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16e anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo : le peuple veut maintenant des actes
Publié le lundi 15 decembre 2014  |  Le Pays
16e
© aOuaga.com par A.O
16e anniversaire du 13-Décembre : le Collectif inclue les martyrs de l`insurrection dans ses hommages
Samedi 13 décembre 2014. Ouagadougou. Le Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP) a inclue cette année les martyrs de l`insurrection populaire de fin octobre dans les hommages qu`il rend chaque fois à Norbert Zongo et à ses compagnons en déposant également des gerbes sur leurs tombes




Parmi les causes lointaines de la chute du régime de Blaise Compaoré, l’on peut citer, sans risque de se tromper, l’assassinat du journaliste Norbert Zongo dans les circonstances que l’on sait. Cet acte dont le caractère barbare a choqué, indigné et révolté le peuple burkinabè voire celui d’Afrique et d’ailleurs, a suscité la mise en place d’une méga coalition de partis politiques et d’associations de la société civile dont l’objectif était non seulement de réclamer justice pour Norbert Zongo, mais aussi de lever l’omerta sur l’ensemble des crimes économiques et de sang, imputables à la gouvernance de Blaise Compaoré. Ce dernier dont le frère cadet, François Compaoré, était soupçonné d’être mêlé au boucanage du journaliste, avait mis, pouvait-on avoir l’impression, un point d’honneur à ce que les Burkinabè ne connaissent jamais la vérité sur cette affaire. La chute de son régime, dans les circonstances que l’on connaît, a manifestement modulé le discours officiel, en l’orientant dans le sens des aspirations profondes du peuple burkinabè. Et ces aspirations n’ont pas varié d’un iota, depuis le 13 décembre 1998. Les autorités de la transition qui savent qu’elles ont une dette morale vis-à-vis de Norbert Zongo, n’ont pas voulu se faire conter ce 16e anniversaire, le premier après Blaise Compaoré. En effet, cinq membres du gouvernement parmi lesquels la ministre de la Justice, Joséphine Ouédraogo, et le Premier ministre, Isaac Zida, ont assisté au grand meeting qui a suivi la marche. Mieux, à l’occasion et sur l’insistance du public, Isaac Zida a martelé ceci : « Le message est très clair, le peuple veut la justice, alors justice sera rendue au camarade Norbert Zongo et à tous ceux qui sont tombés sous les balles assassines du président Blaise Compaoré ». Il a ensuite annoncé des réformes au sein de l’armée, notamment au niveau du Régiment de sécurité présidentielle dont certains éléments avaient été désignés comme suspects sérieux par la commission d’enquête indépendante dans l’assassinat de Norbert Zongo. Dans la foulée, le Premier ministre a annoncé d’autres mesures fortes comme la création d’emplois et la restitution au peuple de certains biens comme la Société de construction et de gestion immobilière du Burkina (SOCOGIB), bradée à l’époque contre un franc symbolique à la « belle-mère nationale ».
L’on peut reconnaître à Zida la volonté de rompre avec le système Compaoré
Cette sortie du Premier ministre, qui pouvait donner l’impression qu’il lisait sur le téléprompteur d’un des responsables du collectif qui a porté avec constance et courage le dossier Norbert Zongo pendant 16 ans, a suscité un tonnerre d’applaudissements du public. Il ne pouvait pas en être autrement, quand on connaît les frustrations accumulées par le peuple burkinabè, tout au long des 27 ans du règne de Blaise Compaoré. Ces propos du Premier ministre sont un signe des temps nouveaux, et ils permettent d’entretenir l’espoir que plus rien ne sera comme avant. Toutefois, l’on peut lui faire les observations suivantes.
D’abord, l’on peut faire le constat qu’il sérine la même rhétorique au peuple burkinabè, sans pour autant la traduire en actes concrets, depuis qu’il est aux affaires. « Le tigre, avait dit Wolé Soyinka à Senghor et à ses amis qui, à ses yeux, ne prônaient la négritude que par les mots, ne proclame pas sa tigritude, mais il bondit sur sa proie et la dévore ». De ce point de vue, l’on peut suggérer au Premier ministre de la transition d’aller au-delà des tirades dont il est désormais coutumier pour poser des actes concrets, parce que le peuple en a besoin. Si, par exemple et relativement à l’affaire Norbert Zongo, il avait acté, à l’occasion de ce 16e anniversaire, la réouverture du dossier Norbert Zongo, cela aurait eu plus d’intérêt pour les Burkinabè. L’autre observation, pour ne pas dire le reproche qu’on pourrait lui adresser, est lié à ce qu’on pourrait appeler le caractère populaire de ses annonces. En effet, l’on peut avoir l’impression que Isaac Zida réserve la primeur des grandes décisions du gouvernement au peuple burkinabè, juste pour entretenir la « zidamania » qui s’est accaparée de celui-ci, depuis la chute de Blaise Compaoré. Cette façon de procéder pourrait créer une sorte de cacophonie au sein de l’exécutif de la transition. Ce constat, bien des Burkinabè et d’observateurs extérieurs de la scène politique du pays des Hommes intègres, l’ont déjà fait.
Cela dit, l’on peut tout de même reconnaître à Isaac Zida, la volonté de rompre hic et nunc avec le système Compaoré. Il peut d’autant plus le faire que le contexte y est favorable, mais encore faut-il qu’il y mette la méthode et la manière et qu’il agisse plus qu’il ne parle. Ce faisant, il pourra dissiper toutes les suspicions qui pèsent sur lui déjà et qui l’accusent à tort ou à raison de s’être accaparé du poste de Premier ministre pour mieux protéger les arrières de Blaise Compaoré. Ces suspicions sont d’autant plus sérieuses que Zida était jusqu’à la chute de Blaise Compaoré, une des pièces maîtresses de l’appareil sécuritaire et répressif du système déchu. Il lui revient donc de travailler à déconstruire par les actes ces préjugés, si véritablement il veut prendre place durablement dans le cœur du peuple burkinabè, au-delà de la période de la transition. Mais cela passe beaucoup plus par le pragmatisme tangible que par la rhétorique lénifiante.

Pousdem PICKOU
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