les banques avec qui nous avons un très bon partenariat, que ce soit au niveau national ou international. Cette bonne collaboration est due au fait que la SOFITEX respecte ses engagements en terme de remboursement des crédits. Mais ce qu’il faut savoir est que tous les remboursements sont assortis d’intérêts financiers qui font vivre les établissements bancaires. Il y a aussi les assureurs. A ce propos, la SOFITEX dispose de 16 usines dont 15 pour l’égrenage et une pour le traitement de la semence. Toutes ces usines sont assurées. Sans oublier le parc automobile. L’activité cotonnière intéresse et fait vivre beaucoup plus de monde que d’autres secteurs. Si « l’or jaune », a fait aujourd’hui son apparition au Burkina Faso, tant mieux dans la mesure où cela constitue une amélioration des sources de ressources financières pour le Burkina Faso et une valeur ajoutée très importante. Notre souhait n’est pas qu’il y ait une dualité entre « l’or blanc » et « l’or jaune ». Nous souhaitons plutôt que l’on puisse trouver d’autres types d’or pour que cela puisse contribuer au développement du Burkina Faso.

Propos recueillis à Paris par Ambéternifa Crépin SOMDA

 Commentaires