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Art et Culture

Thomas Sankara, éternel héros du Burkina, soulève l’émotion au Fespaco de Ouagadougou
Publié le mercredi 4 mars 2015  |  AFP
FESPACO
© aOuaga.com par A.O
FESPACO 2015 : le 17e MICA ouvre ses portes
Dimanche 1er mars 2015. Ouagadougou. Site du SIAO. Le 17e Marché international du cinéma et de la télévision africains (MICA) a officiellement ouvert ses portes en marge de la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO)




Ouagadougou - Idole du récent "printemps burkinabè", qui vit chuter fin octobre l'ex-chef de l'Etat Blaise Compaoré, le président Thomas Sankara, iconoclaste et révolutionnaire, fait encore se lever les
foules au Fespaco de Ouagadougou, où un documentaire lui est consacré, près de
30 ans après sa mort.

"Capitaine Thomas Sankara", d'une durée de 90 minutes, dresse un portrait flatteur de ce chantre de l'anti-impérialisme et du panafricanisme. Son réalisateur, le Suisse Christophe Cupelin, l'y présente de son arrivée au pouvoir - par un coup d'Etat le 4 août 1983 - jusqu'à son assassinat quatre
ans plus tard lors d'un autre putsch.

L'ancienne colonie française s'appelle alors la Haute-Volta. Mais sous
l'impulsion du "Che" africain, ce pays sahélien pauvre changera de nom, pour
devenir le Burkina Faso, ou "pays des hommes intègres".

Ses oeuvres, ses discours teintés de phrases chocs, son engagement pour
l'unité de l'Afrique, pour la libération de la femme africaine, et surtout ses
discours visionnaires marquent le spectateur.

A la tribune de l'Organisation de l'unité africaine (devenue depuis Union
africaine), Thomas Sankara appelle "l'Afrique" à ne pas payer sa dette aux
pays occidentaux. "Si nous la payons c'est nous qui allons mourir", lance-t-il.

Au président français François Mitterrand, en visite à Ouagadougou, il
donne une leçon de droits de l'Homme. Paris accueillit officiellement le
rebelle angolais Jonas Savimbi et le sud-africain Peter Botha en plein
apartheid.

"Comment a-t-on laissé ces gens aux mains et aux pieds tâchés de sang,
souiller la France si propre et si belle ?", ironise-t-il, avant d'ajouter,
glacial : "Tous ceux qui ont autorisé cela en portent l'entière responsabilité
ici, maintenant et à jamais".

Le président burkinabè, devant l'ONU, dénonce pèle-mêle les guerres
impérialistes, l'apartheid, le conflit israélo-palestinien, la pauvreté. Il
invite déjà à lutter contre les changements climatiques, dont il rejette la
responsabilité sur les pays industrialisés.

Interrogé sur son bilan après quatre années de révolution, Sankara botte en
touche. Car "le danseur ne saurait dire qu'il danse bien". Mais il reconnaît
des erreurs.

- 'la bataille continue' -

Pour dresser un bilan, Christophe Cupelin multiplie les statistiques : sous
son autorité, le taux d'éducation passe de 6% à 22% en quatre ans, plus de
deux millions d'enfants sont vaccinés en quinze jours, des logements sociaux
sont construits, tout comme des milliers de centre de santé. Le produit
intérieur brut double.

L'année de sa mort, un journaliste l'interroge sur des rumeurs d'attentat
contre lui. Sankara lui confie : "Le jour que vous apprendrez que Blaise
(Compaoré) prépare quelque chose contre moi, n'essayez pas d'intervenir, il
sera trop tard".

Le jeudi 15 octobre 1987 à 16h, le capitaine Thomas Sankara est assassiné
par un commando à la présidence alors qu'il se rend au palais pour un conseil
de ministres extraordinaire. Il porte un survêtement, car tous les jeudis
soirs sont consacrés au sport de masse, obligatoire pour tous.

A Ouagadougou, l'émotion est réelle encore aujourd'hui. Chaque phrase choc
est ponctuée d'applaudissements nourris par le public du "Ciné Neerwaya" -
3.000 places -, où le film est projeté pour la première fois au Burkina.

Les apparitions de Blaise Compaoré provoquent à l'inverse des huées. Des
cris de dégoût se font entendre lorsqu'il affirme "regretter" la mort de
Sankara.

"Partout, le film a été accueilli de la même manière : très positive",
raconte à l'AFP Christophe Cupelin.

En Argentine, où une dictature militaire fit des ravages entre 1976 et
1983, les spectateurs "se sont levés comme un seul homme et ont applaudi"
lorsqu'ils l'ont entendu dire : "Un militaire sans formation politique est un
criminel en puissance", se souvient-il. "Le discours de Sankara s'adapte à
tous les citoyens du monde", remarque le réalisateur.

Emu après la projection, Moussa Ouédraogo, un Burkinabè de 37 ans, ancien
"pionnier de la révolution", se dit "très nostalgique et très fier". Et
d'ajouter : "la bataille continue, nous maintenons haut le flambeau !"

"Je comprends mieux tout ce qui se passe, l'élan que le peuple veut donner
ou plutôt redonner au pays", commente Maria Gaschet, une spectatrice
française, en référence à la révolte populaire qui a balayé Blaise Compaoré.

L'ex-président, qui a tenté de se maintenir au pouvoir en révisant la
Constitution, en a été chassé fin octobre par des centaines de milliers de
jeunes imprégnés des discours sankaristes. "Malheur à ceux qui bâillonnent
leur peuple", disait le capitaine Sankara.
roh/jf/de
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