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Léonce Koné, président du directoire du CDP à propos de la présidentielle de 2015 : « Il n’y aura pas de candidat qui sera imposé par Blaise Compaoré »
Publié le mercredi 4 fevrier 2015  |  Le Quotidien
CDP
© aOuaga.com par Séni Dabo
CDP : le Bureau politique tient sa 53e session
Samedi 31 janvier 2015. Ouagadougou. Stade du 4-Août. Le Bureau politique national (BPN) du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) tient sa 53e session après l`insurrection populaire de fin octobre 2014. Photo : Léonce Koné, président du directoire du CDP




Léonce Koné, 67 ans, diplômé en droit international de l’Université de Paris I, est depuis le 17 janvier 2015 le président du directoire du Congrès pour la démocratie et le progrès. Secrétaire adjoint à la trésorerie au sein du secrétariat exécutif national du CDP, il était jusqu’à la chute du régime de Blaise Compaoré, député à l’Assemblée nationale au cours de la dernière législature. Directeur général de la Caisse nationale de crédit agricole du Burkina devenue Banque agricole et commerciale du Burkina du 1er août 1999 au 31 janvier 2009, ce cadre de la BCEAO, a en outre occupé les fonctions de ministre du Commerce, de la Promotion de l’entreprise et de l’Artisanat, de mars 2010 à janvier 2011. C’est sur ses épaules que repose la lourde tâche de conduire le CDP au prochain congrès en mars. En attendant, il assure la gestion quotidienne du parti. Nous avons abordé avec lui, à domicile, le mercredi 28 janvier 2015, les défis actuels dont fait face le CDP, la transition politique, le vote des Burkinabè de l’étranger.
Le Quotidien : Vous avez été désigné président du comité directoire du CDP ; qu’est-ce qui a prévalu à votre choix ?

Léonce Koné, président du comité directoire du CDP : Ce choix est dû au fait que , naturellement, après les évènements qui sont survenus en octobre dernier et la crise qui s’en est suivie dont la suspension du CDP, nous avons ressenti au niveau de la direction du parti le besoin de mettre en place une structure provisoire pour conduire à la relance des activités, en rassemblant autour de la direction et en son sein, davantage de représentants des vraies forces du parti, des forces qui sont à la base de notre mobilisation, c’est-à-dire dans les provinces et dans la jeunesse et au niveau des femmes pour que dans cette période qui nous sépare du congrès, nous puissions mieux remobiliser notre parti pour affronter les élections qui viennent.

Comment avez-vous été choisi ? Y avait-il des concurrents ?

Non. Il n’y avait pas de concurrent et nous n’étions pas dans ce processus. Il s’agit d’une direction qui va être à pied d’œuvre seulement jusqu’au congrès. Lequel congrès est supposé se tenir dans le premier trimestre de l’année 2015. Donc, le directoire est une question de deux mois ou trois mois. Je suis heureux que mes camarades m’aient choisi pour conduire l’équipe collégiale devant diriger les activités du parti. Sinon, je n’ai aucun mérite extraordinaire pour occuper cette fonction.

On peut vous considérer actuellement comme le premier responsable du parti. Léonce Koné à la tête du CDP. Cela était-il imaginable, il y a peu de temps ?

Pour moi non, parce que je n’avais pas l’ambition tout simplement. Mais les circonstances ont fait qu’il en est ainsi et je n’en fais pas une question d’ego personnel.

Pourquoi avoir choisi un directoire pour conduire le parti pendant qu’il y a un secrétariat exécutif ?

Le secrétariat exécutif national existe toujours. C’est lui qui a donné mandat au directoire pour conduire le travail que nous faisons actuellement. On aurait pu garder le secrétariat exécutif national et adjoindre d’autres personnes des provinces, du milieu de la jeunesse, des femmes, etc. Mais, nous avons trouvé plus simplement de constituer un directoire de l’ensemble de toutes ces forces. Donc le secrétariat exécutif national existe. C’est lui qui a donné mandat au directoire et le directoire lui rend compte de ses activités. Le secrétariat exécutif national a été désigné par le congrès du parti. Nous voulons fonctionner dans la légalité de nos propres institutions. C’est le prochain congrès du parti qui va renouveler les instances du parti aussi bien l’instance de direction que le bureau politique.

Quelle est la composition de ce directoire ?

La liste est longue. Il y a plus d’une cinquantaine de personnes. Nous voulons dans cette phase rassembler et consolider les cohésions du parti. C’est ce qui fait que l’équipe est assez grande. Cela peut paraître pléthorique pour fonctionner efficacement. Mais, l’objectif principal que nous avons aujourd’hui est de rassembler et de consolider. Face à cet objectif, je n’ai pas un problème avec le nombre. Ce n’est pas un gouvernement pour qu’on puisse juger son efficacité en fonction du nombre. Ce n’est pas non plus une direction d’entreprise. C’est un parti politique, un parti de masse et c’est cela que représente le directoire.

Quelles sont les missions du
directoire ?

Le directoire doit assurer la relance des activités du parti. Pour cela, nous prenons contact avec les structures du parti. Cela est chose déjà faite. Nous allons avoir des missions sur le terrain pour rencontrer également nos structures provinciales. Nous allons les organiser également pour qu’elles mènent des activités dans les comités de base, les villages et les secteurs. La deuxième mission du directoire est de préparer les instances statutaires. Nous aurons un congrès à une date qui reste à être fixée. Mais, il doit certainement se tenir dans le premier trimestre de l’année 2015. Si pour des questions de préparation et d’organisation, cette date n’est pas respectée, elle ne doit pas trop s’éloigner de ce calendrier. Nous avons pour mission d’entretenir et renforcer les relations du parti avec d’autres partis du Burkina et à l’étranger. Au-delà de cela, nous avons pour mission d’assurer la vie courante et la gestion des réformes du parti.

Avec la relance de ses activités, quelle est l’ambition du CDP : reconquérir le pouvoir d’Etat ou survivre ?

C’est la mission de tout parti politique que de conquérir le pouvoir d’Etat. Nous avons cette ambition. Ce n’est pas juste un vœu pieux. Je vous rappelle qu’aux dernières élections législatives, notre parti a obtenu 70 députés sur un effectif de l’Assemblée nationale de 127 députés à l’issue d’élections qui n’ont pas été contestées de façon significative. Nous pensons que cela indique un bon potentiel. Aux élections municipales, il en est de même. Sur les 370 communes, nous dirigions à peu près 314 communes. Je ne parle pas du nombre des conseillers parce que nous étions largement majoritaires. Cela crée une base qui a été, sans doute, entamée par la crise que nous avons connue. Mais, il reste quand même un potentiel important. Nous espérerons reconquérir une position dominante ou position importante à l’issue des élections qui vont venir prochainement. En tout cas, notre parti aura une place incontournable dans le paysage politique au Burkina Faso.

Est-ce que depuis que vous assumez vos fonctions de président du directoire du parti, Blaise Compaoré vous a contacté ?

Il ne m’a pas contacté. Mais, nous sommes en relation avec lui. Le président Blaise Compaoré est, c’est incontestable, le fondateur du parti. Le parti continue à lui être loyal. Nous sommes également un parti qui est lucide. Des évènements sont intervenus en octobre 2014 et Blaise Compaoré a rendu sa démission. Cela ouvre une nouvelle base de la vie politique au Burkina Faso et de la vie politique du CDP. Tout cela, nous en sommes conscients. Mais nous n’avons pas tourné le dos au président Compaoré.

Il ne vous a pas contactés jusque-là ? Ne vous a-t-il pas non plus donné des directives ?

Non. Nous prenons de ses nouvelles et nous voulons nous rassurer, compte tenu des circonstances dans lesquelles il est parti, que tout va bien pour lui. Nous savons aussi qu’il adresse ses encouragements aux militants du CDP qui sont restés ici. Nous savons aussi qu’il s’engage dans la lutte pour les élections à venir.

Comment Blaise Compaoré contacte le parti s’il ne vous appelle pas en tant que premier responsable ?

Si vous voulez que je vous donne les détails de la manière dont nous avons les nouvelles du président Blaise Compaoré, je ne vous le dirai pas. Ça, la réponse est très claire.

Quelle lecture faites-vous du groupe de militants du CDP qui sont sortis pour demander la démission du Secrétariat exécutif national ?

J’ai lu cela dans la presse parce qu’ils ont fait une conférence de presse la semaine dernière. Mais avant, j’ai rencontré les jeunes de ce mouvement. C’est l’air du temps et nous prenons cela au CDP avec philosophie. Ce sont des jeunes qui se réclament comme militants du CDP. Ca me paraît le plus important. Même si je préfère pour ma part que les discussions et les divergences qui peuvent y avoir au sein d’un parti ne doivent pas se faire par conférences de presse interposées. Les problèmes se règlent dans le parti. Nous pouvons demander à d’autres jeunes qui sont la majorité des jeunes du CDP de faire une conférence de presse pour répliquer à ce que ces jeunes ont déclaré. Mais, nous avons choisi en définitive de ne pas nous orienter dans cette voie. La direction est entrée en contact avec ces jeunes pour comprendre le sens de leur réclamation et voir dans quelles mesures le parti peut en tenir compte. Je suis d’accord qu’un parti politique, c’est une confrontation d’idées, de projets de société et d’orientations politiques. C’est cela qui fait la vie d’un parti politique. Nous souhaitons dans le cadre de ce directoire et pour les instances qui vont venir, plus tard, que le parti soit un lieu de débat libre. De ce point de vue, je ne suis pas gêné de la sortie des jeunes.

Ces jeunes fustigent un manque de démocratie au sein du CDP. La conférence de presse n’était-elle pas la meilleure façon de se faire entendre ?

Le directoire vient d’être constitué et nous faisons la relance des activités. Notre parti se réorganise. Il faut laisser les choses se faire suivant le rythme qui est possible dans le contexte actuel. Le parti a été suspendu en décembre et la suspension a été levée en janvier. Nous sommes en fin janvier. Je ne vois pas quel est le retard important que nous avons mis à assurer la relance des activités du parti et à rassembler ses structures. Les choses se passent de mon point de vue normalement. Le CDP est un grand parti et il n’est pas facile de réunir les instances, de réunir les représentants dans les provinces etc. Nous faisons de notre mieux pour travailler à cela activement. Je crois que le problème qu’il y a avec ces jeunes sera réglé dans le cadre du parti assez vite.

Il y a d’autres jeunes qui ont appelé l’un de vos militants à être candidat à l’élection présidentielle de 2015. Comment avez-vous accueilli cela ?

Lequel de nos militants ?

Djibrill Bassolé pour ne pas le nommer qui était conseiller politique du CDP…

Il y a des jeunes qui appellent à la candidature du général Djibrill Bassolé. Je rappelle qu’il a été militant de CDP et conseiller politique national.

Il est toujours conseiller politique national ?

Non parce que je crois que le statut des officiers généraux leur impose de ne pas avoir d’activités politiques. Donc, il a dû rendre sa démission du CDP et de ses fonctions de conseiller politique national. Il est proche de l’ancien régime. Il a été ministre d’Etat jusqu’à la chute du régime. Il est proche de notre parti sans doute. Mais, il n’est pas un militant du CDP aujourd’hui. Dans notre parti, c’est le congrès qui investit le candidat. Le moment venu, les candidats qui souhaitent bénéficier de l’investiture du CDP se feront connaître et le parti donnera une suite à ces demandes.

Est-ce que ce n’est pas le candidat qui vous sera imposé par Blaise Compaoré pour l’élection présidentielle de 2015 ?

Non. Il n’y aura pas de candidat qui sera imposé par Blaise Compaoré. Ce n’est pas le cas aujourd’hui avec le Général Djibrill Bassolé. Il n’est pas le candidat du CDP, il n’est pas le candidat du président Blaise Compaoré au moment où je vous parle.

Djibrill Bassolé a dit qu’il va consulter l’ensemble de la classe politique. Est-ce qu’il est venu vers le CDP ?

Nous avons des entretiens informels dans lesquels je n’entrerai pas.

Vous a-t-il fait savoir sa volonté d’être candidat ?

Je sais qu’il sera candidat ou qu’il souhaite être candidat. Pour être plus prudent, je sais qu’il est intéressé à être candidat et qu’il observe maintenant les différents mouvements de soutien dont vous parlez pour voir si cela peut le décider à sauter le pas.

Est-ce que vous avez discuté de cela au sein du directoire ?

Non. Nous avons adopté une position très claire. Nous allons attendre le moment propice lorsque des candidats se seront manifestés et auront exprimé le souhait d’être investis par le CDP, nous ferons cela et nous verrons comment procéder au choix de notre candidat et à son investiture en relation avec les partis avec lesquels nous sommes alliés. Mais aujourd’hui, nous n’en sommes pas là.

Pour le congrès à venir, doit-on s’attendre à un grand bouleversement à la tête du parti ?

Le changement qui va intervenir à l’issue du congrès que nous allons tenir aura l’ampleur que le congrès va décider. Aujourd’hui, je serai bien en peine de vous dire de quelle ampleur sera ce changement. Nous attendons le congrès. Il sera préparé. Le Bureau politique national va se réunir. Les instances vont commencer à fonctionner. Nous saurons dans quel sens nos militants doivent aller.

Un de vos militants et non des moindres est François Compaoré. On dit qu’il a une mainmise sur le directoire. Quelle est sa contribution dans les travaux du directoire ?

Aucune. Comme vous dites, il est à l’étranger et il n’a aucune participation aux travaux du comité directoire. Il est membre du secrétariat exécutif national mais il ne participe plus depuis les évènements d’octobre 2014.

Il se susurre qu’il n’a pas bien accueilli votre nomination à la tête du directoire ?

Ce sont des affabulations. Il n’y a pas de manœuvre de cette nature-là. Je n’ai aucune idée, aucune information d’un membre du directoire ou de qui que ce soit qui est en train de mener des actions visant à déstabiliser le directoire. Je n’en ai pas connaissance. Il faut vous méfier dans le contexte actuel au Burkina de tout ce qu’on peut raconter. Dans la même journée on dira une chose et son contraire.

Il paraît que dans le contexte actuel, les « gourous » du parti ne veulent pas délier le cordon de la bourse ?

Premièrement, il n’y a pas de gourous au CDP. Deuxièmement, financer des activités politiques a toujours été difficile. Contrairement à ce que vous pensez, même au temps où le CDP était au pouvoir- je suis bien placé pour le savoir parce que j’étais secrétaire adjoint à la trésorerie cela a toujours été difficile de financer les activités. Nous avions une trésorerie serrée. La législation burkinabè permettait que les partis bénéficient d’une subvention de l’Etat. Je ne sais pas si c’est toujours le cas actuellement. Nous verrons ce qu’il en est. Notre parti essaie de faire face à ses obligations, d’assurer les dépenses qui sont nécessaires pour la tenue de ses organes, pour son fonctionnement courant. Naturellement cela n’est assuré par autre chose que par les contributions volontaires des uns et des autres. Même si nous ne sommes pas un parti opulent, en tout cas, nous arrivons à faire face à nos obligations. Les gens contribuent et ils contribuent même volontairement. En cela, la crise est une bonne chose parce qu’être militant, ce n’est pas seulement venir à une réunion pour bavarder et repartir. Il faut faire vivre le parti et je suis heureux de voir que nos camarades se dévouent et ils participent bien volontiers à ces financements dans la mesure de leur possibilité.

Est-ce à dire que maintenant vous connaissez vos vrais militants ?

Oui, d’une certaine manière. Si vous voulez dire que le contexte de crise que nous avons traversé a fait que certains ont préféré partir tandis que d’autres sont restés, cela est vrai. Ce sont les militants qui sont vraiment loyaux qui sont restés. C’est une population qui n’est pas négligeable du tout. Pour ma part, j’en tire un grand réconfort. Ça me laisse penser que le CDP est un parti qui conserve dans la population burkinabé un fort potentiel.

Quid de la reconstruction du siège du CDP ?

Nous y sommes. Vous savez le siège du CDP a été détruit et saccagé. Il faut le réhabiliter. Avant cela, comme il y a eu morts d’hommes- je parle du camarade Salif Ouédraogo qui est mort par asphyxie à l’occasion de l’incendie dans le siège du parti- il est nécessaire que l’on procède à des rites suivant les différentes religions pour bénir les lieux. Nous allons faire le constat sur les endroits que nous pourrons réhabiliter pour faire nos réunions et voir après si nous pouvons réhabiliter l’ensemble du bâtiment.

Des jeunes d’un parti pour ne pas dire le MPP sont sortis pour demander que des caciques du CDP ne puissent pas se présenter à l’élection présidentielle de 2015, pour avoir conduit le Burkina dans une crise. Comment avez-vous accueilli cela ?

J’ai entendu des échos. Je pense d’abord que les meetings sont le lieu, par excellence, de l’exaltation. Mais, je pense aussi que quand on s’exprime au nom d’un parti, même quand on est jeune, il faudrait être responsable. Je trouve que c’est puéril de dire des choses comme cela. Ce n’est pas de cette manière qu’on va bâtir une démocratie au Burkina. La démocratie implique que tous les partis puissent participer aux élections, que tous les candidats qui remplissent les conditions prévues par la loi puissent se présenter aux suffrages des électeurs. Donc, c’est anti-démocratique, irresponsable parce que dans le contexte où nous sommes, nous sommes avancés dans la durée de la transition. Je crois que tous les partis politiques doivent travailler à créer un climat de réconciliation nationale qui ne veut pas dire que tout le monde s’assemble dans une pensée unique. Il est bon qu’il y ait des divergences qui s’expriment à travers les partis politiques. Nous devons faire en sorte que le Burkina soit une démocratie apaisée dans laquelle on reconnaît à tous les partis le droit de se présenter aux élections. C’est dans ce climat que nous pourrons mettre en place après les élections un renouveau démocratique au Burkina. On ne le fait pas avec des propos de ce genre-là. C’est tout à fait le contraire du sens dans lequel nous souhaitons aller et le contraire du sens dans lequel les autorités de la transition même souhaitent aller. La transition va réussir non pas parce qu’il y aura élection le 11 octobre 2015. Elle va réussir parce qu’après les élections, les Burkinabè vont se reconnaitre dans les institutions qui seront mises en place et qu’il n’y aura pas de contestation majeure dans le pays, que les gens verront qu’on a fini avec la phase de la transition pour nous occuper du développement du Burkina. C’est cela le sens dans lequel, tous nous devons aller. Je crois que certains autres responsables de ce parti ont reconnu que ce n’était pas des propos à tenir. J’ai cru comprendre qu’ils ont dit vouloir plutôt porter l’insurrection dans les urnes. Nous ne voyons pas le vote comme une insurrection dans les urnes, mais comme le choix éclairé, lucide des populations burkinabé. C’est vers cela que nous voulons aller.

Certains partis sont déjà actifs sur le terrain. D’autres peinent à se faire entendre. Est-ce que le CDP et ses alliés ne se sentent pas défavorisés ?

Nous ne se sentons pas défavorisés. C’est vrai que nous avons pris du retard, du fait que nous avons été suspendus et que la principale victime de l’insurrection populaire a été le CDP. Beaucoup de nos biens ont été saccagés. Mais, les choses sont en train de changer. Nous avons repris nos activités. Sans doute, on nous voit moins dans les médias. Mais, ce ne sont pas les médias qui font l’élection. C’est le contact direct avec les électeurs. De ce point de vue, nous ne pensons pas être en retard. S’il y a un retard, nous allons le combler et participer pleinement à cette campagne électorale avec de grandes ambitions.

Quels sont les noms qui sortent aujourd’hui pour être candidats à l’élection présidentielle ?

Je n’en connais pas. Je ne vais pas me lancer dans ces supputations. Le moment venu, on saura ce qu’il en est.

Il y a le nom de l’ancien président de l’Assemblée nationale, Soungalo Appolinaire Ouatara. Confirmez-vous qu’il est rentré et qu’il a le profil d’un présidentiable ?

Je crois savoir que Soungalo Ouattara est effectivement rentré au Burkina et qu’il est à Bobo. Je ne sais pas s’il envisage de se présenter aux élections présidentielles. Nous n’en sommes pas encore à ce stade.

Est-ce que des militants ne vous font pas savoir de façon inconsciente leur intention d’être candidat ?

(Rires) Comment pouvez-vous savoir si quelqu’un a l’ambition inconsciente de se présenter à l’élection ? Parce qu’il a l’air présidentiable lorsqu’il marche dans la rue ? Non. Vraiment, je ne vais pas jouer ce jeu-là. Pour moi, c’est une chose simple et claire. Le jour où quelqu’un pense qu’il souhaite être candidat à la présidentielle, il vient au CDP et il le fait savoir. En ce moment on l’enregistre et la question est résolue.

Quelle sera la procédure pour désigner votre candidat ?

Pour l’instant nous n’avons rien arrêté sur la procédure de sa désignation. Ce que je peux vous dire, à titre personnel, est que le CDP a besoin d’introduire davantage de démocratie dans son fonctionnement. Deuxièmement, notre parti a besoin de nouer un lien plus fort, plus constant avec ses structures dans les régions et dans les provinces. Je ne sais pas si c’est l’orientation que prendront les décisions qui sortiront du congrès. Je pense que ce serait une bonne voie pour améliorer le fonctionnement du parti, le rendre plus démocratique et être plus en phase avec ce que souhaitent nos militants à la base.

Est-ce qu’il y a des noms de personnes qui circulent pour prendre la tête du parti à l’issue du congrès ?

Nous ne sommes pas à ce stade.

Est-ce que l’on peut s’attendre à ce que Assimi Kouanda revienne ?

Je ne sais pas. Il est militant du CDP. Je n’aurai pas le droit de vous dire qu’il est impossible qu’il revienne. Dans notre parti, nous ne sommes pas dans l’exclusion. Tout dépendra de lui. Ce que lui m’a confié est qu’il voulait prendre du recul vis-à-vis des responsabilités de direction du parti. Il a dit qu’il continuera d’appuyer l’action du parti. S’il y a directoire, c’est précisément parce qu’il a souhaité prendre du recul par rapport à la direction du parti. Cela dit, je lui dois le plus grand respect, parce qu’il a fait preuve de loyauté à la fois vis-à-vis du parti et vis-à-vis de son fondateur. Pour moi, ce sont des qualités malgré tout ce que l’on peut lui reprocher.

Diriger un parti comme le CDP qui a beaucoup de cadres, n’est-ce pas lourd pour vous ?

C’est lourd. Mais d’une certaine manière, c’est exaltant pas pour moi seul, mais pour tous les membres du directoire. C’est un challenge, pas pour moi seul, mais pour l’ensemble de l’organe collégial qui compose le directoire. Il n’y a rien de facile dans ce monde.

L’actualité politique nationale est que les Burkinabè de l’étranger ne pourront pas voter en 2015. Quelle est votre appréciation de cette donne politique ?

Ma première appréciation est que dans le contexte politique actuel du Burkina, il ne faut pas que ce soit un sujet de polémique sur lequel les partis s’affrontent avec des arguments politiciens. Au-delà de cela, nous sommes favorables au vote des Burkinabé de l’étranger et ce pour des raisons objectives. D’abord, ils sont nombreux. Le Burkina n’est le Niger ni le Togo. Nous sommes un pays dans lequel il y a 10 millions qui vivent à l’étranger. Nous sommes 16 millions sur le territoire national. Cela veut dire que même si le chiffre de 10 millions peut être considéré comme excessif, entre le tiers et la moitié de la population burkinabé vivent à l’étranger. La deuxième raison est que nos compatriotes contribuent de manière massive, déterminante à l’économie nationale, à la fois par le transfert qu’ils font pour aider leurs familles sur place et également par les investissements que certains d’entre eux réalisent. Il y a quelques années quand j’étais directeur de banque, nous nous sommes intéressés à ce secteur. Leur transfert pouvait quelquefois atteindre 40 milliards de F CFA. Nos compatriotes qui travaillent à l’étranger souvent dans des secteurs extrêmement difficiles, apportent plus au pays que toute l’aide que nous recevons au titre de l’aide publique au développement. Ce n’est pas négligeable. Cette aide constitue souvent l’essentiel des filets sociaux qui existent dans notre pays. Les filets sociaux, c’est quand l’Etat rassemble des ressources pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables. Je ne connais pas les chiffres. Mais, sans doute que les Burkinabè de l’étranger contribuent plus que l’Etat ne le fait. Ces deux arguments réunis nous font penser qu’il n’y a pas de raison que l’on écarte les Burkinabè de l’étranger des scrutins présidentiels. Depuis 2009, le vote des Burkinabè de l’étranger est la loi. Le code électoral a été modifié pour permettre à la CENI de mettre en place des démembrements dans les ambassades et les consulats généraux. La CENI a effectué des missions dans différentes ambassades pour mettre en place les démembrements et commencer l’identification et le recensement des Burkinabè de l’étranger en leur délivrant des cartes consulaires biométriques. La CENI nous avait rassuré qu’elle était engagée dans un processus qui devait conduire à la participation des Burkinabè de l’étranger à l’élection présidentielle en 2015. Et puis tout à coup, la transition ayant commencé, nous apprenons que la CENI déclare qu’elle n’est plus à mesure de le faire. C’est sans doute vers cela que s’orientent les autorités de la transition. Nous voulons être de bonne foi sur cette question. Si effectivement, il y a des raisons majeures et objectives qui font qu’il est impossible d’organiser ces élections à l’étranger, la moindre des choses est que la CENI et les autorités de la transition expliquent les raisons. Tout le monde appréciera, à la fois l’opinion nationale que les principaux concernés. La principale raison que l’on nous a donnée est que nous sommes dans une transition, donc dans un contexte particulier qui ne permet pas d’organiser le vote des Burkinabè de l’étranger. Mais, je vous rappellerai que récemment le Mali était en guerre. Une large partie de son territoire était occupée. La partie qui est inoccupée était en insécurité. Malgré ce contexte, les Maliens de l’étranger ont voté. Pourquoi nous ne pouvons pas le faire ? Par ailleurs, on nous dit que la CENI avait identifié une trentaine de centres de vote et qu’au regard de l’évolution des choses, il s’y est ajouté une quarantaine de centres de votes. A l’impossible, nul n’est tenu. Si on ne peut pas faire 80 centres de vote, au moins faisons le vote dans les 30 ou 40 centres qui ont été identifiés l’année dernière. Il y a un certain nombre d’éléments qui font que le vote des Burkinabè ne doit pas être un sujet de bagarre, mais un sujet que l’on doit regarder avec objectivité. Il faut informer les gens des tenants et aboutissants afin que nous puissions apprécier le bien-fondé des décisions qui ont été prises.

Quelle appréciation faites-vous de la marche de la transition ?

Nous prenons la transition comme elle est. Nous avons pris après mûre réflexion- le CDP et ses partis alliés- la décision de participer loyalement et de manière constructive. Nous voulons que la transition aboutisse à un meilleur devenir pour le Burkina. Même si les conditions ne nous satisfont pas, nous n’avons pas d’autres choix. Nous sommes reconnaissants aux autorités de la transition d’avoir mis en place un calendrier qui indique très clairement leur intention d’organiser les élections avant la fin de la transition. Au regard des assurances que nous avons, nous espérons qu’elles vont se dérouler de façon démocratique. Nous sommes reconnaissants de savoir que la transition se déclare neutre, à équidistance des activités politiques. Nous attendons que cela soit concrétisé dans les faits. Pour le reste, ce que la transition vit à l’interne, nous regardons. Les démissions des ministres, les émoluments des membres du CNT ne m’intéressent pas plus que cela. Cela regarde les dirigeants de la transition. Naturellement, j’ai une opinion personnelle. Mais, je ne vais pas m’attarder sur cela. Il y a des choses beaucoup plus importantes.

Peut-on s’attendre à ce que le CDP retrouve de sitôt le palais de Kosyam ?

Regardez et vous verrez après le 11 octobre 2015 si ce n’est pas un candidat soutenu par le CDP qui sera à Kosyam.

On reviendra vous voir…

Revenez me féliciter. (Rires)
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